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Marche de Bryxxx

Dernière mise à jour : 30 juin 2022

Marche de Bryxxx accompagné par Laurienne


Dimanche 10 avril : Saint Germain sur Ille - Stage de préparation

B : Je m’appelle B. J’ai 16 ans et je viens d’Ille et Vilaine. Je suis gentil, mais susceptible. Je vais faire une marche d’environ trois mois, 90 jours environ en faisant le Chemin de Stevenson du Puy en Velay jusqu’à Saint-Gilles pour enchaîner ensuite sur une partie de la voie d’Arles, de Saint-Gilles jusqu’à une partie de la voie du Piémont, de Carcassonne à Saint-Jean-Pied-de-Port pour reprendre enfin le GR 65 en direction de Le Puy en Velay. .

Je serai accompagné de Laurienne qui est gentille. Je pars avec motivation, mais aussi une grande inquiétude car j’ai peur de la durée. Aujourd’hui, ce 10 avril, j’ai marché 3h dans un endroit qui s’appelle La Vallée de Couesnon et je me sentais bien en rentrant au gîte.

Demain, je fais un nouvel entraînement, mais est-ce que je me sentirai aussi bien qu’aujourd’hui. Je reste positif sur mon objectif qui est de dépasser ma peur et de terminer cette marche : demain nous le dira.

Lundi 11 avril : Saint Germain sur Ille - Stage de préparation

B : Ce lundi 11 avril, j’ai marché entre 13 et 15 kilomètres à Gahard et ses alentours. J’ai ressenti des difficultés sur la fin de cet entraînement, mais une grande joie lorsque j'ai fini. Pendant notre promenade, nous avons transporté, sur nos épaules, avec Anthony qui est de l’équipe une branche d’arbre recroquevillée en arche qui était tombée de son tronc. Avec Clémence, la deuxième personne de l’équipe Seuil me suivront pendant ma marche avec Laurienne;

Nous avons marché environ 1h30 avec ce “bout de bois” sur les épaules. Ce soir, nous nous préparons, moi et Laurienne, pour notre départ pour Paris, le lendemain.

Entre anxiété et excitation, j'ai hâte de commencer ce voyage, l’aventure va bientôt commencer.


Laurienne : Mon sac, un jeune et la magie des rencontres opèrent, fascinent.

Pas encore partis pour notre aventure, nous croisons déjà des gens à la verve facile.

Aujourd’hui, c’est un artiste marionnettiste passablement énervé par les résultats du 1er tour des élections présidentielles. J’avoue que, moi aussi, je suis un peu déçue et un peu inquiète pour la suite, mais le vote démocratique a parlé et mes chers compatriotes ont donné leur avis, cette parenthèse faite, nous avons repris notre route.

Pour ce deuxième entraînement, B s’est montré plein de volonté et de motivation. Souhaitons que ça dure dans le temps !

Demain, ça y est, c’est le grand saut dans l’inconnu, nous partons direction Le Puy-en-Velay à la découverte du Chemin de Stevenson.


Mardi 12 avril : Le Puy-en-Velay

B : Aujourd’hui était une grosse journée : entre le fait de courir pour les trains et des doutes qui s’installent de plus en plus dans ma tête, ça me donne des papillons dans le ventre tellement l’anxiété est présente. Mais je me dis que j’aurai un premier aperçu de la marche le lendemain. Lorsque je suis arrivé au Puy-en-Velay, j’ai tout de suite vu le paysage qui m’attendait dans les prochains jours : des montagnes à perte de vue, des arbres et des petits villages typiques. Ce soir, nous avons partagé un premier repas avec d’autres voyageurs : l’ambiance était sympa et je me suis senti décontracté.

Demain, première étape de notre voyage : Le Puy-en-Velay - Le Monastier - 19 km


Laurienne : Aujourd’hui, une longue route nous attend pour atteindre la ligne de départ de notre périple. Mais avant cela, le check-list des marcheurs s’impose :

- Sac à dos validé

- Chaussures validé

- Tee shirt/Pantalon validé

- Doudoune / Gore Tex

- Gourde validé

- Couteau, frontale validé

- Chapeau, lunettes de soleil validé

- Guide validé

L'essentiel est prêt, enfin presque, de quoi traiter les satanées ampoules. Bon là, c’est sûr, nous sommes pas mal. Ah oui, un dernier détail, les billets de train pour rejoindre le Puy-en-Velay. Ça y est nous voilà fin prêts, B est un peu fébrile, mais l’inconnu est toujours déstabilisant. La motivation est présente et ça c’est le plus important. Maintenant, ce sera étape par étape, rencontre après rencontre.

Allez B, j’ai confiance en toi, nous allons atteindre ton objectif.


Mercredi 13 avril : Le Chemin de Stevenson, Monastier sur Gazeille

B : Aujourd’hui, j’ai parcouru 19 km depuis le Puy-en-Velay jusqu’à Monastier. Entre dénivelé, heures de marche et paysage à couper le souffle, cette journée fut aussi intense que surprenante. Nous avons rencontré un camionneur, Norbert, avec qui nous avons discuté sur le temps du repas. Nous avons aussi rencontré une autre équipe de randonneurs au bar Le Stevenson au Monastier. Lors du début de notre étape, nous avons vu un cheval de trait se rouler au sol comme un petit chaton : c’était très drôle.

Ce soir, nous sommes hébergés dans une auberge du nom de “File dans ta chambre”. J'ai trouvé ce nom assez marrant. J’ai hâte de repartir demain vers Ussel : 15 km de voyage


Laurienne : Aujourd’hui, je vais vous faire une confidence sur une envie que me procure le Chemin de Stevenson. En bonne Ariégeoise que je suis, dès que nous entrons dans un bois, mon nez frétille de cette odeur et mes yeux observent le sol tels des scanners. Vous vous demandez pourquoi… mais pour les morilles, bien entendu. Qu’est-ce qu’une morille ? C’est le graal du champignon, la madeleine de Proust de l’Ariégeois.

Par contre, c’est une timide, un peu farouche qui se cache et se camoufle tel un caméléon qui se confond dans son environnement. Un challenge me direz-vous de la débusquer quand on marche avec un sac et que l’on doit parcourir beaucoup de kilomètres, toutefois, je reste optimiste de la cueillir, la cuisiner et la savourer ! Petit conseil culinaire, mais ne le dites à personne : l’omelette aux morilles, la recette la plus simple du monde, mais celle qui sublime le mieux cette denrée rare et succulente.


