Marche de Enzxxx
- pierresauge
- 20 juin
- 59 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 sept.
Marche de Enzxxx accompagné par Steven
Mercredi 18 juin – Arrivée au Puy-en-Velay
Steven : Le 18 juin il s’engage dans la résistance de sa propre existence. C’est au fil des heures qu’il laisse apercevoir un sourire puis plusieurs sur son visage. Aujourd’hui il a décidé d’y croire, de faire équipe pour mener ce voyage. Il cache difficilement ses peurs et la communication restera sa plus fidèle alliée. C’est un vivant, qui fait de la vie un défi ou même plusieurs… Il faudra faire des choix, parfois apprendre à renoncer pour mieux y arriver. Petit à petit, il se laisse charmer par cette nature qui ne lui est pas familière.Cette première journée vient alors briser un quotidien, qu’il peut d’ores et déjà savourer comme une victoire !
Enxxx : Le top, sympathique, bon chalet, bon mood. Très bon accueil. Stev’ un peu chiant. Je rigole ! Trop sympa.
Jeudi 19 juin – Le Puy-en-Velay
Steven : Les TN laissent place aujourd’hui à de pratiques chaussures de randonnée. Le voilà équipé et quel beau randonneur il est. Il ne manque pas de motivation pour aller tester son sac sur les sentiers des alentours, sous un soleil de plomb. Il veille sans relâche à son équipier avec qui il compte bien mener la danse. Les envies ne manquent pas, les projections non plus. Veut-il s’assurer que ce séjour a une fin ? Il apprendra sûrement la patience, tout comme moi. Notre budget semble le fasciner, mais peut-être car c’est la seule chose qu’il maîtrise aujourd’hui. Il perçoit de plus en plus cette inconnue qui est demain. Elle lui fait peur, l’éloignement pèse mais s’allège aussi car il parvient enfin à la nommer. Il doute de lui et montre pour autant un courage et une détermination admirable.
Enxxx : Très très fatigué. CLC de pas avoir mon téléphone. Ma mère me manque. Mon poto me manque. Après tranquille. Je persiste "tarpin". Fatigué mais ça va le faire.
Vendredi 20 juin – Le Puy-en-Velay
Steven : Aujourd’hui il sera plus difficile de se mettre en mouvement. Malgré des repos salvateurs, il se sent fatigué, ses jambes sont lourdes. Il traîne des pieds à l’approche des tâches du quotidien qu’il exécute très bien pour autant. Il rigole, il sourit, il parle, il contemple. « Un pas en arrière, deux pas en avant ». Plus de kilomètres parcourus aujourd’hui, plus de défis réalisés, plus de responsabilités endossées qui lui permettent de se sentir acteur du projet. Finalement peut-être que pour lui, accepter l’idée, simplement de marcher, serait « se soumettre » à cette longue aventure qui nous attend. Accepter c’est aussi renoncer à un passé, c’est faire le deuil de certaines habitudes. Mais quand je le regarde, il ne fait qu’avancer. Je suis admiratif.
Enxxx : Toujours fatigué, on a marché longtemps. Mal aux jambes, aux pieds, mal au crâne, la journée longue. Mais on est toujours là. Dédicace au 92
Samedi 21 juin – Le Puy-en-Velay
Steven : Le grand jour se rapproche et il nous faut quitter notre petit havre de paix pour rejoindre le Puy-en-Velay, cette ville où tout commence, ou presque. Ces lieux sont puissants et j’ai l’intime conviction qu’il n’y est pas insensible bien au contraire. Au bureau des pèlerins, il prend plaisir à narrer son stage d’avant marche, à partager le défi qui est le sien. Je prends plaisir à le voir se prêter au jeu de la rencontre. Son ouverture aux autres lui ouvrira sans nul doute de précieux bénéfices. Il apprendra peut-être qui il est vraiment. Malgré l’épreuve que représente ce séjour, je crois qu’il a trouvé dans la spiritualité du chemin, quelque chose à quoi s’accrocher ! C’est si important pour vivre. Je me demande d’ailleurs s’il ne s’attache pas à son carnet, tant ses souvenirs seront précieux. Aujourd’hui le jeune homme vient de rejoindre une grande famille, celle des pèlerins.
Enxxx : Salam les gens. Grave fatigué. On est allés à l’église. Très bien. Demain 7h décollage. Chaud mais tranquille. Réveil à 6h30. On a bu un sirop de verveine. Pas très bon mais ça va. On a marché 3 kilomètres. On est allés au musée du camino. Très bien. Bon accueil, bonne ambiance.
Dimanche 22 juin : Puy en Velay
E : Première marche : 15 km. Ça va, un peu dur, mais je l’ai fait. Réveil à 6h et nous sommes partis à la messe et là nous sommes partis pour aller au gîte. Demain, nouvelle marche de 15 km.
Steven : Tel un laissez-passer, la cathédrale du Puy nous montre le chemin, ouvre ses portes vers cet autre monde : Compostelle
Pour le jeune homme, c’est un nouveau passage, un nouveau seuil à franchir. Avec une seule vraie question : en suis-je capable ?
Dans un moment de doute, il se demande s’il ne devrait pas s’arrêter. Mais il lui suffira d’une rencontre, d’une seule. Celle de Ruben, 27 ans, allemand dont la bonne humeur est débordante.
Sous mes yeux ébahis, E re-démarre, un pas après l’autre, déterminé à vouloir en savoir un peu plus sur ce pèlerin. C’est ainsi qu’il accomplira ses premiers 15 km du chemin, fier d’être arrivé au bout de cette première étape. “Le chemin le protège” “La douleur est une faiblesse qui quitte le corps.” (Ruben).
Lundi 23 juin : Monistrol
E : Marche de 20 km. Très très dur mais c’était bien. J’ai mal partout. C’était long mais demain 13 km, donc facile
Steven : A mon tour, je me demande comment je vais trouver les mots pour partager cette aventure.
Aujourd'hui, un nouveau record, un nouveau seuil de franchi, avec ces 19 km parcourus.
Cette marche s’est faite sous le soleil certes, mais surtout dans la bonne humeur. Le jeune homme s’était allégé le sac à dos de ses maux. Il était convaincu alors et il y est arrivé. Les douleurs physiques ont été quant à elles chantonnées sous le ton de l’humour. E a retrouvé des camarades de marche, fait de nouvelles rencontres.
Nous allons apprendre à dire “bonjour” mais aussi “au revoir” ou “à bientôt” chacun son rythme sur le chemin, chacun sa destination.
Il faut ainsi être un sacré équilibriste dans la rencontre sur Saint Jacques et faire avec ce qu’on est et ce qu’on a.
Mardi 24 juin
E : 13 km. Trop de montées. Demain 20 km. Ça va le faire.
Bon groupe. On a mangé à 13 h. On s’est baignés
Steven : “Le gamin, il fera avec ce qu’il a et ce qu’il est mais toi, il faudra faire plus. Il faudra tenir jusqu’au bout, pour lui “. Dédé, notre hébergeur
Je l’ai vu tissé des liens,
Je l’ai vu discuter, écouter, partager, observer,
Je l’ai vu “galoper”, j’ai vu ces gens l’encourager, l’admirer.
Sur le chemin, il suffit d’être toi et rien de plus, rien de moins.
Pas d’étiquette, pas de stigmate,
Ce jeune homme doit s’autoriser à être lui et pas un autre.
Un apprentissage de toute une vie qui (re)commence sur le chemin
Il regarde devant lui, de moins en moins en arrière
Ultreia
Mercredi 25 juin : Saugues – Chanaleilles
E : 14 km. Réveil à 6h30, ça va. Nous sommes partis à 7h30. Ça va tranquille. De grosses montées au début après ça allait. J’avais pas mal, je vais bien. Puis, je suis allé au dodo. Demain 18 km.
Steven : Ce matin, le jeune homme a réuni une dizaine de personnes autour de lui pour le départ. C’est beau cette capacité à fédérer.
Il prend plaisir à marcher à leurs côtés et s’étonne même parfois à apprécier le vaste paysage.
Les “au revoir” se font plus nombreux au fil de la semaine, laissant place à des émotions variées de part et d’autre. Des présents lui sont offerts pour le remercier et l’encourager.
Il demande aujourd'hui plus de liberté, mais cela ne peut (je crois) s’octroyer en l’absence d’engagement, au contraire, elle fait naître de nouvelles responsabilités.
Jeudi 26 juin :
E : 20 km ça. Je suis fatigué. Demain réveillé à 6h. C’est carré, y’a des céréales. Je vais dormir.
Steven : Se réveiller chaque matin et se dire “que je suis à ma place”, c’est une énergie puissante.
J’espère que E pourra ressentir quelque chose qui ressemble.
Nous avons réuni de nouveaux pèlerins ensemble ce jour. Et c’est ensemble que nous sommes allés plus loin.
Le jeune homme a veillé autant que faire se peut les engagements pris la veille à mes côtés.
Ce soir, il découvrira la ferme, la traite, le métier de la terre que j’admire tant.
J’ai rencontré de nombreux travailleurs sociaux sur notre chemin aujourd’hui. Seuil donne beaucoup d’espoir à nous toutes et tous.
Merci infiniment.
Vendredi 27 juin : Saint Alban - Aumont Aubrac
E : 20 km. Un peu dur. Je suis trop fatigué. Demain 27 km ça va être dur. Smr
Demain réveil à 5h45
Steven : “Il n’y a pas de hasard, mais que des “rendez-vous” sur le chemin.
Les rencontres sont porteuses de sens, elles ne sont pas de simples coïncidences mais s’inscrivent dans un parcours, un parcours de vie.
E est au rendez-vous, ce n’est pas moi qui le dis, mais des pèlerins qui l’observent, l’écoutent, parfois de loin, parfois de près.
Il est de plus en plus présent, ouvert, attentif.
Il vit le moment présent.
Samedi 28 juin : Nasbinals
E : Au final 30 km ptn c’était dur mais demain 16 km . J’ai mal partout surtout aux pieds mais tranquille. Réveil à 7h
Ba Slm
Steven : Nous voilà à plus de 100 km de notre point de départ dans la très belle région de l’Aubrac. Je suis si fier de lui, de nous.
Nous avons courageusement parcouru 30 km et bien souvent dans le silence et la solitude. Je crois que nous en avions besoin, lui et moi.
Je prenais plaisir à l’observer, choisir son rythme, ses pauses, son souffle.
C’est finalement dans ces moments de connexion avec soi qu’on n’entend plus que l’essentiel
Dimanche 29 juin : Saint Chély d’Aubrac
E : 14 km, ça va mais demain un peu dur : 26 km.
Ça va je vais le faire. J’ai mal.
Réveil à 6h15 - Départ 7h je crois
Bah je n’ai plus rien à dire donc SLM
Steven : Le chemin du train pour reprendre l’esprit du poème de Jean d’Ormesson.
La vie, dit-on, est comme un train. On y monte un jour sans trop savoir vers où l’on va, ni pour combien de temps.
Sur le chemin, comme dans un train, on fait des haltes, on croise des regards, on perd des visages.
Chaque étape est un wagon de souvenirs. Chaque rencontre, une station.
Et quand le train ralentit, quand le sentier est plus difficile,
On comprend que le plus beau n’est peut-être pas l’arrivée.
Mais le voyage en lui-même 🧡
Lundi 30 juin : Espalion - jour de repos
E : 0km.
J’ai juste envie de rentrer chez moi et j’ai rien à dire
Steven : C’était le réveil de trop, l’étape de trop. E a décidé d’arrêter de marcher. Je peine à le voir à l’épreuve une seconde fois.
“Marcher pour marcher”, il en a marre, il veut rentrer.
C’est son responsable de marche qui parviendra à l’apaiser pour mieux réfléchir. E s’engage alors à poursuivre la marche quelques jours et à réfléchir à son avenir.
E a puisé dans ses énergies les plus profondes pour avancer chaque jour. Mais sa famille, son chez lui, qu’il nomme “confort” lui manquent terriblement.
Il a besoin de repos, il a besoin de peser “le pour et le contre”.
Il a besoin “d’avoir confiance en lui.” De mon côté, j’irai où il ira.
Mardi 1er juillet.
E : C'était trop bien, on est allé chez le coiffeur.
J’ai rencontré une sœur trop gentille, archi intentionnée. On a marché ensemble. Elle a béni ma croix de Jésus.
Demain, on reprend le chemin (13 km) 13 km ça va ; A demain Bn8 EZB-92
Steven : Une parenthèse soignée par l’un et par l’autre.
