Marche de Kasxxx
- pierresauge
- 7 juin
- 31 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 juil.
Marche de Kasxxx accompagné par Cyprien
Jeudi 5 juin : Lille / Le Puy-en-Velay
Cyprien : Je m’appelle Cyprien et j’accompagne Kxxx pour les trois mois qui suivent. Enfin nous partons ! Après quelques tentatives avortées et un peu d’attente ! Nous y voilà ! Kxxx semble être dans une très bonne dynamique, positif, voulant aller de l’avant, découvrir la France et ses paysages ! Il trouve le Puy-en-Velay tellement beau qu’il voudrait y rester une semaine. Mais il a des fourmis dans les jambes à l’idée de partir marcher ! Son sourire en dit long, tout autant que ses moments de silence. Vivement demain, le chemin n’attend plus que nous !
Kxxx : Bonjour, je m’appelle Kxxx, j’ai 17 ans. Je suis en France depuis 1 an et demi. Je remercie l’association Seuil pour l’aide qu’elle m’apporte dans mon parcours de vie. Je suis heureux d’être là et de découvrir plein de choses.
Aujourd’hui on a pris le train à Lille et on est passés par Lyon et plein de petits villages et paysages de montagne. Je remercie aussi mon accompagnateur et l’aide qu’il m’apporte. Je suis heureux d’être là au Puy-en-Velay.
Vendredi 6 juin : Le Puy-en-Velay / Bains
Cyprien : Levés à 6h/6h30 nous sommes allés à la messe d’envoi et de bénédiction des pèlerins à la cathédrale, puis nous avons pris la route directement à 08h00 sous un temps nuageux mais agréable.
La première montée n’a pas été évidente pour Kxxx avec quelques douleurs. Notre marche était assez silencieuse, interrompue par quelques échanges avec des pèlerins et un certain Alain, la quatre-vingtaine, marcheur des environs aux petits matins, qui nous a indiqué un sentier agréable pour atteindre Bains. Il nous a aussi indiqué comment soigner les ampoules, avec du plantain majeur en posant sa feuille entre la peau et la chaussette, le dessous de la feuille contre la peau. L’arrivée à Bains s’est faite vers 12h00 en ayant ponctué notre marche de pauses afin de prendre le temps. Kxxx a apprécié ces paysages qu’il est venu chercher et à pu prendre en photo grâce à son appareil.
Arrivé au gîte de la Maison jaune, Kxxx a beaucoup dormi, fatigué et peu enclin à faire des choses ensemble ou parler. Nous avons quand même fait les courses ensemble avec un autre pèlerin puis une petite balade dans le village que Kxxx trouve très beau, ce qui lui a permis de s’ouvrir un peu à nouveau.
Kxxx : On a quitté le Puy-en-Velay ce matin tôt. On a pris la route ! Avec un gros sac à dos ! Il y avait des nuages. On a rencontré beaucoup de personnes. La marche était un peu difficile car c’était la première journée. On est quand même arrivés à 12h00 au gîte la Maison jaune. Après je me suis endormi. Je suis fier d’avoir fait 15 km car je pensais pas faire 15 km avec un sac à dos.
Samedi 7 juin : Bains / Monistrol d’Allier
Cyprien : Nous sommes partis de Bains peu avant 9h00 et Kxxx marchait d’un bon pas, décidé et motivé. Nous avons admiré de beaux paysages ensemble et Kxxx a pris beaucoup de photos. Nous avons atteint Saint-Privat d’Allier vers 12h00 pour une pause gourmande à base de sardines, fromage et la découverte du saucisson pour Kxxx ! Il marchait vite et j’avais du mal à suivre surtout dans les montées. Je suis assez impressionné par sa capacité à avancer, à marcher et par sa détermination. Les descentes et particulièrement la dernière nous ont un peu achevés, mais le gîte « Le repos du pèlerin » porte fort heureusement bien son nom. Benjamin, l’hôtelier est aussi chanteur et guitariste pour ses hôtes. Demain Saugues nous attendra de l’autre côté d’une grosse montagne. Le repos est ce soir bien mérité !
Kxxx : On est partis de Bains à Monistrol, on s’est levés à 8h00, on a commencé le chemin. Le paysage était bien et on a passé de bons moments ensemble et j’étais très content. Je remercie Seuil de faire cette aventure. J’ai croisé des gens bien comme par exemple Alain le vieux d’hier. Il était bien et rigolo. J’ai perdu mon appareil photo aujourd’hui à côté d’une grotte et un monsieur me l’a retrouvé. Je le remercie car j’étais triste d’avoir perdu l’appareil. Après 10 km la journée a commencé à être un peu difficile à cause des descentes. Maintenant avec le repos je me sens bien. On a mangé avec des gens heureux.
Dimanche 8 juin : Monistrol d’Allier / Saugues
Cyprien : Après un petit-déjeuner à base de pois cassés-ail nous quittons le « Repos des pèlerins » pour ce qu’on pourrait appeler la « montée du pèlerin ». Il faut gravir 500 mètres de dénivelé sur moins de 4 km. La montée est difficile. Je suis Kxxx qui marche toujours rapidement, mais fait des pauses régulièrement pour ses genoux. Après cette côte, le chemin devient légèrement descendant et plus facile. La vue est magnifique et dégagée, ce qui met un grand sourire sur nos visages rougis par l’effort. Nous faisons halte chez Thierry qui propose un café gratuit et propose la coquille St Jacques que Kxxx ne manque pas d’apercevoir. Il en demande une pour orner son sac et s’ancrer dans cette nouvelle aventure, plus profondément. Quelques km plus loin, nous commençons à descendre plus franchement le plateau sur lequel nous étions tout en profitant d’une magnifique vue sur Saugues et ses environs. Nous nous arrêtons pour prendre une photo du spectacle que nous offre le vent sur des champs d’herbe au loin, créant des reflets pareils à ceux des vagues. Le spectacle est saisissant. Nous nous arrêtons pour casser la croûte un moment et faire quelques étirements des quadriceps. La descente jusqu’à Saugues est raide et nous casse les pattes mais nous arrivons à 14h30 où mon ami Gérard nous attend. Kxxx prépare une bonne recette de riz à la crème au curry, tout en profitant du saucisson que Gérard nous a acheté. Depuis 3 jours c’est la fête au village à Saugues, et suite à des rencontres sympathiques de quelques jeunes du village, nous sommes invités à la fête foraine pour taper du poing dans des punching balls. Kxxx pulvérise mon score. Il est d’une force ! Puis nous retournons chercher nos affaires chez Gérard pour aller planter la tente dans son champ qui ne se trouve pas loin de la fête foraine. La musique est forte, nous espérons qu’elle ne durera pas toute la nuit. C’est la première nuit de Kxxx sous la tente ! A sa demande, je lui ai lu quelques contes avec lesquels il s’est alors endormi. Fin d’une belle journée.