Jeudi 14 avril : Ussel

B : Bienvenue dans le premier épisode du "Petit fou rire en montagne”.

Aujourd’hui, nous partons à la rencontre de Laurienne. Son objectif : faire les cascades les plus glamours de France. Ce matin, elle a glissé dans une descente et est retombée comme Taylor Swift à la fin de la cinématique du début de son clip “Bad Blood”. Cela était assez amusant à regarder, de mon point de vue. Nous nous retrouverons, bientôt je l’espère, pour un nouvel épisode du “petit fou rire en montagne”.

Nous avons descendu une grande pente glissante parsemée de cailloux et de racines d'arbres. J’ai eu surtout des difficultés à remonter la côte qui s’offrait ensuite à nous.

Ce soir, nous sommes hébergés dans un gîte appelé “Le Stevenson” (quelle coïncidence). Le propriétaire, très gentil, m’a fait visiter son écurie et m’a montré ses magnifiques chevaux. Nous finissons donc la journée sur un point positif. Demain Ussel-Landos : 15 km


Laurienne : Pour cet accompagnement, j’ai le privilège de découvrir, d’ouvrir avec B le Chemin de Stevenson pour Seuil, je me sens un peu comme une pionnière car nous sommes la première équipe à le faire.

Pour vous donner un aperçu de ce qui nous entoure, imaginez des grands plateaux verdoyants et vallonnés appelés causses, traversés par de grandes gorges. Ici et là, des petits villages avec des maisons toutes en pierre de schiste. On dirait presque qu’elles ont été construites par le même architecte et les pierres taillées par la même main. Nos pieds foulent des chemins escarpés, caillouteux, nous passons parfois par des forêts remplies de résineux, de châtaigniers et de hêtres. Le climat aux influences méditerranéennes est pour l’instant doux et clément. Les rencontres sont chaleureuses, les habitants souriants et accueillants.

Ces deux premiers jours sont riches et donnent envie de découvrir ce territoire, ses occupants qui doivent, je pense, avoir des hivers rudes


Vendredi 15 avril : Landos

B : Cette journée était sur le thème du silence et de la tranquillité. Des terrains plats, des champs à perte de vue et quelques hameaux perdus, voilà à quoi s’est résumée la marche d’aujourd’hui. Lorsque nous sommes arrivés à Landos, un chien est venu nous rendre visite. Cette rencontre fut aussi agréable que surprenante car ce chien se pavanait seul dans les rues de Landos.

Ce soir, nous sommes hébergés au gîte communal de Landos, dans un petit studio sympathique. Ah oui, petit détail : j’ai goûté des spécialités de Haute Loire, de la jambonnette et un fromage de pays que j'ai trouvés très succulents. Laurienne m’a aussi fait goûter sa recette secrète de l’omelette aux morilles, un petit champignon.

Demain, Landos --->Pradelles (15 km)


Laurienne : Depuis maintenant plusieurs jours avec B, nous marchons sur le GR70, appelé Chemin de Stevenson. Pourquoi ce nom et qui est Stevenson ? Robert Louis Stevenson, jeune écrivain écossais décide, le 22 septembre 1878, de partir à pied de Monastier-sur-Gazeille (Haute-Loire) avec une ânesse prénommée Modestine. 12 jours, 220 km et beaucoup d’aventures, plus tard, il arrive à Saint-Jean-du-Gard. En plein chagrin d’amour, il voulait oublier le retour en Amérique de sa belle Fanny (qu’il finira par épouser en la rejoignant quelques années plus tard) et surtout il voulait aller à la rencontre du pays des camisards (rebelles protestants des Cévennes). C’est son journal de route, voyage avec un âne dans les Cévennes, qui a permis de retracer son itinéraire, devenu Chemin de Stevenson. Cet ouvrage publié en 1879 précéda deux de ses œuvres les plus connues : L’île au Trésor et Le cas étrange de Dr Jekyll et Mr Hyde.

Voilà pour la petite histoire de ce chemin aussi mythique que joli. Et pour conclure, je vous laisse lire ces quelques lignes :

Je ne voyage pas pour aller quelque part, mais pour voyager, je voyage pour le plaisir du voyage. L’essentiel est de bouger, d’éprouver d’un peu plus près les nécessités et les aléas de la vie, de quitter le lit douillet de la civilisation et de sentir sous ses pieds, le granit terrestre avec, par endroits, le coupant du silex’ Robert Louis Stevenson.

A vos chaussures…..


Samedi 16 avril : Pradelles

B : Aujourd’hui fut placé sous le signe des rencontres : nous avons rencontré un marcheur, gentil. Il entreprend tout comme nous le Chemin de Stevenson. Il est aussi enrichi culturellement à mon goût et nous a transmis un peu de cette culture, par exemple, l’ouverture d’un nouveau GR, nommé le “Routeau” qui part de Nîmes et jusqu’en Italie


Laurienne : Comme une sensation déjà vue, suis-je dans un rêve pour me retrouver ainsi au milieu d’une végétation similaire à certains endroits de mes montagnes. Des arbres qui se font rares, des sapinettes qui bordent le sentier, des pistes qui coupent et s’entrecoupent pour permettre aux éleveurs d’accéder aux pâturages de montagne. Seule cette terre que mes pieds foulent me dépayse, la couleur change à mesure des kilomètres qui passent. De l’ocre ou rouge, terre argileuse qui heureusement est sèche et nous permet d'avancer sans encombre.

Bien sûr, je n’oublie pas le panorama, nous évoluons à 1200 m d’altitude, je vous laisse imaginer la vue sur les crêtes entourant le Mont Lozère qui s’approche à mesure que l’on s'éloigne du Puy-en-Velay.


Dimanche 17 avril : Cheylard-l'Evêque

B : Bienvenue dans ce deuxième épisode de "Petit fou rire en montagne”.;

Aujourd’hui, je me suis fait piéger par Laurienne qui m’a éclaboussé à l’aide d’une fontaine à eau. De plus, lorsqu’elle a prononcé le mot “farandole”, j’ai éclaté de rire pendant au moins 5 mn car je me suis souvenu d’une émission de radio où une vieille dame avait été appelée et n’arrêtait pas de répéter “la farandole” à n’importe quelle question qui lui était posée.