Une journée de repos mérité certes mais surtout bien faite.
On s’est fait plaisir, on s’est amusés, on a fait “équipe” sur un navire. Le temps d’un instant, on a oublié nos tracas, le poids du sac.
E était reposé et n’a fait qu’une bouchée de cette journée.
Sa maman au téléphone l’a encouragé à poursuivre l’aventure et lui a fait une promesse qui n’a pas de prix : ”nous serons là à ton retour”.
Pour finir, E a cheminé aux côtés de Soeur Thérèse pour rejoindre une chapelle. Je ne sais pas ce qui s'est dit mais son sourire en disait beaucoup plus de ce moment magique.
Merci à elle, merci à lui.
Mercredi 2 juillet
E : Grave long mais ça va. Demain 14 km, ça va le faire, je sais pas, je pense. Belek comme on dit. A demain, j’ai la flemme.
Steven : C’est la reprise de la marche. E fait le choix de l’heure du réveil et du départ.
C’est avec 1 kg en moins sur le dos qu’il reprend cette belle aventure.
Sur le chemin, nous avons entamé ensemble la lecture d’un livre. Ce qui est drôle, c’est que Constance, le personnage de l’histoire me fait penser à E.
Elle doit réaliser un challenge pour intégrer un cabinet d’avocat très convoité. Elle doit marcher sur le chemin de Saint Jacques en guise de période d’essai.
Qui sait ? E pourra peut-être plus facilement devenir coiffeur après avoir parcouru 1600 km.
En tout cas, il ne sera pas pêcheur. Bout de bois et ligne de pêche, mais en vain. Le plus important, c’est d’essayer et de rigoler. Je crois en lui.
Jeudi 3 juillet
E : C’est grave long, mais ça va. Demain, 11 km. Je n’ai rien à dire ; donc bonne nuit. A demain
Steven : Tout avait si bien commencé, mais une fois la ville d’Estaing derrière nous, il s’arrête net “Je ne veux plus marcher”. Il s’ensuit un temps de négociation, de menaces et/ou d’intimidation. Il lui fallait tester le cadre, les adultes autour de lui, vérifier leur fiabilité. Mais ce sont dans ces moments de “crise intérieure” qu’E verbalise le plus. Je peux ainsi mieux le comprendre et mieux répondre à ses besoins.
Il aura fallu 3h, une vingtaine de pèlerins à passer devant nous pour finalement repartir avec le sac sur le dos.
Bravo E, une nouvelle étape de faite !
L’appel avec la maman permettra peut-être à E de prendre une très belle décision dans sa vie : poursuivre la marche vers Saint Jacques. Les mots étaient durs, percutants. Mais il devait comprendre ; l’arrêt de la marche a des conséquences.
“Montre à ces gens qui t’ont rabaissé qu’ils ont eu tort ! Tu es fort, tu peux le faire”. Maman
Vendredi 4 juillet : Golinhac ---> Sénergues
E :: Je ne sais pas combien on a fait, ça va; On a participé à une course de rallye. Incroyable. Demain, il y a 11 km je crois je ne sais pas. Il y a la télé au gîte, donc c’est carré. Et à demain.
Steven : “Tu es parti d’où” demande le pèlerin ? “Du Puy en Velay” répond E. “Et tu vas où comme ça ?” “Jusqu’à Santiago” répondit E.
Voilà quelques jours que cette réponse était devenue incertaine, floue et hésitante. Je lui laissais toujours l’occasion de répondre à cette question si souvent.
A-t-il pris sa décision ?
En tout cas, je me réjouis à l’idée de l’entendre prononcer ces mots.
Et belle coïncidence, nous venons de rencontrer un jeune homme qui s’y rend ! On pourrait cheminer ensemble au moins quelques kilomètres, qu’en penses-tu E ?
Samedi 5 juillet : Sénergues ---> Conques
E : 11 km, ça va. Je n’ai pas mal au pied. Demain je ne sais pas combien de kilomètres. Et azi à toute
Steven : “Être au rendez-vous”. Nous quittons Sénergues aux côtés de villageois, de pèlerins et de prêtres.
E me paraît plus léger aujourd’hui, quel fardeau a-t-il laissé derrière lui ? Il est souriant, blogueur.
L’étape est courte pour rejoindre une étape de cœur : Conques et son abbaye. Nous avons le temps de se reposer et de profiter
“Se poser” un réel apprentissage pour ce jeune homme très actif. Mais il se débrouille bien.
Il est difficile pour E de qualifier son voyage. Plus nous avançons, plus la question est posée “quelle étape as-tu préféré ?” E ne parvient pas pour le moment à y répondre.
Mais cette nouvelle question, telle une graine finira par germer un jour ou l’autre. Il pourra ainsi lever la tête et contempler. Ultreia 🧡
Dimanche 6 juillet : Conques ---> Decazeville (18 km)
E : 18 km ça va ; Demain 11 km.tranquille. Réveille je ne sais pas. Azi à demain
Steven : Hier, E s’en est allé aux côtés de son homonyme quelques minutes.
J’étais méfiant, je n’avais pas totalement confiance en lui, en eux. J’avais peut-être un peu peur. Et en même temps, ils s'étaient tous les deux trouvés après tout.
Mais je ne pouvais “pas” faire autrement que de me méfier malgré la confiance que j’accorde à E.
Aujourd’hui, j’ai rencontré ce E bis, de 17 ans, qui courageusement “part lui aussi pour mieux revenir”. J’avais jugé malgré moi… Tous les deux viennent de s’attacher, viennent tour à tour me confier les rouages de leur rencontre.
Il est vrai que ces derniers jours, certains pèlerins alors encore sans réponse quant à leur présence sur le chemin, se sentent “concernés” par le voyage d’E. Et peut-être est-cela finalement à force de sentir concernés, ils commencent peu à peu à devenir acteurs de leur propre voyage et locuteurs de ce qu’ils comprennent.
Lundi 7 juillet : La Chapelle de Guirande
E : 13 km. Trop de montées. J’ai dépassé les 70 € d’argent de poche. Demain, 15 km. Réveil à 7h15. A demain.
Steven : Aujourd’hui, il aura porté la charrette d’une pèlerine sur plusieurs mètres.
Aujourd’hui, il aura offert un café à quelqu’un.
Aujourd’hui, il a cédé sa chaise pour un pèlerin plus âgé.
A travers ces actes, E apprend à vivre avec et pour les autres.
Ce n’est pas un apprentissage théorique, mais expérientiel, ancré dans le réel, réel dans la relation.
Ces actions ne sont pas toujours spectaculaires, mais c’est justement cette humilité qui donne la force au récit.
E fait l’apprentissage de l’altérité sur le chemin.
Mardi 8 juillet : La Chapelle de Guirande ---> Figeac
E : Trop bien. Belle rencontre. On a fait 15 km. Ça va s’est passé ; assez vite. Bon repas ; Pas trop de montées, en vrai un peu, maisssss ça va. Demain, on prendra le bus pour rattraper le temps perdu.
Mercredi 9 juillet : Figeac --->Cahors
E : Archi bien. Mais Steven a pris la pire décision.
Mais tranquille.
Demain piscine ou VTT je ne sais pas.
Réveil à 7h40.
Et azi à demain
Steven : Nous voilà en direction de Cahors pour reprendre notre “calendrier original de marche”.
“Rattraper le temps perdu” selon lui, mais pour moi, pour nous cette lenteur était nécessaire.
Elle permet, à mon sens, d’apprécier davantage l’instant présent, du lâcher prise.
C’est certes un apprentissage de taille, un inconfort, pour E qui a besoin et/ou de prévoir demain et après-demain.
Aujourd’hui, les pieds dans l’eau, les sacs sur le dos, nous avons traversé une rivière pour retrouver le chemin. C’était à nos yeux, un défi de taille, et nous l’avons vaillamment réussi.
E était aujourd’hui, le héros d’un récit.
Ce souvenir le marquera, il se souviendra que “rien n’est impossible” ou presque.
Jeudi 10 juillet : Journée de repos à Cahors
E : Ça va, la journée.
On est allés à la piscine ça va
C'était bien
Et azi à demain
Steven : Une belle journée de repos à Cahors avant de reprendre la route.
A l’arrêt, E avance, progresse. Aujourd’hui, il est en mesure de partager, choisir, un moment positif du séjour.
Pour l’hébergement, le “prix” est remis à notre chère abbaye de Conques.
Pour l’étape, E a le plaisir de remettre la première étoile à …. la traversée de l’Aubrac. Les vaches ont grandement contribué à cette remise de prix.
En partageant cela, E s’approprie encore un peu plus le chemin, le projet. Il y adhère, sûrement davantage. Cela lui plaît peut-être un peu plus
Nous verrons cela demain 🙂
Vendredi 11 juillet : Cahors
E : Je n’ai pas marché. Petit coup de mou, donc on est restés à Cahors. Demain, on va à mon cul Jean. Très drôle. C’est c.. mais OKLM. Azi A demain la miff.
Steven : Tout semblait bien se passer mais à quelques kilomètres de Cahors, E n’a plus avancé… 10 mn de pause deviennent 30’, puis une “éternité”.
Il veut arrêter, il veut rentrer chez lui. Pour trouver quoi ? Qui ? Un idéal peut-être, une illusion sûrement.
Pour se convaincre, il se dit prêt à “tout envoyer balader”, prêt à oublier les raisons qui l'ont amené sur le chemin. Il lui faudra entendre des mots durs, des vérités difficiles de la part de sa mère, de Seuil.
Certaines choses ont été répétées, mais cette fois-ci, elles étaient dites avec une force qui portait tout le poids de la réalité
Et aujourd’hui, certains amis pèlerins et aussi d’autres voix se sont joints à la nôtre, comme si à travers eux, c’était le monde qui venait lui parler.
Samedi 12 juillet
E : Trop long, mais ça va. Demain 13 km, ça va. I’a toujours Sosefou
Y'a Anne, une nouvelle recrue
Et je ne sais pas quoi dire
Donc à demain
(J'ai trop mangé)
Signé E2B-92
Steven : Je me lève avec un peu d’appréhension et en même temps convaincu qu’il peut aller au bout.
A Montcuq, des amis pèlerins attendent E. Ils ont besoin de se rassurer. Ils veulent encore marcher à ses côtés. E dira pour la première fois que : “c’est une famille” qu’il a trouvée sur le chemin.
Sous une chaleur de plomb, il avance. Ce n’est pas facile. Je l’ai vu “foncer” par moments. E compare cela à la boxe. Il marche comme il enchaîne les coups, sans relâche, pour tenter de mettre KO l’adversité.
Alors il puise dans ses forces pour ne pas perdre pied.
C’est manière de tenir, d’éviter la chute en frappant le premier.
Enfin, au milieu de tout ça, j’ai le sentiment d’avoir retrouvé notre complicité.
Dimanche 13 juillet Lauzerte ---> Dufort Lacapelette
E : Archi long, mais tranquille. Demain 13 km, ça va
Trop fatigué, en plus je n’ai pas bien dormi. Ce soir, ça va c’est un bon gîte
Steven : E participera à la messe ce matin pour souhaiter “bon chemin” au prêtre du village qui va rejoindre ses terres africaines.
E sollicitera la bénédiction d’un prêtre de Barcelone avant de reprendre la route.
Malgré cette petite étape, E est en difficultés pour avancer.
C’est par le “jeu”, un jeu ambivalent, une provocation déguisée, qu’il tente de m'interpeller, me mettre au défi. Il semble marcher avec colère, avec peut-être même un peu de résignation.
Sa mère est une “boussole” mais il ne peut pas la solliciter tout le temps.
Il va devoir prendre une décision, dont il est le seul détenteur “marcher ou rentrer”.
Ces prochains jours seront décisifs .
Lundi 14 juillet : Dufort Lacapelette --->Moissac
E : Trop bien la journée ; 17 km ça va
Demain 20 kms ça va ; On a marché en groupe, donc c'est passé vite
On a bu un coup en arrivant ; c'est Archi bien passé dans le gosier
A demain bonne nuit
Mardi 15 juillet : Moissac ---> Espalais
E : Ça va ; c'est bien
Un peu dur ce matin, mais je l'ai fait
Trop drôle la soirée
Demain, 18 km ; donc tranquille
En plus il y a que du plat, donc c'est archi bien
Et à demain
SLM
BN8 EZB_92
Ajouter les filles de 14-15 ans
Steven : Tous les prétextes sont bons pour justifier “un départ potentiellement” tardif de Moissac.