Kxxx : On s’est levés vers 8h00 et on a pris la grosse montée qui était très belle et le paysage en haut était très beau et montagneux. On a pris le café chez Thierry, on s’est assis et on a passé un bon moment ! Je lui ai acheté une coquille Saint-Jacques. Après ça descendait facilement et on est arrivés à Saugues vers 14h30. La dernière descente était très forte et j’ai eu mal aux genoux. Ensuite on est allés chez Gérard, on a bu le café et on a passé un bon moment. On a vu des gens super biens (Simon) et ils nous ont offert des jeux à la fête et des frites. Au jeu du punching ball mon meilleur score était de 910, je suis fier de moi. Ensuite on a monté les tentes pour dormir.
Lundi 9 juin – Saugues / Le Sauvage
Cyprien : Nuit horrible ! La musique a duré jusqu’à 3 h du matin et la nuit était très fraîche, trop pour nos sacs de couchage ; grosse erreur de débutant et vraiment pas top pour la nuit de Kxxx sous la tente ! On aura eu le mérite d’essayer mais c’était peut-être ambitieux et malchanceux. Le moral est bas et avec le mal aux genoux de Kxxx nous avons prévu de nous faire déposer par Gérard au Sauvage pour s’économiser. La journée chez Gérard est un peu longue mais le sourire éclatant de Kxxx revient lorsque nous arrivons au Sauvage ! Nous sommes ébahis par la beauté du lieu, ses 750 hectares de forêt et terres agricoles sur lesquels paissent Aubrac, Montbéliardes, Salers… La bâtisse est magnifique, le toit est en rénovation mais ça n’enlève rien au spectacle. Ce paysage nous donne l’occasion de nous retrouver avec Kxxx, de parler, de s’ouvrir, de faire quelques étirements et écrire sur le carnet. Kxxx semble se connecter à cette nature à perte de vue. Pour le dîner, nous nous attablons avec un trio mi-belge, mi bourguignon avec qui on partage la chambre, ainsi qu’un trio allemand. Avec Kxxx nous nous partageons cette Europe, il s’ouvre grâce à la gentillesse des franco-belges tandis que je baragouine quelques mots d’allemand et d’anglais. La doyenne du lieu nous compte en fin de repas l’histoire de cette ferme, lieu d’accueil depuis sa création au XIII ème siècle, ainsi qu’un peu de l’histoire du combat pour la reconnaissance du fermier agriculteur et du syndicat leur ayant permis de reprendre les exploitations agricoles du site. Nous avons ensuite pu admirer le coucher du soleil sur les cimes des arbres sur la montagne au loin. Spectacle d’autant plus beau que Kxxx le partageait avec Domi, 70 ans, avec qui il avait sympathisé. Après quelques coups de stylo sur le carnet nous signons encore la fin d’une belle journée.
Kxxx : On n'a pas marché aujourd'hui parce que j'avais mal aux genoux. Un ami de Cyprien (Gérard) nous a aidé. On a mangé chez lui et il nous a emmené au Sauvage en voiture.En arrivant j'ai ressenti la forêt, je me suis senti en paix. Dès que je vois la forêt je me sens courageux. Le soir on a mangé avec des gens sympas et très agréables. Je les ai trouvés agréables car ils ont discuté avec moi, ça m'a fait plaisir !On a vu le coucher du soleil sur le sommet des montagnes du Gévaudan avec une dame qui avait des lunettes rouges. Elle vient de Paris et elle a 70 ans ! J’ai passé un bon moment avec elle.
Mardi 10 juin – Le Sauvage / Saint-Alban de Limagnole
Kxxx : On est partis manger avec les gens pour le petit déjeuner. Après on a pris la route pour aller à La Roche. On est arrivés là-bas vers 11h mais la propriétaire nous a dit que c'est trop tôt et une femme très gentille nous a déposé à St Alban et nous a montré où dormir et on a discuté avec Sophie la gérante du bar-gîte. Elle nous a conseillé de voir la Scénovision sur l'histoire du village, sur la bête du Gévaudan et l'hôpital psychiatrique. J'ai trouvé ça intéressant.On a retrouvé Delphine sur la route et elle m'a aidé pour le genou car elle est ostéopathe. Elle est gentille. Ensuite on a bu le café au bar et on a parlé avec Sophie.J'ai cuisiné du riz et on a mangé.
Cyprien : Aujourd’hui nous avons prévu une petite marche de 5 km jusqu’à La Roche pour tester le genou. Ça va un peu mieux mais ce n’est pas encore ça. Finalement après quelques péripéties, nous arrivons à Saint-Alban de Limagnole pour viser pharmacie et médecin. Nous sommes accueillis par Sophie au Bar de l’Europe, qui nous reçoit avec gentillesse et générosité. Le moral de Kxxx fluctue en fonction de sa douleur au genou. Sophie nous invite à aller à la Scénovision de Saint-Alban qui retrace l’histoire de Saint-Alban. Cette activité nous plaît beaucoup et nous en ressortons avec une vision bien différente de Saint-Alban. A la sortie nous retrouvons Delphine avec qui nous avions logé à Bains et croisée à Saugues ! L’occasion d’échanger et elle se propose de regarder le genou de Kxxx en sa qualité d’ostéopathe. Cette séance semble redonner un peu de confiance à Kxxx, mais nous irons tout de même voir le médecin demain. Delphine, très gentiment, lui donne sa genouillère qui devrait l’aider. Demain elle fera sa dernière étape. Kxxx prépare un bon dîner tandis que nous échangeons avec Delphine sur de nombreux sujets passionnants ; l’occasion pour moi de partager des questionnements, inquiétudes… Encore une belle rencontre sur ce chemin ! La soirée s’ensuit avec Kxxx de quelques échanges et discussions fluctuant entre l’envie de repartir marcher dès le lendemain, de doutes sur le genou, de lui faire entendre la nécessité de prendre soin de son corps et conforter ses doutes sur ce que le chemin va lui apporter concrètement, chose non aisée pour un adolescent. Nous nous endormons au 3ème étage de ce lieu offrant une belle vue sur le clocher de l’église.