En plus de ça, nous avons été accueillis dans une maison d’hôte : un vrai palace, des hôtes charmants et un repas exquis. A la fin du repas, j'ai cru que mon ventre allait exploser, je ne pouvais plus bouger. Enfin, je tiens à dire qu’aujourd’hui, j’ai marché 22 km. On s’approche peu à peu des 30. Demain, Cheylard-l'Evêque------> Luc (13 km).


Laurienne : Aujourd’hui, nous avons parcouru 22 km, B s’est montré plein de détermination et d’envie. Pour cette étape, notre “ennemi” fut le soleil, qui par sa chaleur nous a un peu écrasés, heureusement nous avions pensé à la crème solaire. C’est donc chapeau vissé sur la tête que nous avons fait nos premiers 22 km et, surprise, notre peine fut récompensée par des hôtes où l’accueil est une philosophie de vie. Un repas digne d’un 4* nous attendait, salade de mâche sauvage cueillie le matin, charcuterie maison, pommes de terre du jardin sauce morilles, assortiment de fromages de Lozère et tarte citron fait main, de quoi bien remplir nos estomacs et nous mettre des papilles dans les yeux. On ne boude pas notre plaisir d’un repas aussi fastueux.

Lundi 18 avril : Luc

B : Aujourd’hui, nous avons rallongé le temps de marche jusqu'à 1h30. Nous avons fait une courte pause de 10 mn pour pouvoir continuer 30 mn jusqu’à un très joli lac. Et là, surprise, nous avons rencontré Isabelle, très douce et gentille et qui nous a accompagnés jusqu’à Luc, et aussi Dominique et Guy qui nous ont fait part de leurs aventures autour du globe. Nous avons aussi visité les ruines du château de Luc. Nous sommes plus particulièrement montés en haut d’une tour où de loin nous pouvions apercevoir Pradelles. En bas de cette tour se trouvait un mémorial avec, sur le sol, un symbole qui m’est totalement inconnu. Je vais me renseigner et je vous le redirais.

Ce soir, nous sommes hébergés au “Gîte des Girolles”, les propriétaires sont très généreux et sympathiques. Demain Luc - La Bastide ---> Puylarens (15 km)


Laurienne : Les rencontres sur les chemins sont nombreuses, riches, parfois cocasses, loufoques, mais tellement indispensables.

Aujourd’hui, nos pas nous ont emmené vers des personnalités aussi diverses que intéressantes. Une dame seule, inquiète par la future météo, avait besoin d’un peu de soutien ; un couple globe trotter plein d’énergie, ravi de nous croiser, de partager un bout de leurs nombreuses aventures. Et une fois n’est pas coutume, nous sommes accueillis par un couple aussi adorable que généreux. La soirée est agréable, pleine de rire, car enfin, nous partageons le gîte et le couvert avec d’autres marcheurs.

B est à l'aise, bavard, très bavard, je n’ai plus aucun secret pour personne. Mais il rayonne, raconte son projet, lit un bout de son futur roman, il profite du moment. C'est un peu pour ces instants là que je fais ce travail. Ça y est l’aventure commence, vivement demain.


Mardi 19 avril : La Bastide – Puylaurent

B : Au lieu de vous parler d’aujourd’hui, je vais plutôt vous parler de la veille, le soir plus précisément, au “gîte de la Girolle”, nous étions six : moi et Laurienne, deux femmes, Constance et Marie et deux hommes, Florent et Jean-Philippe. Nous avons passé une très bonne soirée autour d’un bon repas préparé par Béatrice. J’ai aussi lu les premières lignes de mon roman “L’assassin au cœur brisé”, à Marie, Constance, Laurienne et Jean-Philippe. Ces derniers m’ont donné des retours plutôt positifs, ainsi que des petits conseils. J’ai trouvé ça plutôt excitant de lire mon livre pour la première fois, mais j’étais content lorsqu’ils m’ont donné leur avis. Hier, je vous ai aussi parlé d’un symbole que j’avais trouvé au château de Luc et je n’ai malheureusement toujours rien, désolé.

Pour en revenir à aujourd’hui, c’était une petite étape. Pour déjeuner, nous nous sommes arrêtés à Notre Dame des Neiges, une abbaye pas très loin de la Bastide Puylaurent où nous passons la nuit. A la Bastide, j’ai aussi revu Constance avec qui nous, moi et Laurienne, avons discuté une bonne partie de l’après-midi.

Demain : La Bastide Puylaurent ---> Chasseradès (11 km). Nous allons essayer de faire cette étape en une fois.


Laurienne : Ce soir, c’est ambiance pittoresque, pendant que nous profitons des derniers rayons de soleil de la journée avec B, nous avons assisté à une scène digne d’un titre de Marcel Pagnol. Imaginez les clients d’un bar, probablement des habitués, au fort accent du Sud assis autour du fameux “jaune” de l’amitié en train de commenter “les blaireaux” qui en plein effort, coupent un arbre énorme avec une scie et une corde. Une scène surréaliste et extrêmement drôle. Je vous assure c’était du pur Pagnol qui l’aurait à coup sûr, inspirée. Un régal pour les yeux et les oreilles. Et tout s’est bien fini.

Maintenant place à un peu de culture car pour la petite histoire, la Grand’Halte où nous logeons cette nuit était au XVII°s et XVIII°s un relais de diligences. Seule auberge dans le coin, elle était fréquentée par les muletiers de la Régordane, unique chemin de l’époque, et ceux venus de l’Ardèche. Ils trouvèrent ici repas chaud et lit “douillet” pour pouvoir se reposer avant de repartir à travers ce pays si rude et sauvage.

Quelle vie quand on y pense !


Mercredi 20 avril : Chasseradès

B : Aujourd’hui, premier jour de pluie fine mais présente. Heureusement que Laurienne m’a acheté une cape de pluie la veille. Mais aujourd’hui était une petite étape, donc nous sommes arrivés tôt à l’hôtel où nous passons la nuit.

De plus, j’ai oublié de vous parler d’une rencontre que je fais en boucle ces quatre derniers jours : un vieil homme que nous croisons chaque jour, car il fait un aller-retour (par exemple aujourd'hui La Bastide - Chasseradès en aller-retour). Je trouve cet homme très courageux. Son nom est Jean-Michel. Ce soir, au programme : le débat Macron - Le Pen et demain : Chasseradès - Mont Lozère (21 km)

Ah oui, j’ai oublié de vous dire que j’en suis déjà à l’écriture du 4ème chapître de mon roman L’assassin au cœur brisé.