Pour changer de paysage et faciliter l’étape, nous empruntons le GR le long de la Garonne. Mais “malheureusement”, cela ne semble pas lui convenir. Il a avancé à la vitesse d'un escargot, multiplié les arrêts, sans compter les”jurons”. De mon côté, j’ai avancé sans y prêter trop attention.
En début d’après-midi, E s’est enfin engagé sur le chemin.
Le temps est passé vite, il s’est même amusé. Il terminera les quelques kilomètres restants en autonomie.
E prendra connaissance des prochaines étapes au côté de son responsable de marche. Il semble avoir de belles intentions pour un avenir proche. Ultreia.
Mercredi 16 juillet : Espalais ---> Miradoux
E : Trop bien la journée. Bien la journée. Demain 18 km ; ça va.
Réveil à 6h45 et départ à 7h30.
Il y avait trop de montées, mais on l’a fait dans la chaleur. Et demain, petit resto. Allez à demain
Steven : Se rendormir après le petit déjeuner n’est pas la meilleure des idées, mais E à raison, nos amis pèlerins avec qui nous souhaitons démarrer la journée sont “à la cool”. Nous traversons le pont pour découvrir le beau village d’Auvillar. Nous flânons, écoutons les histoires de l’ancienne époque.
E confiera quelques pensées à l’église Il s’étonnera lui-même de ce plaisir à écrire dans ce lieu saint. Cet écrit restera un mystère ou presque : il a pu dire que ce voyage lui permettra de se ressourcer.
Aujourd’hui, nous découpons l’étape en 4 morceaux, 4 défis à parcourir en 4 km/h. Mission réussie, malgré les fortes chaleurs. L'arrivée au gîte est savourée.
La soirée se termine avec un très beau coucher du soleil.
Je nous imagine, nous, dans quelques mois, au Cap Finistère ☀️
Jeudi 17 juillet : Miradoux ---> Lectoure
E : Trop bien la journée
18 km en 4h30
On a marché à km 4-5//h
Départ 8h - Arrivée 12h30
Et demain 18 km
Steven : E promet à nos hébergeurs de revenir dans quelques années, accompagné de sa propre famille.
Cette promesse n’est pas anodine, elle montre une capacité à se projeter vers l’avenir. E, sur le chemin, construit une histoire, son histoire personnelle.
Il commence peut-être à ressentir l’envie de partager, transmettre ce qu’il vit sur le chemin.
Aujourd’hui, il scella un pacte symbolique avec des personnes auxquelles il s’est attaché.
Enfin, E se valorise, rend visible et importante cette aventure
Alors peut-être sans étonnement, E a marché un pas après l’autre. Il avait le sourire, il avait hâte d’arriver.
Il vient de programmer d’ailleurs le départ de demain.
Je suis admiratif !
Ultreia
Vendredi 18 juillet : Lectoure ---> La Romieu
E : 18 km je ne les ai pas sentis
Bien la soirée
Bon repas le midi et le sport
On a retrouvé " Sosé le Fou "
Oueeee
Allez à DM
BN8 (bonne nuit)
Steven : Voilà, un mois que nous nous sommes rencontrés.
Voilà un mois qu'il est “parti pour mieux revenir”.
E a beaucoup changé depuis son arrivée sur le chemin.
Il avance avec légèreté sur le sentier. La belle marche du matin permet à E de se reposer et de partager des moments de jeux de cartes au pied de la chapelle.
Il apprécie ce temps aux côtés de sa “famille” de pèlerins.
Au gîte, E m’étonne encore ! Le voilà “armé” d’une perceuse pour aider Laurent à installer une poignée de porte”.
Soséfo lui fait la surprise de toquer à la porte lui qui s'était absenté quelques jours du chemin. E était touché, heureux de sa présence.
Samedi 19 juillet : La Romieu - Condom
E : 13 km, je les ai "bouffés"
Demain 27 km, on va voir ce que ça donne
J'ai eu mon colis de ma mère
C'est " carré"
Et aussi nike les condés
Steven : C’est un jour attendu pour E car il va récupérer le colis de sa maman à la poste aujourd’hui ; mais il n’a pas été assez à l'écoute hier soir, car il traîne les pieds (prend son temps) pour se mettre en route alors que la poste ferme à 12h. Alors, il ronchonne, rouspète et tente de se dédouaner, mais en vain.
Habitué à (être) se dévaloriser, il a du mal à se dire que l'étape est réalisable dans les temps.
Son sourire en dit beaucoup lorsqu’il arrive un peu avant 12h à la poste. “Rien n’est impossible”
Le reste de la journée est excellent pour lui. Il améliore même son équipement de marcheur avec l'achat d'une poche d’eau.
Avant le coucher ”contre son gré”, E témoigne :
“je ne suis pas moi sur le chemin”
Mais qui es-tu ?
Sûrement pas un autre, mais quelqu’un de différent, c’est évident.
Il évoque aussi un tourbillon intérieur, quelque chose qui pourrait imploser. Il “nous” faudra l’aider à exprimer tout ça !
Dimanche 20 juillet : Condom ---> Lamothe
E : J’étais KO donc j'ai pas écrit mais j'ai fait 30 bornes
Laisse tomber, comment c'était dur de fou
Mais en vrai ça va, belle journée et du coup-là, j'écris le lendemain du jour 32 et à l'autre
Paie du coup
Steven : C’est une journée particulière. 28 km à parcourir pour se loger à 1000 km de Santiago.
C’est un sacré défi et pour y parvenir, le chemin lui réserve de belles surprises. Pour commencer, des retrouvailles de pèlerins après dix jours de séparation”, avec tout ce qu’il a à leur raconter. Ceux-ci s’exclament “mais tu as bien changé ? Tu vas jusqu’au bout ?”. La réponse est un “oui”…fier et assuré. L’étape n’est pas évidente, elle demande de l’endurance.
Les derniers kilomètres sont difficiles. Mais il reçoit l’aide nécessaire à la fin. Son sac est porté sur quelques mètres ; les encouragements sont de plus en plus forts sur le chemin ; une haie d’honneur pour l’accueillir.
Très rapidement, tombé de fatigue, E s’endort à côté d’une lettre très spéciale : celle de L , jeune fille de Seuil qui chemine quelques kilomètres plus loin.
Lundi 21 juillet : Lamothe ---> Mancier
E : C'est bon, je suis dans le présent. Donc on a fait 18 bornes
Archi compliqué mais je l'ai fait
Je suis encore KO
Mal partout et demain on fait aussi 18 bornes
Et j'espère qu'on va le faire
Allez à demain
Steven : Sur les conseils avisés de nos hébergeurs, pas de réveil pour E ce matin. Il démarrera sa journée quand il aura décidé, quand ça sera son moment. Victoire souhaite l’attendre et veut cheminer encore quelques jours à nos côtés.
Aujourd’hui, nous revenons sur une étape plus petite que la veille car malgré les difficultés rencontrées hier, il ne faudrait pas arrêter, la symbolique serait trop forte.
E a quelques courbatures et l’envie de marcher est peut-être fragile, mais il met tout de même son sac sur le dos.
Avec Victoire, nous ne manquerons pas de blagues, de jeux et d’histoires pour lui permettre d’avancer plus facilement et en l’observant, il avance avec une belle allure.
Victoire représente pour E un puits de savoir. Ils débattent sur de nombreux sujets et j’observe un garçon qui se nourrit de ces nouvelles connaissances.
Mardi 22 juillet : Manciet ---> Lanne -Soubiran
E : Ça va ; C'était une belle journée et une belle soirée
Y’à pas y de mal trucs (pas de problème)
Il y a J-M (Jean Michel)
Il nous a rejoints donc c'est cool et à demain
Steven : E marche un pas après l’autre sans savoir que notre responsable de marche sera des nôtres ce soir et demain. Son silence résume le caractère improbable de ces retrouvailles.
Oui bonhomme, tu as bien changé ! Seuil fait l’objet de toutes les curiosités mais celui qui l’incarne le plus ce soir, c’est bien E. Il est fier et ça fait du bien !!
Aujourd’hui et hier, il a rencontré des jeunes “d’un autre monde”, d’un milieu peut-être, sûrement plus aisé que le sien. Mais qu’importe d’où ils viennent, ils se sont rencontrés, déconstruits des représentations, laissés de côté certains jugements.
L’un d’entre eux confia à son grand-père “j’espère qu’il ira au bout”.
Nous l’espérons tous, nous y croyons.
Mercredi 23 juillet : Lanne-Soubiran ---> Aire-sur-l’Adour
E : C’est une belle journée
On a rencontré LH et Jeanne
On a mangé une bonne grosse pizza. Archi bonne
Ça fait du bien
Et demain ciné
C'est KR
A demain et BN8 (bonne nuit)
Steven : Je ne sais pas si l’arrivée de notre responsable de marche est liée au changement de météo, mais… il pleut. Trêve de plaisanterie, on rayonne de joie à l’idée de marcher ensemble. E est lui, rien de plus, rien de moins. Bon, ça ne l’empêche pas de fanfaronner en prétextant “qu’à ce rythme, c’est une balade de santé”.
Hier soir, nous avons eu la chance de rencontrer LH et son accompagnante Jeanne. Quel moment extraordinaire ! De la timidité pour commencer, puis une certaine complicité pour finir. Il suffira d’une phrase “merci au fait pour le bracelet”. C’est étonnant, mais ils se ressemblent beaucoup, des traits de caractère. L’un et l’autre n'ont pas caché leurs difficultés parfois à cheminer, mais ils sont plus que convaincus de leur destination : SANTIAGO.
Chacun s’était (très) apprêté pour cette rencontre, alors à nous maintenant de garder ces beaux souvenirs avec nous jusqu’au bout. Qui sait, on se retrouvera peut-être au bout de la terre ? Merci Seuil
Jeudi 24 juillet
E : Bonne petite pause
Mcdo et cinéma
Les dames au gîte sont cools
J’ai un peu envie d'arrêter parce que je suis plus trop à ma place
J'aime plus trop le chemin
Toujours la même vue
Toujours les mêmes phrases quand on parle aux pèlerins et ça me soûle un peu
Steven : Une belle journée de repos pour notre binôme. E a quitté un très cher ami sur le chemin aujourd’hui. Ce dernier a besoin de traverser la frontière plus vite que prévu par peur, peut-être de renoncer au pèlerinage.
E est, je crois, perturbé par cette séparation. Il voyait en cet homme, peut-être un ami, un très bon ami, un grand frère.
Mais, même si à cette occasion, on aimerait être égoïste, il faut le laisser s'en aller pour son bonheur à lui.
Alors ce soir, il rentre à la maison des pèlerins avec tout ça, et ce “fardeau” et puis, difficile d’éviter pour autant les “feux des projecteurs” sur sa personne.
Les nouvelles rencontres sont autant d'encouragements que d’admiration, qui lui rappellent pourquoi il est là.
Ce soir, il aurait, peut-être aimé être plus discret, plus de lumière tamisée pour se retrouver finalement un peu avec lui-même.
Vendredi 25 juillet : Miramont Sensacq ---> Arzacq-Arraziguet
E : Trop bien
La meilleure journée du séjour
J'ai joué au foot
On va bien manger
Demain nouvelle journée pour les aventures de E2B 92
Steven : Il nous faut prendre un peu d’avance pour permettre à E et LH de vivre leur propre chemin. Merci infiniment Bruno pour ton coup de main.
Le ciel est trop voilé pour apercevoir la chaîne montagneuse des Pyrénées. L’humeur et E l’est tout autant. Il dit envisager l’arrêt de la marche à la frontière. Il s’ensuit un échange calme et très constructif sur ses motivations. Son quotidien lui manque, sa mère aussi terriblement. Il aimerait appeler son éducatrice, sans doute pour vérifier les tenants et aboutissants d’un potentiel retour anticipé. Le passage de la frontière lui fait-il peur ? Craint-il un non-retour en arrière ? Mais cet état d’esprit va vite se dissiper avec d'incroyables retrouvailles. Elles tombent à pic, car aujourd'hui nous allons célébrer la Saint Jacques. Un beau festin est ainsi préparé “en famille”.
Au gîte règne une excellente ambiance de fête et de retrouvailles.
Samedi 26 juillet Arzacq – Pomps
E : Trop de montées et de descentes
C'est Hardcore
Et ça fait mal
Demain nouvelle journée
De toute façon, j'ai trop mal aux jambes et aux pieds
Demain réveil 7h00
Je ne sais pas si je m'arrête à St Jean Pied de Port
J'aime plus trop le chemin
Mais je vais réfléchir et à demain
Bn8 E2B_92
Steven : Le réveil était difficile et il a fallu insister pour lui permettre de partir avec les “amis pèlerins.