Mercredi 11 juin – repos à St Alban sur Limagnole
Cyprien : Rendez-vous obtenu chez la généraliste du coin. Selon elle pas de contre-indication, un peu d’anti-douleur, de la glace et ça devrait repartir ! Nous décidons de rester encore au repos aujourd’hui et de partir demain matin tôt. La journée est longue et les 35° ne motivent pas Kxxx à sortir. Après un échange sur les derniers mois de sa vie nous nous motivons pour quelques étirements en musique avant qu’il ne tombe à nouveau dans le sommeil de l’ennui de cette journée. Quelques courses, un sirop au bar et des pâtes bolognaises suffiront pour mettre fin à cette journée. Demain nous partirons tôt.
Kxxx : Ce matin, on est allés chez le médecin pour mon genou. Elle a dit que ça va mais elle nous a prescrit des médicaments pour la douleur. Ensuite on a bu le café aujourd'hui et on s'est reposés aujourd'hui. On a fait du sport et après on a refait des courses et on est allés boire un sirop au bar. Après on a discuté et j'ai écrit sur mon carnet. Cyprien a préparé à manger, fin de la journée.
Jeudi 12 juin – Saint-Alban sur Limagnole / Aumont Aubrac
Cyprien : Lever à 06h et départ à 7h du bar-gîte de Sophie qui nous a laissé un gentil mot de remerciement pour notre départ. Il fait à peine frais et on sent tout de suite que la journée va être chaude. Après avoir insisté, Kxxx met sa genouillère et nous partons tranquillement mais la douleur semble ne pas vouloir partir pour le moment et c’est un peu de découragement et de doute qui s’installent avec cette question qui revient depuis 2/3 jours : « Pourquoi je marche, qu’est-ce que je vais apprendre ? ». Ça me rappelle le temps de l’école où l’on nous enseignait sans que l’on comprenne à quoi cela servirait. La marche nous apprend des choses qui ne sont pas palpables et seule son expérience nous fait comprendre ce qu’elle nous apporte. Il faut du temps, comment expliquer cela à un adolescent ? Si je peux apporter quelques réponses, elles resteront cependant insuffisantes, pas assez concrètes. Nous prenons quelques distances sur le chemin, Kxxx marchant devant d’un bon pas malgré la douleur. Distance physique et relationnelle, la promiscuité apporte son petit lot de vexation et de susceptibilité et cela des deux côtés.Le chemin est magnifique et nous nous arrêtons pique-niquer sur le bord du chemin, à l’ombre, au vent et face aux belles Aubrac dans ce décor bucolique agrémenté du son des cigales. Nous repartons quelques heures plus tard et Kxxx part fort et vite devant bien qu’il n’ait pas voulu prendre les anti-inflammatoires et les anti-douleurs. J’ai peine à le suivre, on dirait qu’il n’a plus mal mais les quelques petits repos me laissent supposer le contraire. Nous arrivons rapidement à Aumont Aubrac où nous nous précipitons acheter une puf à Kxxx et retrouvons Eric que nous avions rencontré à Monistrol d’Allier. Kxxx me dit qu’il veut arrêter et en a marre. Il a mal au genou et la raison de sa rapidité était de vite arriver pour finir. La discussion est fermée, il a besoin de tranquillité ; nous attendons que le temps passe lorsque Isabelle nous salue. Isabelle est de Neufchâtel en Suisse, 74 ans, petite et peu épaisse, mais avec un regard, une douceur, une présence hors norme ! Elle est partie de chez elle le 1er mai. Je lui propose de s’asseoir un moment avec nous en lui demandant pourquoi elle marche. Ce qui lui permet de retourner la question à Kxxx qui retrouve un peu le sourire. Il est sensible à sa douceur. A cet instant je mise désormais sur le silence et la réflexion qui s’installe peut-être en Kxxx à la suite de ce petit échange intense avec Isabelle. La suite du chemin est entre ses mains. Laurence du Buron Saint-Jacques vient nous chercher pour passer la nuit dans son gîte qui est excentré du chemin. Elle prépare gentiment une boisson, le « bissau » que Kxxx connaît et apprécie. La soirée est mi-silencieuse, mi-animée par des échanges sur l’arrêt de la marche.
Kxxx : n’a pas écrit.
Vendredi 13 juin – Aumont Aubrac / Malbouzon
Cyprien : Le lendemain, l’humeur de mon cher Kxxx reste maussade. Mais là quelques mots de Laurence au départ nous mettent en route. Célestin, notre responsable de marche avec qui j’échange régulièrement, échange avec Kxxx sur les difficultés du moment, ce qui nous aide à continuer la marche. C’est une journée difficile par la chaleur et l’humeur. Kxxx me parle de difficultés depuis son arrivée sur le territoire et me fait part de son incompréhension des changements de ville, de foyer, etc. Il dit à juste titre que je ne me rends pas compte des difficultés et il a raison. Nous parlons assez sérieusement lors de nos pauses puis repartons marcher en silence. En arrivant à Malbouzon, je lui arrache un check d’arrivée et un sourire.Il a mérité un bon gueuleton au bistrot du village. Enfin il a réussi à téléphoner à son frère qu’il n’avait pas eu depuis plusieurs mois. Un nouvel homme renaît après cet appel. Nous échangeons sur l’intérêt de cette marche pour l’aider dans le futur, dans le monde de l’emploi car il a hâte de travailler. Nos échanges sont constructifs et la confiance revient progressivement. Nous dînons avec trois femmes agréables puis allons nous coucher pour nous lever un peu tôt.
Kxxx : n’a pas écrit.