Laurienne : Aujourd’hui, la pluie nous accompagne, la météo change plus on avance sur les hauts plateaux du Mont Lozère. La température chute et nous donne un aperçu de la rigueur que ce coin de France demande à ses habitants. Comme un oasis dans le désert, l’hôtel des Sources, notre escale du jour, apparaît d’un coup et nous permet de trouver réconfort et chaleur auprès de nos hôtes tous si accueillants depuis le début de notre périple.

Vous avez dû remarquer mon goût pour les anecdotes, les légendes qui font l’histoire du chemin, des régions que nous traversons. Aujourd’hui, à Chasseradès, d’improbables tunnels au milieu des prés attirent nos yeux, notre curiosité. Ce sont des tunnels ferroviaires dont Stevenson vit la construction. Ces tunnels permettent aux trains de la ligne Béziers-Clermont, de circuler lorsque la neige est épaisse et que le vent forme des congères dans la vallée. Mise en circulation en 1902, elle fonctionne toujours. C’est la ligne non électrifiée la plus haute du réseau ferré de France, avec un passage à 1215 m d’altitude. Ici, on l’appelle parfois “la ligne du toit de France”


Jeudi 21 avril : Mont-Lozère

B : Aujourd’hui a été une étape compliquée : entre la pluie et les montées avec des dénivelés quasiment en ligne droite, mon moral en a pris un coup. Mais il faut tout de même rester motivé car ce n’est que le début de l’aventure et demain m’attend une étape plus difficile encore. Il faut aussi que je vous parle des sentiers, la plupart sont praticables, mais d’autres sont remplis de sapins, de chênes ou de hêtres écrasés au sol, barrant parfois le passage et nous obligeant à faire des détours par la forêt, ou à escalader les arbres en eux-mêmes. A compter des chutes nous en sommes à 2-0 : zéro pour moi et 2 pour Laurienne. Ce soir, nous sommes accueillis au gîte “Le refuge”. Le propriétaire possède un chiot de trois mois qui est trop mignon.

Demain : Mont Lozère - Mijavols (27)


Laurienne : Journée pluvieuse, “journée heureuse” comme dit un dicton, enfin je crois.

Cette étape nous a mis face aux caprices de la météo et pour la rendre plus piquante, nous sommes passés de 1160m d’altitude à 1413 m pour redescendre à 1099 m et remonter à 1400 m, tout ça en 23 km. Ouh là là les mollets !

La nature est très forte et les efforts payants sur le dernier kilomètre le ciel s’est découvert, nous offrant alors un splendide panorama sur la vallée du Mont Lozère que nous avons à moitié gravi.

Que j'aime ces étapes exigeantes physiquement et moralement, n’est-ce pas là tout le sens de la marche ?

B s’est débrouillé comme un chef, il a gardé le cap, s’est montré déterminé et s’est encore prouvé qu’il était largement capable d’aller au bout de son objectif : 1500 km en 90 jours ! Bravo B pour cette épreuve relevée comme un guerrier.


Vendredi 22 avril : Marvejols

B : Au programme d’aujourd’hui, mon premier sommet : le Mont Finiels (1700 m d’altitude). La vue de là-haut était magnifique. Mais après ce passage, il nous restait encore environ 26 km. Lors d’une descente, nous avons loupé le chemin et nous nous sommes engagés sur un sentier sauvage, rempli de sapins, de pierres et d’hautes herbes. Nous avons tout de même fini par retrouver le chemin initial au bas de la pente. Nous avons déjeuné sur des rochers avec une vue splendide sur la vallée. Après le repas, nous avons traversé le pont de Montvert où nous avons bu une boisson fraîche.

Ensuite, nous nous sommes attaqués au col de la planète où nous avons souffert dans la montée qui menait en haut de la colline. Vue extraordinaire. Nous sommes ensuite redescendus à Marvejols là où nous logeons pour la nuit avec des gens très chaleureux. Demain Marvejols ---> Florac


Laurienne : Comme dit mon compagnon de route B : oh mon dieu…. la côte !

Eh bien…. Comment expliquer qu’aujourd’hui nous avons parcouru 28 km extrêmement physiques, mais quelle journée fantastique, heureusement accompagnée par le soleil, sensationnelle !

Des paysages, des sentiers sauvages qui nous ont demandé vigilance et des efforts, mais nos yeux, nos pieds, nos jambes ont, en ce jour, vu et ressenti tellement d’intensité, qu’il m’est difficile de décrire ces moments. Il faut le vivre pour le comprendre.

Et une fois n’est pas coutume, nous passons de surprise en surprise. Ce soir, c’est ambiance refuge de montagne, petite maison en pierre, feu de cheminée avec l’odeur qui va avec, une douce soirée comme je les aime avec en plus un groupe de marcheurs fort sympathiques.

PS. Bravo B, un guerrier est vraiment en train d’éclore.


Samedi 23 avril : Florac

B : Aujourd’hui, la marche a été annulée suite à la tempête et à l’état de mes chaussures.

Quand je parle de tempête, ce n’est pas une pluie fine et une brise légère. Oh non ! C’est plutôt de grosses gouttes de pluie avec le vent qui te balade de droite à gauche. Il y a même eu de la neige ! Quant à mes chaussures, elles étaient littéralement éventrées. C’est pour cela que l’étape d’aujourd’hui a été annulée. Nous avons pris un taxi où la chauffeuse se croyait sur le circuit de la coupe “champignon” de Mario Kart. Elle a failli me faire vomir.. Ensuite, nous sommes allés à la poste où Laurienne n’arrivait pas à ouvrir la porte. Et moi, j’étais derrière et je me marrai dans ma barbe, même si je pense que je n’aurais pas fait mieux qu’elle. Nous sommes ensuite allés faire des courses et puis nous nous sommes enfin dirigés vers notre lieu de repos. Le propriétaire du camping “Val des Cévennes” nous a surclassés, car vu le temps, nous n’aurions pas eu chaud dans le chalet qui nous était destiné au départ. Nous sommes donc en mobil-home avec des chambres séparées. Le bonheur ! Demain journée de repos à Florac, en espérant que le temps s’améliore


Laurienne : Il est 3h du matin : le vent souffle fort, très fort à l’extérieur. Qu’est-ce que je suis bien au fond de mon lit.