La fatigue, la difficulté aux “au revoir” ou les deux, mais E va vite abandonner l’idée de les suivre.
Mais aujourd’hui, E traîne des pieds, réclame régulièrement des arrêts à durée indéterminée. Aujourd’hui, il n’est pas parvenu à “faire équipe”.
“Méfie-toi de l’envie mais entends tes besoins” dit l’Alchimiste, résume bien l’apprentissage qui doit être le sien.
J’ai espoir ce soir qu’il se rende compte que son comportement n’est pas sans conséquence sur la poursuite de la journée, du séjour . “Tout ne lui est pas dû”. Le calme a su trouver sa juste place ce soir. Une belle nuit lui permettra sûrement de vivre une belle journée demain.
Dimanche 27 juillet : Argagnon ---> Navarrenx
E : Pas trop de montées
Je me suis un peu fâché
J'aime plus du tout le chemin
Je me fais chier
J'en ai marre
Je marche pour marcher
Mais la juge ne comprend pas, elle me saoule.
Et à demain pour de nouvelles aventures.
E2B-92
Steven : Bien qu’il prenne le temps au réveil et tente d’imposer ses conditions, E s’engage d’un pas décidé en direction d’Arthez. Il veut se rendre à la messe hebdomadaire du village. Il pourra appeler sa maman par la suite. Il est donc motivé.
Une bonne ambiance règne sur la route. Nous pique-niquons en admirant cette chaîne montagneuse que nous allons bientôt traverser. Les yeux de E se plongent dans cet horizon, il s’y voit, je crois. Mais pour y parvenir, il lui faut de l'endurance, de la persévérance. C’est dur, il s’ennuie, il se sent peut-être seul en ce moment. Notre binôme en prend un coup. Il me cherche et me repousse, un jeu avec peu de limites…
Il est agité et je perçois un jeune qui ne sait quoi faire avec des émotions et des besoins qu’il ne verbalise pas, connaît peu.
Il me tarde de le voir plus léger et ainsi se délester des fardeaux qui encombrent sa route.
Lundi 28 juillet : Argagnon ---> Sauvelade
E : Assez belle journée
Pas bcp de kms
Dommage j'ai kiffé
Je pense bien manger
J'ai vu Manu
J'ai passé toute l'après-midi avec lui
Demain, nouveau jour, nouveau gîte.
J'ai un peu mal aux pieds mais on fait avec et à demain l'équipe
E2B 92
Steven : Malgré une bonne nuit de sommeil, E préfère réduire de moitié l’étape préalablement construite. Les arguments manquent et rapidement il éprouve certains remords.
Il se sent “bête” ne sachant pas expliquer ce qui lui est passé par la tête. Découragé, il souhaite qu’on envisage diverses probabilités en cas d’arrêt de marche. La mise en scène n’est malheureusement pas attrayante… Il pense parfois “ sauver sa peau” à base de promesses auprès de ceux et celles dont il pourrait s’écarter. Il mise sur “une nouvelle promesse pour faire oublier celle qu’il pourrait trahir”. Plus tard, de nouvelles rencontres le font avancer le cœur plus léger et le sourire aux lèvres.
Il galope et arrive sans difficulté à la ligne d’arrivée. Il se rend compte de toutes ses capacités. Oui, il aurait pu aller plus loin ! C’est une belle leçon, un bel apprentissage qui s’est joué sur cette étape.
Demain, il ne laissera pas la journée lui filer entre les mains.
Mardi 29 juillet : Sauvelade ---> Navarrenx
E : La soirée d'hier, la patate magnifique.
On a très bien mangé.
Ce soir j’sais pas
Belle étape
Les gens au gîte sont cools
On est chez l’Alchimiste
Belle ville
On a fait une visite guidée.
Le mec m'a saoulé pendant 2 heures
Et à demain pour une autre
Steven : E est prêt avant moi, mais que se passe-t-il ? Nous partons de bonne heure et de bonne humeur ! Une très belle ambiance règne sur cette matinée. L’étape certes petite est très belle et vallonnée mais nous en faisons qu’une bouchée ! “On n’est pas là pour épiler les framboises” dixit le chemin. Lui et moi, nous sommes impatients à l’idée de voir les Pyrénées.
L’après-midi, E fait le choix d’une visite guidée de cette très belle ville fortifiée : Navarrenx. Après la messe et un pot de l'amitié entre pèlerins, nous pouvons enfin rencontrer l’Alchimiste. Le gîte est incroyable où l’art et la philosophie ne font qu’un.
E passera un moment privilégié à ses côtés. Des choses importantes seront dites, écoutées, partagées.
E pourra prendre avec lui cinq de ces dizaines et dizaines citations. Celle qui retiendra toute son attention : “Ose, être toi”.
Mercredi 30 juillet
E : Trop bien
On s'est baignés
Trop trop trop belle journée
C'est passé vite
On arrive à la frontière de l’Espagne dans 2 jours
Vendredi 1er août : Ostabat ---> Saint Jean Pied de Port
E : Belle journée
Belle bande de 7 personnes
Demain c’est repos
Dimanche : montée à Roncevaux
Je kiffe (ou kill) la vie
Resto Archi bon
Il y avait des montées cool
Et à demain
E2B-92
Steven : L’ultime étape sur le camino français. Il me tarde de passer la porte de Saint Jacques aux côtés de E.
Mais ce matin, E n’a pas trop envie de marcher. Ses acolytes de marche prennent de l’avance alors il traîne des pieds.
Il prend pourtant du plaisir à côtoyer les bergeries, à traverser les pâturages.
Ses amis pèlerins l'attendent pas loin !
Tout le monde est excité à l’idée d’arriver à Saint Jean Pied de Port
E blague, chante, imite le cri d’un mouton aux côtés de pèlerins.
Il avance avec toujours autant d'étoiles dans les gens au milieu de cette vallée.
Nous passons la porte des pèlerins, ensemble, comme depuis le premier jour.
Je suis si fier de lui, il est si fier de lui !
Je ne peux m’empêcher de crier à la foule “il a 14 ans, il vient du Puy, il l’a fait !!”. Il ne pensait pas arriver, “si un jour on m’avait dit …”
Tu pourras soulever des montagnes… ou presque, la grimper.
Samedi 2 août : Saint Jean Pied de Port - Jour de repos
E : C'est le jour de repos
C'est archi nul, il n’y a rien à faire
Mais on a mangéééé au resto
Demain montée de Roncevaux à 5h du "sbah" (matin)
C'est normal à demain
E2B-92
Steven : C’est une journée de repos et elle est bien méritée. Elle était attendue et elle tombe au bon moment car les pèlerins qu'il a choisis pour grimper l'Everest” sont à ses côtés aujourd’hui. Lui et moi avons hâte de quitter Saint Jean Pied de Port.
Notre imaginaire est débordant quand il s’agit de décrire la journée de demain. Malgré la forte ascension qui l’attend, E n’a jamais été aussi sûr de lui : il va y arriver !!
Pour réaliser ce défi, E souhaite se réveiller à 5h du matin. Il n’est donc pas question pour lui de se coucher tard.
La petite ville de Saint Jean et la présence de pèlerins de confiance lui permettent de s’octroyer quelques heures sans ma compagnie. Il aura exprimé tous les bienfaits de cette “autonomie”.
Dimanche 3 août : Saint Jean Pied de Port ---> Roncevaux
E : C'est nul l’Espagne
Je comprends rien ; Ça me saoule
Demain, j'espère que ça va être mieux
La montée archi facile
Ils font trop les mecs "ouais c'est trop dur "
C'est facile, on a pris 10h00 alors qu'on a grave pris notre temps
Mais tranquille
A demain
E2B-92
Steven : 5h pétante ! E est levé et déterminé à gravir le Mont Everest”. Pour ce faire, il est bien entouré. Ses ”amis” pètent la forme ! E sera même le porte-drapeau du Pays Basque, allez savoir pourquoi !
Ce départ à l’aube, lui offre le plus beau des levers soleil sur le royaume de Navarre. Le ”môme” vit un rêve éveillé et tente de l’immortaliser en prenant des photos car “chacun sa montagne à gravir”. Il me demande un temps de solitude sur cette belle ascension.
Nous dansons et chantons à la frontière. Il est si fier, si heureux. “easy, facile” pour lui ! Pour moi et sûrement pour lui, nous sommes contents d’arriver à l’abbaye de Roncevaux, tout de même.
Aujourd’hui, c’est “le monde qui s’offre à lui”, des pèlerins venus de partout dans le monde. L’autre, l’étranger, fait souvent peur mais pas d’inquiétude E2B, tu rassembleras toujours du monde autour de toi. Je suis si fier de toi.
Lundi 4 août : Roncevaux ---> Zubiri
E : C'est nul l’Espagne
Mais c'est nul
Mais c'est nul
Mais en vrai c'est nul mais ça va
On mange bien
Grosse journée sous le soleil qui cogne
Mais c'est nul l’Espagne
La marche est facile
E2B-92
C'est nul
Aaaaaaa c'est nul nul nul nul
Steven : “Ave Maria” résonne sans retenue dans les couloirs de l’abbaye. J’adore Luciano Pavarotti, mais il n’est que 6h… du matin. Bon, il faut dire que ce réveil a fait descendre de son lit notre cher E !!
Contrairement aux espagnols, au garde-à-vous, nous prenons notre temps. Nous prenons le temps de saluer des amis pèlerins, dont leur camino s’arrête là, pour cette année. Merci ! Merci pour ces merveilleux moments à ses côtés, vous l’avez fait rire à ne plus pouvoir s’arrêter.
Une belle descente s’offre à nous pour cette étape. Une descente sous le soleil “abrasado”... On comprend mieux le départ à l’aube des espagnols…Ça nous apprendra à moins nous moquer sur le chemin, nous rencontrons la guardia civil. Une rencontre de plus pour déconstruire certaines représentations.
E appellera sa maman. Quelle femme courageuse ! Difficile de voir la chambre de son petit garçon aussi vide. Mais cette absence n’est pas comparable à la fierté qu’elle ressent aujourd’hui.
Mardi 5 août : Zubiri ---> Pampelune
E : C'est toujours nul, mais on fait avec
J'ai pas mal
Personne à mal
Donc ça va
Belle journée
On a bien marché
Resto ce soir OP
Croquetas trop bon
Ce soir au resto, on va être 5 voire 6
A demain
E2B-92
Steven : Comment lui faire aimer l’Espagne quand ce dernier fait la fête toute la nuit au pied de son hébergement.
Mais pour autant à 6h15, le sac sur le dos, il part conquérir cette nouvelle étape.
Nous espérons arriver les premiers à l’auberge de Pampelune car, on raconte qu’ici, chacun dépose son sac formant une file d’attente symbolique : “le premier arrivé, le premier servi”. Sacré défi !! Malgré notre réveil matinal, E est loin d’être seul sur le chemin. Il s’amuse aisément à faire des queues de poisson. Il marche tantôt avec moi, tantôt avec d’autres. E est bien différent dans ce nouveau pays “qu’il aime tant”. Il est apaisé, serein. Sûrement le sentiment d’avoir fait le plus dur. Il s’est aussi déchargé de nombreux fardeaux sur ces 700 km parcourus. Il est bien “dans son corps et dans sa tête”, il paraît heureux. Avec un p’tit coup de pouce, il s’essaye à parler l’espagnol ! Ça lui va plutôt bien. C’est fou comment ce gamin est courageux, le camino saura, à sa manière, lui offrir ce qu’il est venu y chercher.
Mercredi 6 août : Pampelune ---> Puente la Reina
E : Trop belle journée
Trop drôle la journée
L'Espagne c'est toujours nul, mais c'est bon les plats.
On est bientôt à Burgos
J'ai hâte car c'est la moitié de l’Espagne
Ce soir resto
Archi bon mais cher
Trkl c'est pas moi qui paye donc à demain
E2B-92
Steven : Le réveil pique un peu et la motivation tarde à venir pour marcher. Bien qu’il puisse vite retourner dans ses travers, il s’en défait vite. Et puis le chemin lui offre la possibilité de cheminer avec un bon ami à lui. Leur relation est belle à voir. L’un “rajeunit” et l’autre “grandit à vue d’oeil”. Le chemin est une belle école : une école du savoir-faire et du savoir-être qui porte vers le haut.