Samedi 14 juin - Malbouzon / Nasbinals
Cyprien : Départ à 7h30 de Malbouzon, Kxxx a très rapidement mal au genou. Temps de chauffe très certainement. Notre marche sera silencieuse du début à la fin à l’exception de quelques adjectifs sur le paysage, malgré les efforts de distraction. Nous arrivons vers 11h30 à Nasbinals où nous retrouvons Isabelle et une américaine avec qui je discute, tandis que Kxxx fait la sieste. Nous attendons l’ouverture du gîte communal à 13h. Après une bonne douche et un peu de repos, nous allons prendre un café et la discussion s’ouvre, agréablement. Nous échangeons sur l’historique de ses deux dernières années et sur ses douleurs au genou. De retour au gîte nous rencontrons d’autres pèlerins et nous perdons à nouveau cette connexion que nous avions tous les deux. Un peu plus tard nous argumentons tous les deux pour savoir qui se lèvera le premier pour aller boire un sirop. Il gagne l’argumentation et nous allons finalement au restaurant où il goûte l’aligot pour la première fois. Nous retrouvons un peu de légèreté ! Au retour Kxxx veut écrire sur son carnet et en se relisant nous rions tous les deux ensembles de l’aspect extrêmement factuel de ses récits. Nous partageons un bon moment et une bonne rigolade avant d’aller nous coucher. Feliz Nasbinals !
Kxxx : On a bougé à 7h30 de Malbouzon. Après on a fait 15 km jusqu’à Nasbinals. On a vu le portail des Monts d’Aubrac. Ce portail ressemble à un rond en pierre avec des écritures dessus. On a retrouvé des vieux amis sur la route et on a retrouvé Isabelle et on s’est fait de nouveaux amis. Après j’ai préparé de la crème fraîche avec du riz et du poulet. On s’est baladés en ville, on a bu un sirop et on a discuté de mon genou, de ma vie. On est allés au restaurant et j’ai découvert l’aligot, c’est délicieux.
Dimanche 15 juin – Nasbinals – Saint-Chély d’Aubrac
Cyprien : Après un petit déj’ au café du coin avec Robert, un pèlerin suisse, nous prenons la route silencieusement. Les paysages changent un peu car nous descendons et apercevons toutes les plantes en fleur. Les quelques gouttes et de tonnerre au loin n’auront pas raison de nous et nous arrivons à Saint-Chély d’Aubrac vers 14h30 où Eric nous attend dans son gîte l’Oasis. Il a déjà fait plusieurs marches avec Seuil et c’est agréable de pouvoir échanger un peu avec lui. Kxx est resté très fermé toute la matinée et ce début d’après-midi. Il revient vers moi pour que je lui achète des cigarettes à crédit mais nous avions convenu que non, ce qui nous a fait à la fois ne pas être d’accord mais parler. Une balade un peu plus tard nous permettra de rire un peu, d’échanger et il fait sa lessive à la main pour la première fois suite à notre discussion. C’est chouette de voir certains échanges porter leurs fruits. On avance à petit pas mais on avance. Nous dînons avec Eric et 5 femmes qui tentent d’échanger un peu avec Kxxx qui reste timide et réservé. Le temps passe vite à force de discuter autour d’une tisane. Demain nous essaierons à nouveau de voir un médecin.
Lundi 16 juin - Saint-Chély d'Aubrac / Saint-Côme d'Olt
Cyprien : Lever difficile ce matin pour Kxxx qui ne voulait pas marcher. Finalement Eric nous emmène à la Casa de Annie à Saint-Côme d'Olt où nous aurons rendez-vous plus tard chez le médecin pour le genou de Kxxx. Après une longue discussion houleuse avec Kxxx, nous nous réconcilions autour d'une bonne pizza en passant un très bon moment. Après une baignade dans la rivière et un petit jeu de devinettes qui nous fait bien rire, le médecin nous rassure sur l'état du genou de Kxxx. Nous continuons d'échanger à notre retour dans le jardin d'Annie puis dînons tous ensemble avec Annie, Bruno et deux autres pèlerins. La soirée est très agréable et Annie d'une grande douceur avec Kxxx. Nous finissons la journée tous les deux en écrivant ces lignes.
Kxxx : Ce matin je voulais pas me lever mais Cyprien m'a fait une farce. J'ai bu un café et j'ai discuté avec Eric. Il nous a accompagnés à Saint-Côme chez Annie. On s'est bien pris la tête avec Cyprien mais ça s'est arrangé après. On est allés à la rivière et Cyprien s'est baigné et on a joué aux devinettes. On a passé une très bonne soirée chez Annie, on a discuté et on a bien mangé !
Mardi 17 juin - Saint-Côme d'Olt / Espalion
Cyprien : Annie et Bruno nous ont préparé des pancakes ce matin ! Annie a confectionné une coquille Saint-Jacques personnalisée pour Kxxx et nous sommes partis avec la magnifique énergie et générosité qu’ils nous ont laissées ! Pour la première fois depuis le début du chemin, nous avons bien parlé en marchant et continué pendant une pause pour enfin nous poser au bord du Lot plus tranquillement, à écouter le coulis de l’eau devant un paysage paradisiaque. Le reprise de la route est compliquée avec la douleur au genou et parallèlement Kxxx se ferme jusqu’à vouloir arrêter la marche, mais arrivée au gîte. Il faut longuement discuter pour se calmer mais les échanges ne reprendront pas vraiment malgré une soirée sympathique avec les autres pèlerins du gîte. Nos hôtes nous ont installés dehors dans la rue et l’ambiance était aux plaisanteries et aux rires.
Kxxx : n’a pas écrit
Mercredi 18 juin - Espalion / Estaing
Cyprien : Lever à 4h et départ à 4h15. Kxxx souhaitait tenter une marche de nuit. Nous partons avec les lumières de la ville puis avec nos frontales. Une bonne montée nous essouffle un peu pour finir le souffle coupé par la vue sur la brume suspendue au-dessus du Lot et les couleurs flamboyantes à l’horizon sur ces monts qui s’étendent devant nous. Le lever du soleil achève cette apnée pour nous réchauffer doucement ! Le fond de l’air est frais ! Nous arrivons à Estaing vers 9h00 et après quelques vifs échanges, nous prenons un café et apercevons Sylvie et Joëlle avec qui nous étions deux jours plus tôt chez Eric. Elles nous offrent très gentiment de faire avec elles la visite guidée du château de la famille Giscard d’Estaing, intéressante et aussi tout à l’honneur de l’ancien Président de la République… Nous nous posons pour nous faire à manger sur le bord de la route en réfléchissant à aller plus loin. Finalement nous restons à Estaing où nous attrapons les dernières places chez Philippe. Il est très accueillant et a passé de nombreuses années en Afrique dont la Guinée, l’occasion de discuter avec Kxxx, le feeling passe bien ! Après le dîner, Kxxx discute avec un pèlerin un bon moment. Je suis content qu’il s’ouvre ainsi, il y a vraiment de belles rencontres sur le chemin. Nous terminons avec un petit son et lumière sur le château depuis le pont.