Boom, la porte vitrée de notre dortoir s’ouvre d’un coup, je me lève, je la referme. A peine un pied sous la couette…. Boom mais cette fois ailleurs. Personne ne bouge dans ce gîte, tout le monde dort comme des bébés. “C’est pour ma pomme”, je fais le tour des fenêtres et des portes de la maison, j’ai bien fait, la porte d’entrée était ouverte, je la referme.

Je me remets enfin dans mon lit, mais j’ai une crise de démangeaison. Ça me gratte, je vais devenir dingue. Petite confidence, cela fait presque une semaine que le soir, uniquement le soir, mon corps me démange et jamais au même endroit. Mystique ! Un peu de crème, d'huile essentielle et cette fois dodo.

Le vent souffle toujours aussi fort, voire plus à l’extérieur.

Comme à mon habitude, je me lève aux aurores, c’est mon normal à moi. Je ravive le feu, quel bonheur la cheminée, mais le vent souffle toujours autant et la pluie commence à tomber elle aussi. Je regarde les chaussures de B, qui sont depuis hier, ouvertes “comme un livre” sur le dessus, ça m’inquiète un peu.

Le gîte se réveille petit à petit et une marcheuse me montre une trouvaille faite sur sa couverture. Une punaise de lit : Je ne panique pas pour ne faire paniquer personne, mais des punaises de lit pendant une marche c’est vraiment vraiment la galère ! Je pense à mes crises de démangeaisons, mais c’est pas possible, je ne me gratte que le soir, mystique, je vous dis !

Bon, je résume, l’apocalypse s’abat sur nous, les chaussures de B sont mortes et suspicions de punaises de lit. J’aime pas ça, mais aujourd’hui, on capitule, faut savoir s’adapter.

L’autre groupe de marcheurs décide de prendre un taxi, on en profite.

Mais la chauffeuse conduit comme si on faisait un rallye automobile, je m’accroche où je peux, je sens que la dernière tartine à la crème de châtaigne remonte mon œsophage et maintenant, elle envoie un texto…..Enfin, Florac, on va pouvoir descendre de ce satané taxi, c’est promis, à partir de ce jour, c‘est à pied que l’on fera nos étapes et quoi qu’il arrive : Mais la journée n’est pas finie, il faut encore trouver de nouvelles chaussures… ça c’est facile, ouf !

Bon maintenant, direction la pharmacie car me gratter comme un petit chien me tape sur le système. C’est une simple allergie due à mon savon (probablement) ouf !

Dernière étape, trouver le gîte… 1 km à pied et on ressemble à des éponges, la Lozère ça déconne pas.

Allez, derniers efforts, nous sommes arrivés, on peut se mettre au sec, vérification de nos affaires, pas de petites bestioles, ouf ! On peut souffler.

Que d’aventure,what dans l’aventure, bienvenue à Seuil.


Dimanche 24 avril : Florac

B : La panne d’inspiration est un des pires ennemis de l’écrivain, si ce n’est pas la plus grande. Elle fait perdre le fil conducteur de l’histoire qui est en train d’être écrite, elle nous envoie sur des nouveaux sentiers, alors que le chemin précédent n’a pas encore fini d'être exploré. Elle peut aussi nous faire perdre nos mots, alors que vous les aviez la veille. Bref, un vrai calvaire. Le plus dur est de faire revenir l’inspiration. Très éprouvant, car il faut réfléchir, aller au plus profond de notre pensée, ne pas s’arrêter aux frontières, mais pénétrer en “territoire hostile”. Pourquoi je vous dis cela ? Et bien tout simplement car c’est ce qui m’arrive actuellement. Aussi bien pour le roman que je suis en train d’écrire que ma propre imagination ou encore l’écriture de ce blog. Pour ne rien arranger aux choses, la météo n’est pas en notre faveur : vent violent, forte pluie et parfois même du tonnerre. Cette journée de repos n’en fut tout de même pas moins relaxante : sieste une bonne partie de l’après-midi était à mon programme. En parlant du programme, ce soir : résultat des élections présidentielles 2022 et pizza.

Demain, nous repartons sur les routes, en espérant que la météo soit plus clémente.

Demain : Florac ---> Barre des Cévennes (15 km)

A noter que nous sortons du chemin de Stevenson pour rejoindre le GR 43, faute d’hébergement à Cassagnas


Laurienne : Nos ancêtres sont Nubiens (Haute Egypte) et Somaliens. Après plus de 5000 ans, nos semblables sont les compagnons de l’homme et ses serviteurs. Malgré cela, on dit de nous que nous sommes des êtres têtus et stupides. Qui suis-je ? Alors une idée ? Ben voyons ? Modestine, la célèbre ânesse de R.L. Stevenson.

Blague carambar à part, aujourd’hui je voulais raconter un peu de Modestine qui sans elle notre cher écrivain aventurier n’aurait pu entreprendre et réaliser une telle marche, surtout à son époque. Stevenson l’achète sur la place du marché de Monastier sur Gazeille juste avant de partir. Comme elle ne lui a pas coûté beaucoup d’argent, juste un verre d’alcool et quelques pièces, il l’appelle Modestine. Les débuts sont chaotiques, l’ânesse marche vraiment très très très doucement. Il est obligé de rester à côté d’elle car s’il a le malheur d’avancer trop vite, elle s’arrête et mange de l’herbe. Lorsque Stevenson prend un chemin, Modestine part dans l’autre sens. Un jour, elle tombe même amoureuse d’un autre âne et préfère passer du temps avec lui. Ah le coeur a ses raisons !

Heureusement, ils finissent par se comprendre, par s’apprivoiser. Ensemble, ils ont monté et descendu des côtes pour traverser des chaînes de montagnes, ils ont marché dans des cailloux, ils ont affronté la boue et la pluie. Ils ont surtout fait 220 km à pied. L’écrivain écrira d’elle :

“Une ânesse en miniature, guère plus grosse qu’un chien, d’un gris souris, au regard bienveillant et une mâchoire résolue. La mâtine avait quelque chose de propre, de distingué, d’élégant sans affectation, qui flattait immédiatement mon imagination.