Un pèlerin aujourd’hui a saisi le regard d’E pour lui parler au plus profond de son être “maintenant, tu arrêtes de dire “‘c’est compliqué… je comprends rien” et poursuit “tu es très intelligent, peut-être plus que moi”, “peut-être qu’on t’a rabaissé, je connais pas ta vie mais aujourd’hui c’est terminé”.
E était sans voix, ses yeux plongés dans ceux de l’autre.
Nul besoin de répondre, la vérité était dite et le message complètement compris. Il pourra faire de grandes choses ce môme.
Jeudi 7 août
E : Il fait trop chaud !!!!!!!!!!!!!!!!
J'en peux plus ; Il fait 40°c, mais on marche
J'aime toujours pas l’Espagne
Et j’ai Archi pas d’inspi
Donc à demain
E2B-92
Steven : Les fortes chaleurs qui s’abattent sur l’Espagne nous obligent à nous lever à l’aube. 6h15 et E est sur le pied de guerre.
Le démarrage est un peu raide et il ne sait plus qui attendre. Certains pèlerins ont pris de l’avance et d’autres sont peut-être derrière… Il ne sait pas quoi faire et cette incertitude le fait ralentir.
Je ne sais pas s’il l’a remarqué, mais il a tout de même fait la rencontre de six français aujourd’hui.
Une fois de plus, l’étape est réussie. Alors rien de mieux qu'une partie de tir à la carabine à la fête du village pour se divertir.
Le calme du gîte de ce soir devrait permettre au jeune homme de recharger les batteries.
Le retour de sa maman sur Paris lui permet de prendre des nouvelles de son quartier. Lui, qui à juste titre, peut se demander ce que l’on peut dire ou raconter concernant son absence. Lui, qui a peut-être peur de ne plus trouver la “même place”.
Vendredi 8 août : de Ayegui ---> Los Arcos
E: La chaleur fait que la journée est longue de fou, mais on marche
Belle journée. Trop chaud. Trop long
Pas trop mal aux pieds
Demain 27 km ; Départ à 6h00
Et à demain
E2B
Steven : Il est 5h et le réveil sonne. L’équipage n’est pas en grande forme. Le courage quitta l’esprit de certains laissant E bien seul face à l’étape d’aujourd’hui. Alors… il replonge dans son sommeil. 6h30, je prends “rendez-vous” avec d’autres équipiers. Bien que son envie de marche soit égale à 0, cette nouvelle le réjouit et il se lève. Pour les remercier, il prend la route vers la boulangerie pour régaler les convives.
Nous traversons de merveilleux villages. La chaleur est intense et sur 12 km, nous traversons des hectares de champs de blé moissonnés.
E ruse pour gagner quelques mètres. Il prend les ”hypoténuses” du champ. Et oui, la leçon du jour aux côtés d’Eric, le pèlerin, c’est le théorème de Pythagore. On a bien rigolé. La rentrée commence plus tôt sur le camino. Cet après-midi, une sieste et une bataille. J’ai gagné. Il cuisine ce soir et je me charge de la vaisselle.
Une très belle journée, dont le début était incertain, mais qu'importe ! Une étape de plus.
Samedi 9 août : Los Arcos ---> Logrono
E : Trop long la chaleur ; C'est Hardcore ;
On a fait 30 km ; Trop dur trop long
La chaleuuuur
Demain 30 bornes aussi ; Départ 5h30 ; Arrivée prévue à 14h00 normalement
J'ai plus rien à dire
A demain
E2B-92
Steven : Une fois de plus, nous sommes entrés en zone de turb… CANICULE !
Il n’est donc pas simple pour E de trouver le sommeil. D’autant plus que pour des raisons culturelles, les espagnols sont un petit peu bruyants.
Mais E est tout de même debout à 5h30 pour vivre cette nouvelle étape. Elle est de taille, car il faut parcourir 28 km. Heureusement, il est accompagné de son “papi virtuel”. Quand je les regarde, on dirait “tic et tac”. E rayonne en ce moment, il rit aux éclats.
La fin de l'étape a été difficile, car les grandes villes donnent l’impression (fâcheuse) qu’elles sont inatteignables.
Ce soir, nous goûtons pour la première fois en Espagne au repas partagé entre pèlerins. “Ultreia” notre chanson du chemin résonne dans la pièce.
Malgré quelques courbatures, E passera sûrement “suseia” au-dessus. Il semble vouloir aller toujours plus loin, toujours plus haut.
Dimanche 10 août : Logrono ---> Navarrete
E : On a fait 12 kms
Pas beaucoup, mais j'ai dormi 4h00 en sieste donc sv
Demain 20 km, je crois ou un peu moins 16 km au final
Je suis encore fatigué même après 4h00 de dodo
Journée cool y’a des français au gîte
A demain
E2B-92
Steven : n’a pas écrit
Lundi 11 août : Navarrete ---> Najera
E : On a fait 16 kms
C'était bien
Sans Steven
J'étais avec deux pèlerins de Belgique
Trop bien
Y a une française au gîte ouii
C'est trop bien
FLM de parler anglais
Et à demain
E2B_92
Steven : “Wesh, je t’attendais” il était 6h30 et E attendait patiemment que je me réveille. Aussitôt, il court vers le petit déjeuner puis après quelque temps, E me demande s’il peut partir aux côtés de Charles pour une “marche en autonomie”. “L’avenir lui appartient” alors je lui donne un peu d’argent, quelques indications et consignes. Le voilà en chemin !! Quel homme étonnant ! Peut-être que la discussion d’hier a porté un peu ses fruits.
Sur les 16 km à parcourir, je tente de maintenir une petite distance afin de veiller sans perturber ou nuire à sa marche. Il m’appelle sur mon téléphone de temps à autre. Tout va bien, même très bien. Nous nous retrouvons en terrasse un peu avant 12h à Najera. Aujourd’hui, l’étape lui semble suffisante. Et il faut dire qu’il fait très chaud à cette heure.
30 mn avant l’ouverture du gîte, nombreux-ses sont les pèlerins-es qui patientent devant la porte. Nous comptons, une fois, deux fois… nous aurons de la place. Une après-midi tranquille au gîte et la rencontre d’une française qui se dirige, elle aussi, vers Santiago au départ de Paris. Le rendez-vous est pris pour demain.
Mardi 12 août : Najera ---> Santo Domingo
E : On a rencontré une famille trop gentille. J’ai trop aimé marcher avec
On a fait 20 kms dans la fraîcheur
Donc trop bien
Demain jsp
Dodo jsp
Manger je sais
Steven : 7h, nous sommes prêts “ou presque”. E pensait que j’avais fait son sac. Il ne faut pas s’habituer aux bonnes choses. Nous marchons avec l’idée de faire quelques kilomètres de plus pour rejoindre Grañon et son gîte en donativo. Nous marchons d’un bon rythme au point, presque, d’en oublier le magnifique lever de soleil derrière nous. Sur le chemin, E s’intéresse à un petit groupe de pèlerins : de gros sacs, de beaux bâtons, un chapeau agrémenté de plumes sont autant de choses qui attisent sa curiosité ! Et j’allais oublier, ils parlent notre langue.
E bénéficie rapidement d’un soin énergétique et des mille et une histoires sur le chemin de Compostelle. Cette famille est loin d’être à son 1er camino : le père fête sa 22ème année sur ce dernier. E l’admire, s’attache et prend soin de son nouveau compagnon de route. Finalement, nous nous arrêterons à Santo Domingo, comme c'était prévu.
“Ce jeune marcheur s’apprête à choisir sa nouvelle direction pour sa vie. L’hésitation l’accompagne. Il sait qu’une fois le pas franchi, il lui faudra accepter que certaines personnes ne poursuivent pas avec lui”.
Mercredi 13 août : Santo Domingo ---> Belorado
E : Ce matin trop chill
Donc l'après-midi 🖕 voilà la chaleur
Bah du coup il fait chaud bah oue
Comme d’hab la chaleur
Demain, il va faire moins chaud je crois
On a quitté la famille donc ça saoule mais c'est la vie
Donc je suis toujours avec le relou Steven
Et oue comme d'hab à demain
E2B_92220
Steven : L’effervescence dans le dortoir contribue au réveil matinal d’E.
C’est aux côtés de ses amis de la veille qu’il prend son petit déjeuner. Il souhaite les accompagner “jusqu’au bout”, à 7 km d’ici. Et oui, malheureusement pour E, nous n’avons pas le même programme aujourd’hui.
Ce matin, il est le maître du temps. Et il prend son temps, savoure chaque minute à leurs côtés. La séparation est par nature difficile. Il aimerait rester… mais nous devons poursuivre. Sa capacité à affronter les difficultés du détachement est croissante.
L’agitation est bien différente, beaucoup plus nuancée. L’exercice n’était pas simple car il était fatigué. Et puis prendre son temps le matin induit inévitablement une prolongation de la marche en après-midi. Le soleil, lui, a cogné. E a avancé en traînant les pieds. Il est apparu alors des plaintes et des douleurs. Ces dernières ont disparu sur les derniers kilomètres, quand nous avons lancé un concours de “prout prout” (klaxon) de poids lourds.
Comme E disait ce matin “une journée de plus”.
Jeudi 14 août : Eldorado --- >San Juan et Ortega
E : C'est long je veux rentrer chez moi
Mais ça passe vite donc trkl
On a eu un bordel pas possible avec les moucherons
On s'est fait envahir
Mais on a gagné
Journée un peu longue
On a fait 20 km à peu près
Demain Burgos jour de repos à demain
e2b_92
Steven : Hier, j’ai pris soin de proposer “un petit programme aux petits oignons” pour E. Nous avons établi ainsi notre plan d’attaque pour l’étape d’aujourd’hui : lieux de pause, lieu pour déjeuner etc ... Au regard de tout ça, il a choisi “de prendre la route”. à 8h.
Aujourd’hui, nous avons été essentiellement deux sur “le camino” et c’était de nouveau simple et agréable. Quel plaisir, quel progrès ! Nul besoin d’attaquer le lien malgré les difficultés de la journée. Et il y en a eues. Notamment, l’attaque de moucherons !!! Je vous jure, on préfère, largement refaire la montée de Roncevaux. Nous avons dû ruser, s'emmitoufler dans nos serviettes. Bref… Malgré son avis sur la question, il gère plutôt bien l’anglais et l’espagnol, il ose ! Il se fait comprendre et c’est important. Il peut rompre plus facilement le sentiment de solitude.
Notre programme de demain est ficelé et nous avons hâte d’être à Burgos pour une journée de repos. Là aussi, les idées ne manquent pas pour se faire plaisir.
Vendredi 15 août : Ortega --->Burgos
E : On est à Burgos
Jour de repos demain
Ce soir on a mangé au resto avec Eric et Chantal
Archi bon
Ribs de porc avec de la sauce barbecue avec de la patate
A demain
e2b_92
Steven : Le moral est en baisse pour notre équipe ce matin. Un incident s’est produit hier soir entre lui et moi. Cette fois-ci, il est allé trop loin dans la transgression de mes limites. Lui comme moi savons que la journée de repos va nous faire le plus grand bien. Alors E se réveille et entame malgré tout le plan de marche d’aujourd’hui. Difficile de marcher “côte à côte” car nous ne parvenons pas à nous mettre d’accord sur ce qui s’est passé la veille. E dit ne pas y avoir d’importance alors que pourtant il s’inquiète pour moi, à sa manière. Notre binôme est fort car malgré tout ça, nous avançons, chacun à son rythme, sous un soleil de plomb. Nous ne perdons pas notre sens de l’humour pour détendre l’atmosphère. Nous tentons de se soutenir comme on peut jusqu’à notre arrivée à Burgos. Au gîte, nul besoin de rechigner, il nous faut “siester”. Chacun d’entre nous aura notre responsable de marche au téléphone pour “apaiser la situation”. Ce soir, nous nous offrons un merveilleux cadeau : nous retrouvons Eric et Chantal. Ça faisait si longtemps (3-4 jours) et nous avons plein de choses à nous raconter !
Samedi 16 août : Burgos - jour de repos
E : jour de repos
On a rien fait
Le but du jour de repos
J'ai regardé 1 film trop bien
Demain on marche 25 kms je crois
On rentre dans la meseta
Voilà le stylo ne marche plus
Et à demain
e2b_92
Steven : 6h et la musique résonne déjà dans le couloir. Hors de question de quitter les lieux avant 8h, nous sommes en repos. Avant de partir, nous “sauvons” la journée à deux pèlerins coincés dans l’ascenseur.