Jeudi 19 juin – Estaing / Fonteilles
Cyprien : Après un bon petit-déjeuner et des anecdotes croustillantes de Philippe, nous partons en direction d’une belle côte, belle mais surtout difficile ! Kxxx est vaillant et avec des pauses nous arrivons au bout de nos peines à Fonteilles, au camping/gîte de Léo. La terrasse ombragée nous permet de bien nous reposer. L’occasion de déjeuner, toujours ce bon vieux riz poulet curry et de se reposer en écoutant un peu de musique. Nous discutons, avec de nouveaux pèlerins, de cette côte et de cette chaleur qui nous ont fait bien suer ! Avec Kxxx nous appelons Célestin, notre responsable de marche et Kxxx lui fait part de sa douleur au genou trop importante pour continuer malgré les efforts, les anti-inflammatoires, etc. Nous convenons d’arrêter la marche mais Célestin nous propose de nous arrêter au « Village de François » à côté de Toulouse pour se poser et réfléchir à la suite ; il s’agit de continuer l’aventure mais autrement. Les ressources sont nombreuses chez Seuil !!! La nuit porte conseil ! En attendant nous passons une bonne soirée avec Léo qui nous raconte quelques histoires sur les pèlerins originaux et un peu de la vie du village.
Vendredi 20 juin – Fonteilles / Espalion
Cyprien : Kxxx a décidé d’aller au village de François. Nous tapons dans la main et Léo nous dépose à Espalion où il devait se rendre. Les planètes s’alignent. Retour à Espalion chez Florian qui nous avait accueilli il y a 3 jours avec l’aide de Fabienne. Encore une journée de transition avant de pouvoir atteindre Rodez le lendemain, puis Toulouse et enfin L’Isle-Jourdain pour aller au village. Mais l’ambiance et la motivation redescendent un peu et malgré un peu de repos au bord du Lot, à l’ombre d’un Aulne, Kxxx semble se refermer. Cela nous amène à un échange un peu compliqué. Il semble vouloir revenir sur sa décision… Finalement après un peu de repos et d’ennui et quelques propositions, nous finissons par aller nous balader vers 22h et nous échangeons sur notre dispute et les bienfaits que peut lui apporter le village et notre relation. Il est à l’écoute et approuve. Il reconnaît qu’il se sent mieux depuis que nous marchons ou du moins depuis que nous sommes en chemin. Nous finissons cette discussion devant la demi-finale du Top 14 Toulouse/Bayonne, une grande déception pour Bayonne qui n’aura pas bien joué et l’occasion pour Kxxx de me charrier un peu.
Samedi 21 juin – Espalion / Village de François (Lisle Jourdain)
Cyprien : Petit déj’ sympathique avec les autres pèlerins, puis après avoir aidé Fabienne au ménage, Kxxx reçoit enfin l’appel d’un de ses frères. Ils restent longtemps au téléphone, je suis content pour lui. Gentiment Fabienne nous a proposé de nous déposer à la gare de Rodez. Nous voyons les paysages de l’Aveyron défiler devant nous. Je suis triste de les quitter, mais heureux que l’aventure continue malgré tout et d’une manière un peu inconnue. Nous ne connaissons pas ce village, sinon de nom. Déposés à la gare ce sont à nouveau des discussions sur le pourquoi nous allons à ce village et l’envie de rentrer à Dunkerque pour retrouver son téléphone. Célestin lui réexplique les choses par téléphone car je n’ai plus les mots pour me faire entendre. Un kebab fait redescendre la tension mais le long trajet jusqu’à Lisle Jourdain restera silencieux et pesant. Nathalie, du village, est venue nous chercher en voiture après que nous ayons fait les courses pour quelques jours car le village se trouve à une vingtaine de kilomètres et il ne s’y trouve pas de commerces. Pour un caprice de cigarettes, Kxxx s’énerve et prend son sac pour partir. Je suis un peu décontenancé et reste dans l’incompréhension d’une réaction aussi excessive bien que je n’en sois pas surpris ; c’est l’impulsivité de l’adolescence. Nous retrouvons Kxxx une 1/2 heure plus tard à la gare et nous prenons le temps de discuter. Il m’exprime certaines difficultés qui me font mieux comprendre sa réaction et je lui propose de remonter avec nous. Il accepte et nous arrivons enfin au village de François. Reine et Olivier nous accueillent et nous font un petit tour du propriétaire. Nous serons logés dans un studio donnant directement sur le cloître. Le village de François est en fait une ancienne abbaye, l’abbaye Notre-Dame du Désert. S’engagent à nouveau des discussions sur pourquoi nous sommes ici. Kxxx est pressé de travailler, reprendre une formation. Mais je lui explique qu’ici nous pouvons prendre le temps de nous poser, y réfléchir et l’aider pour chercher cette formation, tout en découvrant le fonctionnement de ce village. Approcher de nouvelles choses, participer, rencontrer, s’ouvrir… Pas facile de comprendre cela à 17 ans ! Nous nous couchons, il est tard.
Dimanche 22 juin : Village de François
Cyprien : Une journée calme au village qu'est le dimanche ! C’est un peu la journée famille/repos. K n’est pas motivé pour sortir du studio et préfère rester dormir malgré toutes les propositions d’activités que je lui propose (écrire, lire, se balader, rencontrer les gens, proposer de l’aide, aller au café…). En discutant, il me confie qu’il est empathique. Il a le sentiment de voir quand les gens sont tristes et ça le rend triste, il voudrait les aider. Alors je lui explique que pour aider les gens, il faut d’abord entrer en relation avec eux, mais il me confie avoir peur (comme nous tous, somme toute !). Et je lui propose à l’initiative d’un conseil qui m’a été donné, un mini exercice de théâtre pour aborder les gens. L’exercice ne durera tout de même pas longtemps, disons que c’est toujours ça de pris. Un peu plus tard, c’est à nouveau des discussions sur ses incompréhensions à être ici et comme la discussion ensemble mène à rien, je le laisse y réfléchir seul et en profite pour continuer mon livre. Quelques rencontres permettent de nous fixer quelques objectifs pour la journée de demain.