Ses défauts étaient de sa race ; ses vertus étaient bien à elle”... Un lien ?”


Lundi 25 avril : Barre des Cévennes

B : Les difficultés de la reprise sont présentes, comme l’envie de rentrer chez moi. Aujourd’hui a été particulièrement compliqué. Entre fatigue et lassement, la tension que je ressentais était à son comble. J’ai même évoqué l’envie de rentrer chez moi à Laurienne. Elle a réussi à me faire renoncer, mais cette idée est toujours, malheureusement, bien présente et le sera, je pense, dans les jours à venir.

Aujourd’hui, nous sommes hébergés dans un gîte d’étape à Barre des Cévennes…avec une ambiance un peu oppressante pour moi : il y a des trophées de chasse dans la salle commune. Minimum un sur chaque mur, ce qui nous laisse l’impression d’être observés à chaque instant. De plus, je suis un amoureux des animaux, donc ça me met assez mal à l’aise de voir ces têtes d’animaux accrochées au mur.

Ah oui dernière chose ! J’ai retrouvé l’inspiration et j’ai commencé à écrire le chapitre de mon roman.

Demain : Barre des Cévennes ---> Pont de Burgen


Laurienne : Notre détour par le GR 43, par ailleurs splendide de bout en bout, nous a conduits vers un étonnant village. A l’abri du Castelas (butte en pierre calcaire, Barre des Cévennes est organisée le long de la grand’rue (seule et unique rue du village). Un alignement de maisons aux façades bourgeoises témoigne d’un passé riche. Cité des foires au XV°s, Barre des Cévennes était le lieu de rencontres entre marchands du Gévaudan et ceux de la plaine languedocienne, favorisant les échanges de produits, mais aussi d’idées. C’est aussi ici que fut fomentée l’opération de libération des prisonniers huguenots (protestants) détenus à Pont de Montvert en 1702. Cette attaque marque le début de la guerre des camisards (rebelles protestants), ce village est également le lieu de naissance du célèbre camisard et prophète Elie Marion (1678-1713), haut-lieu administratif, économique et religieux, Barre des Cévennes nous apparaît aujourd’hui désertique et pauvre. Quel dommage, une telle histoire et un aussi beau cadre de vie laissé à l’abandon.


Mardi 26 avril : Pont de Burgen

B : Aujourd’hui, malgré une étape assez calme, mon envie de rentrer chez moi a été très prononcée toute la matinée. Je sentais que je pouvais dire à Laurienne “on arrête tout, je rentre chez moi en train, même en stop s’il le faut”. Mais cette phrase n’est pas sortie de ma bouche. Je me résignais en pesant le pour et le contre. Pour ne pas améliorer la situation, mon humeur était, comment dire, mauvaise : j’ai ignoré Laurienne à quelques reprises lorsqu’elle me racontait ou demandait des choses, j’étais fermé, ne parlais pas ou peu Un vrai caractère de cochon. Ma bonne humeur est revenue après la pause de midi. Le sourire aux lèvres, un minimum concentré sur la route, j’étais prêt à tout surmonter. Les nombreuses rencontres faites aujourd’hui m’ont aussi reboosté

J’aimerais vous avouer aussi quelque chose ; cette marche serait un peu plus motivante et agréable avec une personne du même âge que moi à mes côtés. Les interactions avec d’autres jeunes me manquent, mais je sais qu’elles reviendront plus vite que je ne le pense.


Laurienne : Météo idéale, aujourd’hui pour randonner au milieu des forêts de pins et de châtaigniers. Nous sentons le climat méditertrannéen se rapprocher à chaque pas que nous faisons. Nos semelles qui foulent cette pierre de schiste, éblouissante au contact des rayons de soleil, nous transportent au cœur des Cévennes. Pays riche d'histoires aux paysages si sauvages, si verdoyants en cette saison où les odeurs et la nature s’éveillent peu à peu. Je profite amplement de cette douceur de vivre que dégage cet endroit reculé aux habitants si souriants et si épanouis dans ce cadre de vie. Pourtant si attachée à mes terres natales, je me surprends à penser que je pourrais vivre ici, dans ces petits villages, au milieu de terrasses accrochées au flanc de la montagne. Terrasses qui jadis cultivées par nos aïeuls reprennent vie grâce à la volonté de ses nouveaux habitants.

Quel voyage, en ce jour, m’est donné de faire. Pas besoin de grand chose, des chaussures et un sac, pour enfin toucher du doigt ce bonheur tant prisé.


Mercredi 27 avril : Mialet

B : Aujourd’hui, mon moral n’a pas été impacté.

Cette stabilité est sûrement due au fait que nous avons passé toute l’après-midi avec un groupe de personnes retraitées qui empruntent tous, comme nous, la voie de Stevenson. J’ai discuté de tout et de rien avec chaque personne présente dans ce groupe. C’était un très bon moment..

De plus, nous avons fini de marcher dans les pas de Stevenson et Modestine, car nous avons passé Saint Jean du Gard, leur ultime étape. Il ne nous reste qu’une étape pour terminer officiellement le Stevenson ce qui sera fait demain : Mialet - Alès.

Ce soir, nous avons été accueillis par Lizou, la propriétaire du gîte où nous logeons. Son terrain est immense (14 ha, ce n’est pas rien), elle a des moutons, des poules, des canards. Bref, le bonheur. En plus, le cadre autour de la maison est magnifique avec des montagnes entourant la bâtisse.

Demain : Mialet ---> Alès (20 km)

A noter que nous sommes à environ 2 km avant Mialet


Laurienne : Soleil, chaleur, partage, rencontres sont les mots clés de cette journée. Après une étape riche d’échanges, nous faisons halte dans un vrai havre de paix, un mas cévenol au milieu d’une nature luxuriante loin du bruit, de la civilisation.

Accueillis avec un sourire et une simplicité par Lyzou et Florian, nous découvrons une maison et ses annexes, (une clède pour faire cuire les châtaignes), une magnanerie (pour élever les vers à soie), un four à pain. Un lieu restauré par leurs propres mains en utilisant des matériaux typiques de la région et des techniques de constructions ancestrales. Plein de courage et d’envie de faire revivre ce lieu, ils ont à cœur de le partager et de le raconter aux curieux de passage.