La journée d’aujourd’hui se résume à : ne pas trop en faire ! Nous regardons un film le matin. Pendant que E taille minutieusement son bourdon (bâton) je fais mes écrits pros. Aujourd’hui, nous nous reposons et nous prenons soin de notre relation. L’un et l’autre faisons attention à nos envies respectives.
Bon, la visite de la cathédrale était expéditive, il n’avait pas envie de s’éterniser. Il faut dire qu’il a fait quelques rencontres et des retrouvailles. Quand je le regarde, je vois son envie profonde de cheminer de nouveau en groupe sur le chemin. Il lui faudra être patient et avoir confiance en ce chemin pour ça.
Dans deux jours, voilà deux mois que je l’ai rencontré. Je suis admiratif du jeune homme qu’il est devenu.
Dimanche 17 août : Burgos ---> Arroyo San Bol
E : Trop chaud c'est chaud
On est dans la meseta
Il fait une chaleur pas possible
C'est un peu compliqué
On est à Santiago dans à peu près 20 jours donc c’est bien
J'ai proposé de faire Finisterra en une seule fois de Santiago
Trop hâte et comme d'habitude
A demain et oui et comme d'habitude
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Steven : Désireux de retrouvailles, de relations humaines, E a peiné à s’endormir, a accepté que sa marche reprendrait lorsque pour d’autres, c’est la fête.
Nous avons démarré notre journée vers 8h avec un peu de retard. Mais sur 26 km, nous avons marché “côte à côte” et quel plaisir !
Nous voilà à parler de sa vie future, il faut dire que nous approchons de Santiago. Je suis heureux car E envisage la suite avec le sourire aux lèvres.
Nous parlons de cette troisième et de ce brevet qu’il veut conquérir. Pour son “grand oral” quoi de mieux que de parler du chemin. Je m’engage à l’aider dans ce projet.
Par la suite, il me dresse son plan d’attaque pour son futur salon de coiffure. Ce jeune “rêve grand” et il a raison, il réalisera beaucoup plus ainsi.
Car le désert que nous piétinons depuis ce matin, attise notre curiosité, nous poursuivons notre route sur 5 km. Nous dormirons ce soir, seuls, au milieu de ces grandes étendues.
Lundi 18 août : Arroyo San Bol ---> Itero del Castillo
E : Ça en fait des jours, punaise !
Mais après plus il y a de jours plus vite je rentre chez moi et j'aime ça
J'ai trop mal
Mais je dois marcher
Donc je me tais et je marche
On a fait 25 bornes
Pas senti
On est amis avec un pompier trop gentil
Et à demain
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Steven : C’est encore dans la pénombre que nous poursuivons la traversée de la meseta. Pour le jeune homme, il lui faut du temps pour se réveiller, se préparer et accepter l’étape qui s’offre à lui. Ces vastes étendues de terre sèche vont rapidement le plonger dans une expérience individuelle d’introspection. Au petit déjeuner, nous rencontrons deux français. Alors, sans hésiter, nous marchons ensemble. C’est l’occasion de dresser un bilan de ces deux mois écoulés. Je trouve le moment opportun pour le remercier “merci à toi pour cette rencontre”. Voilà deux mois que cette aventure a commencé. Le chemin nous offre ce soir, un merveilleux cadeau. Nous trouvons un lieu de repos à l’intérieur d’une ancienne chapelle. Après une bénédiction, nous partageons un repas en famille.
C’est à la bougie que nous écrivons ces quelques mots.
Nous vivons un “moment hors du temps” qui, je crois, restera à jamais gravé dans nos mémoires.
Mardi 19 août : Itero del Castillo ---> Fromista
E : Toujours pas trouvé de femme sur le chemin
Quel dommage mais je marche en espérant trouver ma moitié
Et j'avance et je fais des kms
Et je me rapproche petit à petit de ma moitié et de Santiago, le but
Il faut pas oublier le principal
Et à demain
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Steven : C’est à la lueur de la bougie que nous prenons notre petit déjeuner. Cette petite chapelle et ses hospitaliers auront bien pris soin de nous. Les “au revoir” sont chaleureux.
Aujourd'hui, petite étape, il nous faut prendre notre temps. D’autant plus que les incendies rendent incertaine notre poursuite sur le chemin francès. Il règne sur notre chemin, une agréable atmosphère. Nous cheminons “en famille”. Ça faisait longtemps. E questionne et écoute avec beaucoup d’admiration un ami pèlerin qui est pompier. Il perçoit chez lui, sûrement, du courage, de la force qu’il envie. Il perçoit “un héros du quotidien” et s’imagine à son tour, peut-être le devenir. E aurait bien fait quelques kilomètres de plus pour rester un peu plus à ses côtés. Mais nous devons nous arrêter.
Ce soir, nous invitons deux pèlerins à notre table. A nos tabliers ! E cuisine les carbonaras. C’est un défi de taille car nous sommes aux côtés d’un italien. Durant le repas, nous usons de plusieurs langues et E se débrouille comme un chef. A l’aise, il s’amuse à faire l’inventaire des mots français de nos ustensiles de cuisine. L’italien réussit brillamment le quizz qui s’ensuit. Une excellente soirée pour nous.
Mercredi 20 août : Fromista ---> Carrion de Los Condès
E : Punaise ça augmente tous les jours
Et ça c'est bien
Il reste pas beaucoup pour que je rentre chez moi et faire ma 3ème
Trop bien
Et je vais peut-être faire sapeur-pompier volontaire
A voir
Belle journée
On a revu un mec qu'on n'avait pas vu depuis Burgos
Et à demain
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Steven : Il nous tarde de trouver le temps pour vous remercier pour vos encouragements, vos lectures ! Nous vous prenons dans nos bras 🧡 🧡
Petit déjeuner sucré/salé ce matin. Nous prenons notre temps face à la facilité de l’étape et une belle météo.
E pense beaucoup à sa rentrée ce matin, il sait ô combien les enjeux en 3ème sont importants. Nouvelle école, nouvelle classe, nouvelle page de son histoire en somme. Il l'appréhende et partage son inquiétude. Il se souvient des événements passés, de ses anciennes habitudes qui l'ont mis en difficulté, voire empêché… de réussir. E doit se rassurer, car il a bien changé et il peut ainsi, s’autoriser à se faire confiance.
Le jeune homme pense également au jour où il se présentera à la porte de la caserne des pompiers. Il imagine et construit petit à petit son futur entretien d’embauche (il ne cesse de m'étonner). Il est impatient de rentrer, le compte à rebours est lancé. Il a parfois vu qu’en avançant plus vite sur le chemin, il pourrait le quitter plus rapidement. Attention à la course, car celle-ci ne se fait que dans la lenteur au risque de trébucher.
Jeudi 21 août : Carrion de Los Condes ---> Calzadilla de la Cueza
E : Trop bien, j'ai rencontré un français, David gentil
On a fait 17 bornes, pas beaucoup
Demain 21 bornes c'est mieux que ce matin
Et à demain
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Steven : Au départ de Carrion, nous empruntons ce qui fut pendant très longtemps la voie romaine. Une longue ligne droite qui s’étire à perte de vue. Nous avançons pas à pas sur ce sol poussiéreux, sans vraiment savoir quand nous atteindrons notre but. La monotonie du chemin pourrait aujourd’hui nous éprouver. Pourtant, E demande à marcher seul, en retrait derrière moi. Inévitablement, il se retrouvera face à lui-même, au moins pour un temps. Sa demande est claire : il en a envie, peut-être même, en a-t-il besoin.
Il rencontrera en chemin un “vétéran du camino” qui en est à son (peut-être) 20ème chemin.
Nous nous séparons de Lucy aujourd’hui après un chouette pique-nique partagé. Nous nous retrouverons sur la route, qui sait.
En tout cas, l’auberge nous offre une belle piscine pour se détendre.
Ce soir, nous partageons le repas aux côtés d’une italienne (au resto) !). Ils sont nombreux sur le chemin. Enfin, nos amis alsaciens nous appellent pour prendre de nos nouvelles. Le rendez-vous est pris pour Léon. Quel plaisir !
Vendredi 22 août : Calzadilla de la Cueza à Sahagun
E : A j'aime faire le carnet juste pour voir le chiffre du jour : 65 jours c'est énorme
Bientôt chez moi ; Trop bien
Belle journée ; Belle soirée
Demain 13 km
Donc grasse matinée jusqu'à 7h30
Trop bien et à demain
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Steven : Bien que le réveil soit difficile et que son “chez lui” lui manque un peu, E fait quelques “pompes” à la sortie de l’auberge. Nous marchons à deux durant quelques kilomètres en se remémorant les bons souvenirs de la veille.
Au petit déjeuner, nous retrouvons Victorio… un italien ! La journée est dédiée à ce pays, je crois. Ils sont partout et nous commençons à bien parler leur langue. Pour vous dire, on nous comprend. Seuil ! préparez-vous à nous envoyer sur la via Francigena .
Pour nos deux mois sur le chemin, nous parvenons à la moitié du “camino francès”, c’est pas beau ça ? Nous recevons une attestation pour cette ”victoire”.
La journée était incroyable et cette soirée fabuleuse. Cette dernière était une vraie “auberge espagnole” avec un repas partagé. Les plats se sont mélangés, les langues aussi et de nombreux souvenirs. Je crois que nous venons de nous ouvrir à cette communauté internationale et ça fait beaucoup de bien. Je l’admire beaucoup jeune homme !
Samedi 23 août : .Sahagún ---> Calzadilla de Los Hermanos
E : Ça commence à être long ; J'en ai marre
J'ai envie de rentrer chez moi
J'en peux plus de me lever à 6h45 ou 7h00
J'ai envie de me lever à 12h00 comme chez moi et d'avoir mon téléphone
Et on a fait 10 km
Pas bcp mais on a fait avec
Et j'ai écrit sur un livre d'or pour la deuxième fois
Et à demain
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Steven : L’auberge ne cessera de nous étonner. Son petit déjeuner est royal. L’étape est petite aujourd’hui alors c’est vers 8h30 que nous quittons l’auberge avec la bonne humeur et le ventre plein. Avec d’autres pèlerins, nous prenons le temps de passer au “Dia” du coin pour le repas de ce soir.
A sa grande déception, ce dernier ne sera pas partagé, car ces pèlerins empruntent un autre chemin. La déception est grande pour E au point de se désolidariser du plan de marche co-construit la veille. Lui et sa frustration vocifèrent et tout devient “nul”. L'agitation grimpe au fil des kilomètres et une halte dans un village ne parvient pas à apaiser son être.
Sur la voie romaine, “faire équipe” devient difficile. E, enfermé dans ses frustrations et ses manques, se heurte à ses propres limites.
Un incident sérieux survient, nous rappelant ó combien l’équilibre est fragile et combien tout peut basculer rapidement.
Dimanche 24 août
E : n’a pas écrit
Steven : E se souviendra de la gentillesse de Juan, notre hospitalier. Nous quittons le village toujours en fête ; deux mondes se rencontrent. Sur cette voie romaine, E se confie. Son entourage lui manque, son quotidien ainsi que son confort. Il se demande si son meilleur ami l’attend. A-t-il pensé à lui ? A-t-il ressenti le manque comme E l’a ressenti ?
Des questions de l’existence qui trouvent toute leur place sur le chemin. Va-t-il retrouver la place qu’il a quittée ou une autre. Son esprit vacille… tantôt sur le chemin tantôt ailleurs. Il semble un peu perdu. Il ne manque pas de projets mais les incertitudes sont toutes aussi nombreuses.
Cependant, il conçoit aujourd’hui plusieurs chemins pour parvenir à ses buts. Bien que pour lui les adultes se compliquent trop la vie, j’espère qu’il ne choisira pas tout le temps ce qui lui paraît être “une option de facilité. Malgré le calme de la meseta, E traverse une tempête.
Lundi 25 août : Mansilla ---> Leoñ
E : On est à Leoñ. C'est grand
J'ai appelé ma mère
J'ai eu un peu la flemme de marcher mais oblige
Ce soir resto avec des pèlerins
Trop hâte et à demain
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Steven : Malgré les difficultés rencontrées, il lui faut être optimiste (mot découvert la veille). Il est plutôt aisé de trouver de la couleur sur le chemin, capable d’atténuer le noir.
Une fois de plus, E est bien entouré et le réveil est ainsi plus savoureux.
Nous voilà engagés sur les derniers kilomètres de la meseta. Leoñ et sa cathédrale vont nous accueillir pour ce soir avant de nous engager bientôt en Galice.