En fin de journée, K sort enfin et nous allons taper quelques balles au foot puis ping pong auquel il n’avait jamais joué et prend du plaisir avec d'autres personnes du village. Nous finissons la soirée devant Harry Potter .4 diffusé au village dans la bibliothèque qui nous ferait croire à une mise en abîme.
Lundi 23 juin : Village de François
Cyprien : Réveil compliqué un peu tardif et qui revient à nouveau sur des questionnements dans une atmosphère toujours aussi tendue, sans vouloir participer à aucune activité que je lui propose. Je décide de le laisser s’embêter seul aujourd’hui et de ne plus rien lui proposer tout en veillant au grain en espérant que cela provoque une réaction.
Je désherbe dans la cour, lis, écris un peu, discute. Yann, nouvel arrivant de la semaine précédente, me propose d’aller chercher K. Nous y allons et il finit par céder pour un coca, ce sera sa seule sortie de la journée.
Le soir en se couchant, K me dit qu’il n’en peut plus de ne rien faire et de rester enfermé. Je lui rappelle que cela dépend de lui et que je suis là pour l’aider à ce qu’il me demande. Nous nous couchons en espérant tous deux, j’imagine, un meilleur lendemain.
Mardi 24 juin : Village de François
Cyprien : Je suis allé courir ce matin tôt, transpiré un peu d’un effort physique. J’attends le réveil de K en lisant mon bouquin. Pas de miracle au réveil mais après un vif échange et une tentative d’appel à son frère, il entend enfin qui je suis là pour l’aider dans la rédaction d’une lettre de motivation à travailler. Nous prenons le temps et finissons par écrire une lettre sur mon téléphone (qu’il recopiera plus tard) et nous allons, avant qu’il ne fasse pas trop chaud, planter quelques œillets d’Inde.
Le reste de la journée est assez calme d'autant plus avec cette chaleur. Vivien nous emmène gentiment en voiture pour acheter des cigarettes, puis nous nous posons avec Hermann, Yan, Luca et quelques autres à l'ombre d’un grand arbre. Ils nous ont invités à dîner dans leur colocation et nous y avons passé un bon moment. Après le repas, K me parle longuement avec Catherine qui lui porte une oreille attentive et inversement. Nous en parlons le soir en nous couchant, K me semble apaisé.
Mercredi 25 juin : Village de François
Cyprien : Rien de nouveau sous ce soleil accablant, la canicule n’aide pas à la motivation et je dois dire qu’aujourd’hui, je perds un peu de ma motivation me sentant impuissant face à la souffrance de K de se sentir un peu coincé ici.
Nous attendons de rentrer dans le Nord, mais il faut pour cela une structure d’accueil pour K, ce qui n’est pas chose aisée. Nos relations sont compliquées car c’est un peu l’incompréhension vis à vis d’un système qu’on ne connaît ni K ni moi.
K a pu appeler son grand frère quand même aujourd’hui. De mon côté, j’ai tondu la pelouse, rien de bien excitant non plus mais pas désagréable ! Des habitants du village me demandent souvent comment va K et certains discutent un peu avec lui.
Jeudi 26 juin : Le Village de François
Cyprien : K semble vraiment ne pas pouvoir s’adapter à ce lieu où il n’y a personne de son âge et est trop isolé du monde extérieur. Je lui propose que nous passions la journée de demain à Toulouse pour se changer les idées, faire autre chose, changer d’air. William nous propose un petit foot à trois ce qui fait passer un peu le temps, redonne le sourire. Patrick lui apprend à jouer à la pétanque. Les habitants sont chouettes avec lui, ils essaient, ça fait du bien, pour nous deux.
Vendredi 27 juin : Toulouse
Cyprien : Nous sommes amenés à Toulouse par Larry et Emmanuelle. Le matin nous prenons un petit déjeuner sympa dans Toulouse, nous nous baladons, K apprécie cette ville, il la trouve belle. On s’offre un ciné “Le grand déplacement”, une comédie originale, dira-t-on.
K aime se balader, s’asseoir sur un banc, regarder ce qui personnellement me rend un peu fou. Nous discutons tout de même un peu de sa famille, de son “voyage”, pour venir en France et j’en comprends mieux la difficulté, les épreuves traversées.
Cependant, cette journée m’est difficile à apprécier par son côté léthargique, silencieux, que je ressens comme mortifère à force. Le soleil est trop accablant pour K, ma proposition de bowling ou d’escalade n’a pas prise et je n’ai pas insisté par manque de motivation.
De retour à l’abbaye et suite à quelques échanges que j’ai pu avoir, on me fait remarquer que je n’ai pas exprimé suffisamment à K que cette tension me pèse et que j’en souffre aussi. Si je me sens mal, il est fort probable qu’il le soit tout autant si ce n’est beaucoup, beaucoup plus ! Nous en parlons et cela semble nous faire du bien.
K me confie qu’il est prêt à retenter la marche malgré son genou (en ce moment, ça va beaucoup mieux) plutôt que de rester ici. Ce lieu est pour lui mortifère. Nous décidons d’y réfléchir la nuit pour prendre une décision demain.
Plus tard dans la soirée, K réussit à joindre son père qu’il n’a pas eu au téléphone depuis très très très longtemps…
Ensuite, nous avons eu un beau moment d’échange lors duquel il a pu me confier des choses plus personnelles. Décidément, cette marche Seuil ne cesse dans ses rebondissements et K me surprendra toujours, positivement ! Nous avançons, chaque jour un peu plus, qu’importe que l’on ait l’impression de parfois reculer puisque parfois nous faisons de grands pas. La confiance renaît.
Samedi 28 juin
Cyprien : K dort beaucoup ce matin et c’est la fête du village aujourd’hui. Mais de mon côté, je commence à regarder la logistique pour partir demain, où, comment, sur quel chemin le plus simple pour faire de petites étapes, serait de partir depuis Figeac. Un train peut facilement nous y emmener depuis Toulouse.
Dans le village, c’est beaucoup d’animation et d'agitation, chasse au trésor, atelier radio, grand déjeuner commun où K participe aussi, puis des concours de tout genre pour gagner le droit d’être tiré au sort à la tombola du soir qui s’organise autour d’un blog. Puis nous regardons pour certains la finale du Top 14 tandis que K discute avec son amie Katherine.