Vous l’avez compris à travers ces quelques mots, votez donc mon coup de cœur, venez vous ressourcer au Mas Cambon de Mialet en plein cœur des Cévennes pour un week-end ou plus. Mais dépêchez-vous car bientôt, j’en suis sûre, passage incontournable, il deviendra. Merci pour ce repos qui nous est, chaque soir, si important


Jeudi 28 avril : Alès

B : L’ultime étape du chemin de Stevenson se trouve être particulièrement éprouvante : montées, descentes, escalades… Il fallait beaucoup de mental pour y arriver. La pire chose qui soit est que nous voyons notre destination de loin, mais plus l’on marche, moins elle se rapproche. Cependant, nous avons eu des paysages à couper le souffle. Il faut aussi dire que Stevenson n’aurait pas pu passer cette étape avec son ânesse, car certains passages sont inaccessibles.

Ce soir, pour nous récompenser d’avoir terminé le chemin, nous avons dîné au restaurant de l’hôtel : c’était très délicieux et les plateaux étaient gigantesques. Je ne vous cache pas que lorsque j’écris ce blog, j’ai envie de dormir à cause de l’étape d’aujourd’hui. Cette envie est renforcée par la venue de l’étape de demain : Alès ---> Saint Génies de Malgoires (30 km) Première étape défi.


Laurienne : Ca y est aujourd’hui, nous avons terminé le chemin de Stevenson. 272 km parcourus du Puy en Velay à Alès, quatre départements traversés : Haute-Loire, Ardèche, Lozère, Gard. Les régions locales : Le Velay, le Mont Lozère et les Cévennes. Autant d’histoires, de rencontres, de galères, de rires et de souffrances. Mais quel chemin, aussi littéraire que sportif.

Cette première étape réalisée ensemble nous lance immédiatement avec entrain vers la suite de cette aventure qui, j’en suis sûre, sera aussi pleine de surprises et surmontée avec honneur par notre B qui devient un vrai marcheur, un peu plus tous les jours.


Vendredi 29 avril : Saint Genies de Malgoires

B : Aujourd’hui, l’étape défi a été compliquée, car j’ai dû dépasser mes limites pour pouvoir aller jusqu’au bout. Le paysage, malgré la végétation, n’était pas très inspirant non plus : nous avons longé des routes pratiquement toute la journée. Il faut dire aussi que ma nuit a été chaotique à cause de la chaleur quasi étouffante présente dans la pièce. Sur le début de cette étape, nous avons traversé un village, nommé Vézenobre où nous nous sommes arrêtés pour manger

A la fin du repas, Laurienne est partie prendre un café et est revenue avec une galette bretonne au caramel beurre salé, réalisée par un breton. Cette galette m’a rappelé la Bretagne, mes origines et m’a reboosté pour le reste de l'étape. Nous avons aussi traversé le Gard par un pont pour piétons : la vue était belle, mais le Gard peu profond. On pouvait apercevoir les fondations du pont sur lequel nous nous trouvions.

Ce soir, nous sommes hébergés dans un hôtel assez sympa : le restaurant par lequel nous sommes passés pour assister à la réception avait un plafond voûté, on aurait dit un sous-sol d’église ou encore une cave à vin. J’y ai d’ailleurs mangé une bonne glace pour le dessert. Je vais conclure par le fait que je me sens content, fier d’être allé au bout de cette étape de 30 km.

Demain : Saint Geniès de Malgoirès ---> Dions (14 km)


Laurienne : Vous connaissez la série “Bref” qui passait sur canal+ ? C’est ma petite anecdote du jour.

Je marchais, vous vous en doutez, tranquillement mon regard scrutant les pierres, les arbres, les poteaux ou le moindre indice d’une bâtisse.

Ah oui ! J’ai oublié de préciser que nous avons entamé la fin du GR 700 appelé aussi Sentier de la Regordane ou Chemin de Saint Gilles. Moins bien marqué, il demande de la vigilance.

Pour revenir à mon histoire, je suis donc en train de marcher et là, je me fige, mon cœur s’emballe, mes yeux s’écarquillent, une couleuvre se trouve en face de moi. Figée aussi, la tête levée tel un cobra du désert, nous sommes nez à nez, comme deux potiches aussi trouillardes l’une que l’autre… Elle me regarde, je la regarde. Bref, on se regarde ! Et chacune reprend sa route.

Vous imaginez la scène, en y repensant, c’est à mourir de rire


Samedi 30 avril : Dions

B : Aujourd’hui, petite erreur sur la marchandise : nous avons parcouru 22 km au lieu des 14 km notés sur la feuille de route.

Ma mauvaise humeur est donc arrivée et les paysages n’ont rien changé. Nous avons encore quasiment longé que des routes où les automobilistes roulaient comme s'ils se croyaient dans Fast and Furious. Ma colère s’est déversée sur un automobiliste qui m’a frôlé à quasiment 100 km/h. J’ai hurlé “t’as des freins” Je ne vous dirai pas la suite, car c’est trop vulgaire, mais vous vous en doutez quand même.

Arrivé sur la fin du parcours, le paysage est devenu plus sauvage avec des sentiers caillouteux.

Ce soir, nous sommes hébergés en maison d’hôte où la propriétaire est, comme ceux d’avant, adorable. J’ai aussi reçu mes nouvelles lunettes, ainsi que deux de mes romans que j’attendais tant.

Demain : Dions ---> Nîmes (21 km) en espérant que le guide a bien calculé et qu’on ne finisse pas avec 40 km dans les pattes).


Laurienne : Depuis deux jours que nous sommes sur le GR700, mon esprit est encore sur le chemin de Stevenson. Je vous avoue que ce sentier, pour l’instant, ne me transporte pas. Nos chaussures tapent sur l'asphalte des petites routes que nous suivons. Nos corps souffrent de la chaleur, du manque d’ombre et nos pieds gonflent dans nos chaussures qui nous paraissent d’un seul coup trop petites. Mais c’est ainsi que la marche fonctionne faite de hauts, de bas, d’adaptations, de frustrations et même de deuil d’endroits magiques et des gens rencontrés..

Allez, demain c’est Nîmes et son arène, quelles surprises nous attendent là-bas ?