Il nous faut “rebondir”, “ruser” pour parvenir avec E à dépasser certains obstacles. Nous prendrons le temps de reposer sur la table nos engagements, nos limites. Pour “faire équipe” ou pour “embarquer”, il nous faut un but et une finalité communs à tous les deux. J’espère que nous y parviendrons. Ce soir, nous retrouvons nos amis alsaciens, quel plaisir ! C’est l’occasion pour E de partager quelques souvenirs/anecdotes de ces derniers jours. Il est heureux de retrouver “son papy” du chemin. Il espère pouvoir marcher à ses côtés dans les prochains jours, voire même d’arriver tous ensemble au bout du chemin.
Mardi 26 août : Léoñ---> Villar de Mazarife
E : Super Belle journée
Le gîte a une piscine. Je me suis baigné ; Trop bonne
On a mangé des pâtes
Bon j'aime les pâtes c'est bon pour le sport
Et bisous à demain
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Steven : C’est vers 7h30 que nous quittons Léoñ. Cette ville mériterait qu’on s’y arrête un peu plus longtemps pour la découvrir.
Sur la route, nous rencontrons deux pèlerins avec qui nous allons finalement cheminer.
Les pauses prévues par le plan de marche sont grandement appréciées. E a trouvé une pèlerine qui “aime les pauses”. Mais à force de s'arrêter, il devient difficile de redémarrer et E perd la notion de distance, pour bien faire. Donc, les 2 derniers kilomètres sont difficiles mais il parvient à les faire sans trop déborder.
Le gîte est grandement apprécié, on y trouve une piscine.
Et demain !! L’étape qui nous attend est simple comme bonjour.
E poursuit son imaginaire du retour, mais quelques éléments lui permettent d’y voir plus clair. Sur son bâton, il note le nombre de jours passés sur le camino, une manière de faire trace de ce “long” voyage.
Mercredi 27 août : Villar de Mazarife ---> Hospital de Orbigo
E : Trop bien ; On a fait 14 km
On est dans une chambre de chinois ; Mais il y a un français
Trop bien On a fait un resto
Et à demain
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Bisous
Steven : La soirée de la veille fut difficile. E n’a pas su faire autrement que réclamer mon attention à travers mes vulnérabilités. Ce comportement nous abîme malheureusement. Mais la nuit a pu tout de même nous réparer un peu.
L'étape d’aujourd’hui est très courte mais très longue pour E. Il n’a de cesse de répéter “je veux rentrer”. Mais il ne se décourage pas pour autant. Il avance et tente de ne pas déborder. Il faut dire qu’il a quelques plaisirs à la clé… C’est dommage de devoir fonctionner ainsi, mais il en va “ de notre chemin “.
L'après-midi semble lui permettre enfin de se reposer. Il dort.
Aujourd’hui, E apprendra que sa grand-mère maternelle est mourante. Je le vois… tenter de dissimuler ses émotions.
Il aura également au téléphone son papa pour la première fois. Ils étaient contents de pouvoir converser quelques minutes. Ça faisait longtemps.
Ce soir, notre binôme se couche avec le cœur apaisé. Une journée de repos bientôt entre nos mains.
Jeudi 28 août : Hospital de Orbigo ---> Astorga
E : On a marché 17 kms
Trop bien
On est dans un gîte trop bien
On est avec des françaises
Demain jour de repos
Et à demain
Bisous
Steven : C’est aux côtés d’un pèlerin français que E quitte le petit village de l’Hospital. Sa présence lui fait beaucoup de bien, il en oublie la difficulté de la marche
Malgré les rafales de vent, nous avançons avec engagement vers Astorga. Les paysages sont magnifiques. La verdure est de retour, tout comme les reliefs. C’est un nouvel élan de vie qui nous fait beaucoup de bien.
E pense parfois à sa “avo”, sa grand-mère portugaise. Pourra-t-il lui rendre visite une dernière fois avant son grand voyage ?
Cette préoccupation le quitte un petit temps lorsque ce dernier trouve refuge dans un petit havre de paix. Pour lui, c’est l’un des plus beaux endroits en donativo : un petit déjeuner en libre-service et il y en a pour tous les goûts. Je regarde ce jeune garçon se nourrir de pastèque entre deux parties de foot avec un chien. Il aurait pu y rester la journée mais il avait mieux à faire ou presque….
Il a cru, un instant, trouver la femme de sa vie.
Enfin ce soir, il aime annoncer autour de lui qu’il parcourra bientôt 40 km de nuit.
Aujourd’hui, il n’était pas question de rentrer en France.
Vendredi 29 août : Astorga - Jour de repos
E : C'est long
Mais c'est long ; j'en peux plus
Bref c’est le jour de repos
Et bah la marche m’a presque manqué
Et oui on n’a rien fait de spécial à part dormir
Et à demain
Bisous
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Steven : C’est le bon moment pour finaliser le 5ème rapport éducatif de ce long voyage. C’est toujours l’occasion de prendre du recul sur le passé, mais aussi sur ce qu’il reste à parcourir.
Malgré la difficulté de l'exercice, E semble très attentif lors de la lecture de ce document.
Aujourd’hui, nous sommes au bon endroit pour notre journée de repos.
Nous n’avons presque pas quitté l’auberge. Le temps était long, parfois pesant pour E. C’est donc à ces moments que l’agitation fait son apparition. Alors, il me faut être ferme et rappeler le contrat. J’observe des perspectives de changement dans son comportement… ça va être un long combat.
Aujourd'hui, au-delà de Uno, E aura appris à jouer au Rummikub. Et oui, on peut faire différemment qu’avec un téléphone pour occuper son temps.
En tout cas, nos batteries sont pleines pour la suite de l’aventure, je le crois.
Samedi 30 août : Astorga ---> Rabanal del Camino
E : C'est long de fou malade
On a fait 25 km, un peu dur, mais ça va
Demain 32 km, ça pique un peu
Trop bonne journée
On a mangé une paella pas trop bonne
Et à demain
Bisous
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Steven : C’est à 8h que nous quittons la ville d’Astorga aux côtés d’un pèlerin français. Le chemin est beaucoup plus peuplé à l’approche de Santiago. Nous avançons à bonne allure. E est dans les temps qu’il s’était donné pour son plan de marche.
Nous entamons une longue montée qui nous conduira à La Cruz de Ferro. Alors avant ça, E ramasse une pierre sur le chemin qui symbolise tout ce qu’il voudra laisser derrière lui et oublier. Il pourra la déposer là-haut ! Sur le chemin, il rencontre un autre français, il faut dire que nous sommes nombreux aujourd’hui (pour une fois)
Lui qui voulait, ces derniers jours, avancer sur de plus longues distances, il fait le choix de s’arrêter ici. Ici, c'est-à-dire, là où ces rencontres l’ont mené. Car, il est simple de comprendre qu'au cœur de son chemin se trouve : les relations humaines.
Bien que cette expérience touche à son terme, lorsqu’il est bien entouré, il ne se précipite jamais vers la sortie.
Dimanche 31 août : Rabanal del Camino ---> Molinaseca
E : Très très bien
On a marché avec un je sais plus
Mais c'est pas grave
Et ça va ; c'était facile
Et à demain
Steven : Quelle journée. Il sera difficile de tout dire. Mais une journée “défi” quoi qu’on en dise. 7h, nous prenons de la hauteur. Zut pas de café à 5 km du départ… Là-haut, règnent : la brume, la pluie et le froid. Difficile de se motiver à ce stade et d’ailleurs pour une histoire de poncho, E provoque le conflit. Il lui faudra un petit temps pour dépasser tout ça et se mettre véritablement en marche avec le sourire. Il faut dire qu’il est, une fois de plus, bien entouré. L’étape est très formatrice ! Il n’est pas aisé d’avancer dans ces conditions météo, mais nous sommes “tous” dans le même bateau ; qu’importe l’âge, le physique, la raison d’être sur le chemin… nous allons tous dans la même direction.
Dans ces moments où le froid engourdit, les pèlerins s’entraident, se félicitent, se réchauffent le cœur.
Aujourd’hui, nous avons monté pour redescendre de plus belle.
“Belle” était la vue, “beaux” sont les paysages que nous offrent la montagne et le soleil de l’après-midi.
Nous avons eu un pincement au cœur en apercevant les dégâts des incendies et une pensée pour les pompiers.
Lundi 1er septembre : Cacabelos
E : Très très belle journée
Mais la soirée était mieux
On a mangé au resto
Magnifique
Demain petite étape de 18 kms
Et à demain
Bisous
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Steven : “La Galice, c’est comme la Bretagne”. Les gens disaient donc vrai ! Notre journée se fait avec le froid et la pluie.
E s’est constitué une nouvelle famille sur le chemin. “Avec elle”, il chemine sans difficulté et surtout avec la joie de vivre. Il en oublie (un peu) le poids du retour et les préoccupations.
Les progrès en apprentissage de la langue sont bluffants. Il parle de mieux en mieux l’espagnol, ça devient naturel, “facile”. Lorsque je l’observe avancer aux côtés de ses nouveaux amis, il m'arrive de me faire ”tout petit”. N’est-ce pas là mon rôle parfois ? Cette discrétion ne dure jamais trop longtemps car E vient toujours à ma rencontre pour me demander “ça va Stev ?”. En voilà une belle équipe.
Mardi 2 septembre : Villafranca ---> Trabadelo
E : Pas très bonne journée
J'ai vomi, mais j'ai marché
Le mec dans le gîte est fou, putin, pourquoi
Et belle journée
Bon j'ai fait 9 km
Mais c'est déjà ça
A demain
Steven : La nuit fut courte et difficile pour le jeune homme. Il a été malade. A 2h du matin, il espère du fond du coeur trouver le repos “ça pourrait arrêter mon séjour”. Finalement, en une phrase il pourrait nous dire qu’il ne veut pas rentrer…
Au réveil, impossible pour lui d’envisager de marcher ; pour lui “c’est terminé”. L’auberge lui offre quelques heures de repos supplémentaires pour se réparer.
E se sent mieux. Il veut retrouver sa “famille du chemin” et se sent prêt à marcher s’il le faut.
Car il serait prêt à faire n’importe quoi pour y parvenir, il me faut “temporiser”. Nous prenons le bus pour quelques kilomètres et à sa grande surprise, ses amis l’attendent. Il finira à pied l’étape d’aujourd’hui et à leurs côtés.
Cet après-midi, son mal n’est pas complètement parti. C’est difficile (très) d’être malade quand on n’est pas chez soi… Avec la fatigue, E veut tout arrêter.
Mais une bonne sieste et de belles personnes autour de lui, lui permettent d’envisager le lendemain sur le chemin.
Mercredi 3 septembre : Trabadelo ---> O Cebreiro
E : Bah ça va bien
C'est Steven qui est malade maintenant, mais tout va bien
Bref on a gravi une montagne, mais je suis toujours en vie
Demain 20 km
Et à demain
Bisous à todo
T’as vu je parle espagnol
Bref à demain
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Steven : E va beaucoup mieux, me voilà rassuré ! “Notre famille du chemin” est prête à gravir la montagne ! ou presque… quelques kilomètres et me voilà complètement malade. Pas question de nous arrêter, E saura m’épauler si nécessaire. Et je peux compter sur nos amis pèlerins pour veiller un peu plus sur lui.
E grimpe aisément cette montagne, on peut apercevoir une sensation de légèreté comme s'il volait. Il est bien dans sa tête et son corps, ça fait plaisir à voir. La montagne nous offre des paysages magnifiques. Nous entrons officiellement en Galice, quel plaisir ! J-7 avant notre belle arrivée à Santiago, c’est difficile d’y croire.
Une belle surprise pour le jeune homme, nos amis alsaciens, ”son papy du chemin” viennent de le rattraper. Je me demande à quoi va ressembler le final de notre long voyage. Nos invités constatent le sourire rayonnant du jeune homme. Et oui, il est bien différent et E passera une partie de la soirée à montrer ses progrès en espagnol.
Demain, au croisement du chemin la “famille” sera plus grande.
Jeudi 4 septembre : O Cebreiro ---> Triacastela
E : Bah, ça va très très bien
On a marché 20 km ça va
Très beaux paysages j'aime ça
Demain 24 km
Ça va encore
Et j'ai un peu mal aux jambes, mais c'est la vie
Et à demain
Bisous les fans
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Steven : Un vol a eu lieu cette nuit à l’auberge…E attristé par la situation et par compassion donne un petit peu de son argent à cet homme dépouillé.