Dimanche 29 juin : Village de François
Cyprien : Finalement nous ne partons pas aujourd’hui. K me dit se sentir mal (mal au ventre, mal à la tête), le voyage avec les 40°c ne paraît pas la meilleure option. Nous patienterons jusqu’à demain pour voir son état.
Lundi 30 juin : Village de François ---> Figeac
Cyprien : Nous partons un peu tôt ce matin direction la gare de Pibrac où Hermine nous emmène direction Toulouse en halte pour Figeac. La chaleur est aujourd’hui accablante, on avoisine les 40°c.
Après quelques cafés, nous nous posons au bord du canal sous les arbres et nous discutons. K est plein de réflexions sur les grands problèmes du monde, lui, il interdirait la consommation d’alcool. Voir autant de SDF et de gens en état d’ébriété dans les rues le choque. Il y voit, avec ses mots, la déconnexion entre l’homme et la nature.
Il voit dans les produits de consommation ce qui nous tue à petit feu, nous rend malheureux.
Je lui parle de la modération de la consommation mais nous ne sommes pas d’accord, il est plus drastique que moi et perçoit les faiblesses et vicissitudes des humains. C’est agréable de discuter.
Puis nous sautons dans le train en direction de Figeac.
Le gîte de Gua est très agréable, un jardin de ville avec de nombreuses plantes et herbes aromatiques.
Frédérique et son fils sont très accueillants et nous servent un dîner fait maison riche de diversités.
Avec K nous allons marcher et nous parlons, c’est agréable. Nous parlons encore des problèmes du monde qui le préoccupent beaucoup. Il me parle de trouver la paix, que les gens doivent travailler à trouver la paix, à chercher à mieux comprendre le monde, son fonctionnement, la nature.
Je lui demande ce que sait pour lui de trouver la paix : “c’est d’être soi-même et ne pas avoir peur de dire ce qu’on pense”. K me fait un souvenir et redécouvre qu’à 17 ans on est aussi plein de bon sens, qu’on a déjà de l’expérience de la vie, qu’on réfléchit, qu’on cherche, qu’on philosophe.
Nous passons un moment heureux, joyeux puis nous allons nous coucher dans ce dortoir où l’on entend déjà un peu ronfler.
Mardi 1er juillet : Figeac – Faycelles
K : On s'est levés vers 7h, on a pris le petit dej avec d'autres pèlerins, on a préparé nos affaires pour partir dans le village de Faycelles. on a marché en plein soleil sur la route, c'était pas génial à cause de la descente et de la chaleur, ça casse la tête ça !
On a vu des chevaux avec leurs poulains couchés dans l'herbe. On a fait une pause de presque 2h et on est arrivé à 14h. On a attendu l'ouverture du gîte à 17h30, c'était trop long.
J'ai appris à Cyprien un jeu de cartes. On a mangé des lasagnes et on s'est couchés !
Cyprien : Le lever prévu à 6h s’est transformé à 7h pour K. Il n’a pas dormi à cause des ronflements ! Je dois dire que si j’ai réussi à dormir, j’ai gardé une petite dent contre ce basque espagnol qui dormait sous mon lit superposé, mais aussi avoir pu pratiquer un peu de basque avec lui la veille pouvaient bien le pardonner du boucan fait ce matin à 5h. Nous nous mettons en route vers 8h et les paysages sont bien différents de ce que nous avions vu précédemment. Notre téléportation se voit même dans la végétation. La douleur au genou semble revenue, simple douleur après une semaine de repos ou persistance, nous verrons dans les prochains jours.
L’étape du jour sera de 7,5 km avec une grosse pause à l’ombre des arbres. Comme dit souvent K, il faut planter des arbres partout ! Cette chaleur lui donne mille fois raisons.
Nous arrivons vers 14h au bar-gîte qui n’ouvre qu'à 17h30 mais nous pouvons nous abriter du soleil sous le préau de cette terrasse.
Nous patientons et K m’apprend un jeu de cartes que je ne connaissais pas. Ce moment est joyeux et je me sens bien de vivre ces petites choses ensemble. Apprendre l’un de l’autre est riche. La soirée continue tranquillement, toujours avec une petite balade digestive avant de se coucher, parler de la vie et dormir.
Mercredi 2 juillet : Faycelles – Figeac
K : Aujourd'hui on s'est levés à 7h, j'avais déjà mal au genou hier et ce matin ça n'allait pas mieux.
On a bu un café et un chocolat et on a discuté ; on s'est dit qu'on arrêtait la marche et allait faire les examens pour le genou. On a un RDV le 10 juillet à Douai pour l'examen.
Après la discussion, on a fait du stop pour retourner à Figeac.
On a visité le centre historique de Figeac, mangé un kebab et après on s'est posés devant le Célé. On est allés au cinéma, mais je n'ai pas aimé le film, et après on est retournés au gîte chez Frédérique et Cheyenne.
Cyprien : Trop mal au genou ce matin, même après repos, nous décidons d’arrêter définitivement la marche pour passer l’IRM dans une grosse semaine à Douai où Célestin nous a pris un rendez-vous. Nous rentrons à Figeac en stop et posons nos sacs dans le gîte de la veille. Nous visitons un peu la ville puis allons au cinéma mais K n’apprécie pas tellement ce film de science-fiction “Anostherente” qui était le seul à l’affiche à ce moment-là. Le soir, nous passons un bon moment en ville à observer, se balader, décrire un tableau et la vie imaginaire que K voit à l’intérieur. C’est encore un beau moment et je sens une certaine complicité entre nous, ça fait bientôt un mois que nous vivons ensemble.
Jeudi 3 juillet : Figeac ---> Brive
Cyprien : départ en bus pour Brive depuis Figeac où nous avons pris un petit déjeuner en ville et joué aux cartes. Après avoir été déposés, nous découvrons la ville, déjeunons asiatique, puis nous allons au cinéma voir F1, le nouveau blockbuster de Brad Pitt. Nous apprécions beaucoup le film et passons un bon moment, mais un peu long : 3h en salle.
Nous dînons japonais pour changer ! et passons un agréable moment à discuter. K me confie ses inquiétudes par rapport à la guerre, la guerre d’Ukraine, d’Israël, qui sont présentes. On se couche après une petite dispute pour éteindre la télé et se coucher.
Vendredi 4 juillet : Brive ---> Paris
K : On est partis de Brive à Paris en train. On a joué aux cartes dans le train. On a passé 4h dans le train.
En arrivant à Paris vers 12h30, on a pris le métro et on est allés chez Marc, un ami de Cyprien.
On est allés dans un restaurant Italien tous les 3 et il nous a offert le repas.
Ensuite on s'est baladés au bord de la Seine et on est allés voir Notre Dame.
On est allés dans un restaurant africain et on est allés faire un tour avec Marc dans son quartier.
Cyprien : Au réveil, toujours cette rancune de la veille, mais elle se dissipe vite après le petit déjeuner. Ce qui, il y a deux semaines, pouvait durer une demi-journée, voire une journée entière, ne dure plus si longtemps. C’est agréable de se voir tous les deux progresser. Et je faisais la remarque hier à K qu’il est plus à l'aise, plus ouvert et qu’il doit être fier de progresser. L’évolution est très notable !
Nous prenons le train à 8h direct ---> Paris. Nous allons chez mon ami Marc qui a accepté de nous héberger dans le 10ème arrondissement. Il nous invite dans un petit restaurant bobo italien fort sympathique. Marc questionne beaucoup K et je suis heureux de le voir ouvert, à l’aise, discutant !
K et moi allons ensuite nous balader jusqu’à la Seine et nous nous posons sur les quais et regardons les bateaux-mouches passer, puis nous poussons jusqu’à Notre Dame avant de rentrer. K suggère un restaurant africain, nous en avions parlé il y a quelque temps, c’est l’occasion en étant à Paris. Nous y allons avec Marc. Il n’y a pas à dire, c’est vraiment bien différent, j’apprécie mais impossible de finir mon assiette de manioc, je ne savais pas que c’était aussi nourrissant. K et Marc se moquent de moi. Nous rions bien pendant cette soirée, le feeling passe bien entre eux deux. Petite balade digestive obligée avant d’entamer un peu tard une bonne nuit de sommeil.
Samedi 5 juillet : Paris
Cyprien : Levés à 10h, nous, enfin surtout, j’avais besoin de dormir.
Direction le Muséum d’Histoire Naturelle pour sa section paléontologique ; nous voulons voir des dinosaures. Après quelques froissements matinaux quasi habituels, nous arrivons au musée, silencieux et extraordinairement K semble fasciné par tous ces squelettes au rendez-de-chaussée où sont exposés ceux de l’anatomie comparée puis nous nous attardons à l’étage où les squelettes, pour certains entièrement en résine, de dinosaures impressionnants nous surplombent de plusieurs mètres de haut. Puis nous rentrons en marchant, l’expérience du métro n’ayant pas été concluante pour K, ça lui a donné mal à la tête. Petits tacos mexicains sur le retour, puis une bonne sieste l’après-midi après ces efforts considérables. Il y a aussi, je crois des deux côtés, un peu de lassitude. Après un long débat sur le fait qu’il n’ait plus de cigarettes alors que le paquet devait durer encore deux jours, nous sortons, achetons, fumons puis discutons un bon moment agréablement, abordant un peu quelques sujets familiaux et son parcours pour arriver en France. Un peu tard, nous décidons d'aller dîner indien et rentrons nous coucher en faisant quelques détours en déambulant. Puis nous discutons un peu avec Mac qui venait de rentrer, ça fait du bien pendant cette période de trouver un ami.
Dimanche 6 juillet : Paris – Douai
Cyprien : Petite balade en direction de la Tour Eiffel mais à pied et sous la pluie et le temps rafraîchit, nous faisons demi-tour après un bon chocolat. En rentrant, nous entamons quelques parties de cartes avec Marc qui à notre grand regret nous bat à plate couture ! Il est l’heure de déjeuner puis d’attraper notre train pour Douai. Nous aurons passé un très bon moment à Paris, notamment grâce à l’accueil de Marc qui restera, je pense, dans la mémoire de K. Il a beaucoup apprécié Paris, mais me confie qu’en fait il ne s’y verrait pas vivre, il me reparle souvent des villages que nous avons traversés ensemble sur le camino et me dit qu’on y retournera ensemble l’été prochain ! A Douai, nous récupérons un Airbnb bien douillet que Célestin a réservé et nous nous posons un peu en nous délectant de la télé qui lui a tant manqué.
Lundi 7 juillet : Douai
Cyprien : Célestin est passé ce matin, nous avons pu discuter pendant que K dormait encore, ça faisait du bien de parler de cette expérience. Puis K a récupéré son téléphone avec la règle de l’utiliser avec modération.
Le reste de la journée a été assez tranquille, petite balade dans Douai, repas et fête foraine le soir où nous avons fait trembler les machines à sous.
Puis nous avons regardé Gladiator
Mardi 8 juillet : Douai
Cyprien : Lever un peu difficile pour K, mais j’ai pu prendre le temps d’écrire, de faire décanter quelques réflexions.
Célestin est venu nous chercher après le déjeuner pour une petite balade au Parc de Rieulay avec un binôme de filles S et Maria qui partent demain au Puy. Maria a déjà fait un départ cet hiver et s’est arrêtée à peu près au même endroit que nous. Nous avons pu discuter un peu de nos expériences réciproques. C’est enrichissant et ça fait du bien. On a besoin de partager ce qu’on a vécu avec des gens qui ont vécu la même chose, c’est presque indispensable !
Au retour, nous avons passé un bon moment à cuisiner un riz poulet curry et K m’a félicité parce que j’avais bien appris de lui.
Et le point magique de la journée, c’est d’être allés au tabac pour acheter un paquet de cigarettes et d’entendre naturellement dans la bouche de K avec assurance “bonjour, un paquet de Camel long s’il vous plaît”. Je me bats avec lui pour lui montrer l’importance de ces petites choses, le féliciter et l‘entendre dire que ”oui, c’est plus agréable d’être agréable avec les gens”. Voilà qui finit de combler ma journée !
L'Etat finance cette marche à hauteur de 80 %.
Le reste est financé par vos dons
(Ces dons ne constituent pas de l'argent de poche supplémentaire pour le binôme
mais permettent réellement de financer leur marche)
____________________________________
« Pour des raisons de confidentialité, les commentaires mentionnant des informations personnelles concernant les jeunes (prénom, photos, etc…) seront supprimés. Merci d’anonymiser vos commentaires ! »

Commentaires