Nous commençons le chemin avec une famille encore plus grande. E raconte à “son papy” ses dernières aventures sur le chemin. Je l’observe passer d’une personne à une autre, d’une discussion à une autre. Quel bonheur !
Nous descendons tranquillement de la montagne en traversant quelques petits villages. E se plaît à regarder les petites étables, les “vafos” (vaches) et leurs paysans.
10°c là-haut, tout de même, et mon dieu, ces jeunes de 14 ans, qui ne veulent pas se couvrir. La population sur le chemin est bien différente. Nous sommes plus nombreux mais aussi très différents. E se compare face à ces pèlerins qui ne parcourent qu’une centaine de kilomètres pour arriver à Santiago.
Ce soir, nous cuisinons comme à la maison… Les jeux de société sont de sortie. C’est une merveilleuse ambiance.
Demain, nous reprenons la route et ce soir, il nous faudra dire “au revoir” à de très bons amis.
Vendredi 5 septembre : Triacastela ---> Sarria
E : Bonne journée
On a marché avec Eric et Chantal et avec moi bref
Demain à 22 km
Ca muy buen, comme on dit en espagnol
Bref ce soir, resto amis
Je sais on fait beaucoup de resto mais je m'en fous
Bref à demain
Bisous
Steven : Tout semble plus facile lorsqu'on a le “cœur léger”. Le réveil, par exemple, il est facile même peut-être agréable en ce moment aux côtés de ses amis pèlerins. De mon côté, je précise que c'est la grande forme (enfin)
Aujourd’hui, l’étape est un tout petit peu plus longue. Et ça monte et ça descend, une vraie fête foraine cette étape. Nos genoux parlent à notre place ce soir.
E avait hâte d’en finir et il faut dire que cette belle nature traversée ne nous a pas offert de bars.
Le soleil lui était de retour et la température en hausse pour notre plus grand plaisir.
Ce soir, nos chemins se séparent avec Philippe (84 ans) et sa petite fille, Raquel (21 ans). C'était une rencontre incroyable et très importante pour E. Hasta luego !
E aura profité de chaque instant à leurs côtés avec une baignade en fin de journée.
Demain, il se permettra peut-être un peu plus de repos afin de cheminer tout aussi facilement sur les 10 derniers kilomètres
Samedi 6 septembre : Sarria ---> Portomarin
E : Bref j'en n'ai marre
J'ai envie de rentrer chez moi bref
Il faut que j'arrête de dire bref bref
On est à Sarria
Y a vla le monde
!!!!!!!!!
C'est abusé le monde !!!!!!!
Chokbar bref on a fait 20 km les plus longs de ma vie
Et on a mangé resto
Bref à demain
Steven : La soirée d’hier était merveilleuse. Difficile de se dire qu’au lever du soleil, cette petite famille allait se séparer. J’ai pu voir dans les yeux d’E. la fatigue s’installer progressivement. Sans vous mentir, j’étais un peu inquiet pour aujourd’hui. Mais malgré une séparation très émouvante, les kilomètres dans les pieds, E a vraiment bien marché. Il était essentiellement avec son “papy” a critiqué ce nouveau chemin et ces nouveaux pèlerins. Et oui, il faut y croire pour le voir (c’est l’inverse) mais nous avons doublé plus d'une centaine de pèlerins ou l’inverse.
La borne des 100 km vers Compostelle est derrière nous. C’est magique et en même temps perturbant de se dire qu’on arrivera dans quatre jours.
Pour ce faire, nul besoin d’être différent malgré une atmosphère bien différente sur le chemin.
Pensons au voyage écoulé, à ses rencontres, ces moments de joie et de peine. Ces prochains jours invitent à une prise de maturité et à de nouvelles responsabilités.
Dimanche 7 septembre : Portomarin ---> Palas de Rei
E : C'est long, il reste 3 jours putin
J'en ai marre
Bref j’ai envie de rentrer bref
On a fait 25 kms bien
Mais il pleut donc il faut mettre la cape de pluie mais j'ai jamais froid donc je ne la mets pas donc Steven n'est pas content bref
BN8
A demain
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Steven : Un réveil de plus, c’est un jour de moins vers notre destination finale Santiago. Après un p’tit déjeuner, nous nous engageons sur les 8 premiers kilomètres, sans arrêt, pour un vrai petit déjeuner. Sacrée pente, sacrée montée pour commencer : à notre plus grand plaisir.
Tout semblait tranquille pour E… ou presque, le calme avant la tempête. Aujourd’hui, il a choisi de faire ”le caïd”, de s'opposer, de confronter. Il semble vouloir s'affranchir d’un cadre, s’affranchir des adultes, leurs attentes et leurs contraintes.
A-t-il besoin encore de tester la solidité du lien ? Et ce retour, qu’en pense-t-il ? En tout cas, ce comportement qu’il n’est pas en mesure de “cacher” à ses amis pèlerins, interroge, interpelle !
Bien que la fin soit proche, il nous faut garder le cap, c’est-à-dire, conserver les exigences à bord, celles qui nous ont permis, entre autres, d’avancer.
“J’en ai marre” que peut-il vraiment vouloir dire ?
Lundi 8 septembre : Palas de Rei ---> Arzua
E : Plus que 2 jours avant la fin
J'ai envie de voir ma mère
Bref
Demain 30 kms bref
Ce soir on a fait une pizzeria
Trop bonne
Mais vous connaissez E
J'ai mal choisi donc bref
A demain
Bisous e2b_92
Steven : Bien que E ne soit pas en mesure de bien clôturer la journée de la veille, le réveil est prometteur ! J-3 avant la grande finale, c’est dingue. Notre impatience est telle que l’étape d’aujourd’hui nous fera parcourir 28 km de plus pour parvenir à notre objectif.
Nous sommes attentifs aux bornes sur le chemin. Il faut dire qu’il y en a en abondance, avec une précision à la décimale. Et ce soir, nous sommes à environ 39 km de la cathédrale de Santiago.
E a engagé une marche bien différente qu’hier. Il a adopté une attitude à la hauteur des exigences d’aujourd’hui. Il faut dire qu’il a de la reconnaissance à la clé, et d’autres plaisirs. Il a bien marché mais cela reste fragile.
Bon et ce qui ne changera pas et qui peut parfois faire un peu son charme, c’est de “râler”. Il a beaucoup râlé sur les derniers kilomètres au plaisir de nos oreilles.
Il faut dire qu’il s’amuse avec nous “on râle parce qu’il râle”.
Aujourd’hui, une belle soirée en perspective.
Mardi 9 septembre : Arzua ---> Lavacolla
E : Oui plus que 10 bornes pour Santiago enfin
Bref le grand jour et le soir fiesta oue
Bref belle journée
On a joué avec des châtaignes au foot
On a fait 30 bornes
Un peu long
Bref à demain pour la fiesta
Steven : Malgré les kilomètres parcourus ces derniers jours et les réveils à l’aube, E est “debout” pour attaquer cette avant dernière étape ! C’est une longue marche qui nous attend avec presque 30 km.
Aujourd’hui, sa famille du chemin lui lance un sacré défi : ne pas râler !! et malgré la difficulté de l’exercice, on peut dire que c’est réussi !!
Ça me fait sourire de le revoir retenir de ses lèvres les mots “j’ai faim” ou “je suis cuit” ou “j’en ai marre”.
Aujourd’hui, le chemin s’est transformé en stade de foot automnal : E vs Papy, bogues de châtaigne en guise de ballon de foot. Il faut noter que cet esprit imaginatif est une qualité et qu’elle le fait avancer !
Bon, avec “les yeux plus grands que le ventre”, E pensait finalement rejoindre Santiago ce soir…. Mais, il est préférable de s’installer au chaud à 10 km. Notre arrivée ne sera que plus belle. Il me tarde de le voir en possession de “ce petit morceau de papier (dixit E) qui le rendra fier et fort pour la vie.
Mercredi 10 septembre : Lavacolla ---> Saint Jacques de Compostelle
E : Bah on est arrivés à la fin du chemin Santiago
Bref Steven a pleuré, moi non
La compostella est dans le sac
Demain bus pour Fisterra, pas assez de temps
Ce soir resto plus fiesta
Bref belle journée
Et à demain
Bisous
Steven : Se réveiller et sentir qu'on est si proche de l’arrivée. C’est en famille que nous avons commencé, c’est en famille que nous allons terminer. Plus que 10 km, les souvenirs défilent aussi vite que notre impatience. Difficile d’y croire, mais nous allons bientôt la voir, elle, la cathédrale de Santiago. Nous entrons dans sa ville et c’est déjà l’excitation, nous avançons encore plus vite vers son centre.
Nous marchons côte à côte, comme le premier jour. Nous passons le porche donnant accès à la grande place de la cathédrale sous le son d’une cornemuse. Mes poils se hérissent, les larmes commencent à tomber. La mission est réussie !!! Il l’a fait, il est allé au bout. Quel héros !
Notre famille du chemin pleure de joie, de soulagement, d’accomplissement. E observe, écoute, enlace et exprime ses émotions différemment. Devant cette belle cathédrale, E s’empresse d'appeler sa maman : il est fier, tellement !
La compostella en poche vient attester ce parcours “hors normes” qui fut le sien.
La journée fut magique, cette journée restera gravée dans nos mémoires, à jamais, pour la vie.
Jeudi 11 septembre : Fisterra
E : On est à Fisterra
Bref c'est trop bien
On s'est baigné
Ce soir resto. Et on a rien fait de spécial
Demain on va à Santiago, puis Samedi le Puy
Bref y'a 13 h de bus
Et à demain
Bisous
Steven : Même lorsqu'il s'agit de relire le journal de bord faisant l'éloge de notre arrivée à Santiago... les larmes surgissent. E s’étonne et pourtant, pour moi elles semblent évidentes. Nous l'avons fait !!
Avant de prendre le bus en direction du bout de la terre. E a la chance de pouvoir jouer une dernière partie d’échecs avec un ami belge. Certains “au revoir” se poursuivent à la gare routière.
A Fisterra, nous allons retrouver notre intimité, pour ces derniers jours en Espagne.
Notre bonheur est immense en apercevant ces vastes étendues d'eau. La mer est à nous, ou presque. Voilà trois mois, que le breton ne l'avait pas vue. 3 ans que E n avait pas posé un pied à la plage. Il s'étonne même de l'eau salée.
Et oui, nous avons tenu notre promesse : la baignade à la mer, notre renaissance.
C'est un moment hors du temps, qui clôturera une sacrée belle histoire
L'Etat finance cette marche à hauteur de 80 %.
Le reste est financé par vos dons
(Ces dons ne constituent pas de l'argent de poche supplémentaire pour le binôme
mais permettent réellement de financer leur marche)
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J'ai eu le bonheur de vous avoir rencontrés dans deux auberges et maintenant lire que vous êtes à peu de km de Santiago remplit mon coeur de joie. E., tu dois être fier de ce chemin parcouru avec ses difficultés et ses beautés,fait de rencontres et de moments solitaires et partagés. J'espère vraiment que tu puisses garder toujours la richesse intérieure que ce chemin, même dans le long terme, donne. E., tu es un jeune grand homme!
À Steven un enorme bravo pour avoir su accompagner E. pendant ce chemin avec proximité formatrice et support dévoué.
Que votre chemin puisse, une fois rentrés, continuer à vous porter tout le beau que vous méritez! Ultreia! Francesca
Quel bonheur de vous avoir croisé à l'Abbaye de Conques !Je suis profondément heureuse pour vous deux que ce chemin vous ait menés jusqu’en Galice.
Toutes mes félicitations à toi, E., pour avoir franchi les Pyrénées et traversé l’Espagne : quel bel accomplissement ! J’espère que cette marche t’aura offert autant de lumière intérieure que de paysages magnifiques.
Et un grand bravo à Steven pour sa présence et son dévouement tout au long de cette aventure.
Que la route continue de vous porter avec douceur et inspiration. Elizabeth
Coucou à vous deux !
Bon pour le moment, l'Espagne ne semble pas t'enthousiasmer E. Mais je pense que ça va venir !
Bonne continuation à tous les 2, on s'est bien marrés !
Celle qui n'a pas aimé le boudin béarnais !
C’est avec plaisir que nous lisons la suite de tes aventures sur le chemin. Profites de ces moments uniques qui te laisseront des souvenirs inoubliables. Tu peux être fier de ce que tu as déjà parcouru et le sera encore plus à l’issue de ton périple.
On te lit avec beaucoup d’intérêt
Signé: une maman et sa fille avec qui tu as partagé un petit morceau de chemin :)