Dimanche 1er mai : Nîmes

B : Aujourd’hui, nous avons atteint Nîmes où nous avons une journée de repos. Malgré la chaleur, j’ai trouvé cette étape assez courte. Sur le chemin, Laurienne m’a proposé d'aller au cinéma, le soir. J’ai accepté avec plaisir. Arrivés dans notre appartement ou plutôt celui que nous louons pour deux jours, nous nous sommes mis d’accord sur le film. Notre choix s’est arrêté sur un film de catégorie humoristique nommé “En même temps”. Il raconte l’histoire de deux politiciens qui ont été piégés par un groupe de féministes et l’une des membres de ce dernier a collé nos deux protagonistes qui, vous l’avez deviné, ne s’entendaient pas. Ce film était très drôle. J’ai rigolé à plusieurs reprises, était gêné quelques fois, mais j’ai quand même passé un super moment.

Ce soir, au programme détente. Et demain : repos


Laurienne : Je sais, hier, je me suis un peu plainte. Mais qu’est-ce que vous voulez, il y a des fois où il est nécessaire de verbaliser ou plutôt d'écrire sa frustration.

Aujourd’hui, nous souffrons de la chaleur, mais au milieu de la garrigue camarguaise, ça change !

D’ailleurs, surprise, l’arrivée à Nîmes est étonnante, c’est une ville incroyablement verte, il y a des jardins, des arbres, des squares un peu partout. Elle dégage “le bon vivre du Sud”. Elle paraît agréable, à échelle humaine, si je peux dire. De plus, son architecture, son arène impressionnante et les vestiges de son passé glorieux me donnent envie d’y flâner, de la connaître. Ça tombe bien, demain est un jour de repos. A nous Nîmes et son histoire !


Lundi 2 mai : Nîmes


B : Aujourd’hui, journée de repos à Nîmes. Nous avons visité les arènes avec Laurienne. C’était très intéressant. On a appris l’histoire de ces arènes. Pour ma part, on m’a révoqué les préjugés que j’avais sur les gladiateurs. Et j’ai aussi appris qu’il existait plusieurs sortes de ces combattants. Nous avons ensuite mangé une glace en terrasse, puis nous avons flâné dans les rues de Nîmes où j’ai pu acheter une paire de mitaines qui va avec le style vestimentaire que je veux porter quand je reviendrai de ce séjour. J’étais hyper content lorsque je les ai vues. Enfin, nous sommes rentrés pour préparer le repas de ce soir. Mon nouveau nom pour cette soirée, c’est Bocuse. Je rigole, bien entendu. J’ai donc, au moment où j’écris ce blog, préparé l’entrée, une salade de crudités et le dessert, une tarte aux pommes. Il ne me reste plus que la FLamenkuche (spécialité flamande) à préparer. Demain, reprise de la marche : Nîmes ---> Saint Gilles (27 km)


Laurienne : Vous connaissez Nîmes ? Non ! D’abord celte au 6°s avant Jésus Christ, puis romaine, Némausa comme il la nomme deviendra un avant-poste de leur empire. Un amphithéâtre (arènes) verra le jour, un temple romain appelé Maison Carrée sera édifié, mais également un aqueduc à trois niveaux actuellement le Pont du Gard. Ces trois monuments en parfait état témoignent de la prospérité de cette ville antique. C’est fascinant de pouvoir toucher, voir de tels édifices datant de 2000 ans. Mais, bien sûr, son histoire ne s’arrête pas là, au moyen âge, ville moins prospère et l’insécurité faisant rage dans la région, sa population se réfugie dans l’enceinte de son arène. De la renaissance au siècle des lumières, devenue protestante, elle s'enrichit grâce au commerce. C’est au 19°s que l’industrie du vignoble se développera. Aujourd’hui, elle tend à devenir une place forte de l’art contemporain et est devenue un site touristique et attractif du sud de la France. Bien évidemment, ces arènes ne sont plus utilisées comme au temps des gladiateurs et de leurs combats sanglants, mais accueillent maintenant concerts, spectacles ou évènements sportifs. Elle en aura vu passer des vies et vécu divers bouleversements durant sa longue existence.


Mardi 3 mai : Saint Gilles


B : Aujourd’hui, “Tension” était mon invitée. J’ai été fermé toute la matinée à cause de l’envie folle de rentrer à la maison. Je me suis ravisé en me disant que je perdrais plein de choses en faisant cela. Sinon, le paysage n’a pas changé : vignes, champs d’oliviers et surtout, du bitume : tout ce que j’aime ! Non, c’est absolument faux ! Je préfèrerais d’autant plus les petits sentiers remplis de cailloux, avec du dénivelé important, du chemin de Stevenson. De toute façon, ce seront les paysages des jours à venir, il ne faut pas se leurrer. Jusqu’à la voie du Piémont, du moins. En parlant de la voie du Piémont, nous avons, ou plutôt Laurienne, a réussi à trouver la jonction permettant d’accéder à la voie du Piémont par celle de Arles. Ce soir, premier essai en dortoir. Pour l’instant, ça n’est pas trop mal. Je bavarde avec des gens de sujets divers et variés. Demain : Saint Gilles --->Vauvert (17 km)


Laurienne : Étant dans ma période “je suis une historienne”, je vais vous conter le chemin de Régordane GR 700 que nous avons emprunté entre Alès et Saint Gilles, voie millénaire de commerces et d'échanges, naturellement présente dans la grande faille du Massif Central, elle relie le Puy en Velay à la voie Podiensis à Saint Gilles du Gard, ainsi que la voie Tolosane vers Compostelle, voie sacrée de l’antiquité, chemin de pèlerinage de Saint Gilles presque plus important que celui de Saint Jacques au moyen-âge, elle est aussi chemin des libertés, de la résistance et de la libération lors de la seconde guerre mondiale. Malheureusement peu fréquentée, elle est délaissée par les chemins dits jacquaires . Et malgré ce passé glorieux, j’avoue que l'arrivée dans cette ville m’a troublée car rien, à part les vestiges d’une abbaye fondée par Saint Gilles, ne témoigne de son histoire mythique et finalement légendaire.


Mercredi 4 mai : Vauvert


B : Aujourd’hui petite étape de 17 km en compagnie de Sylviane, une très gentille dame. Nous nous suivons sur plusieurs étapes. J’ai aussi rencontré Coco, une dame, mais alors, c’est tout un personnage : je la voyais se perdre lorsque j’étais assis en train de manger. Deux minutes plus tard, elle sortait d’un buisson…. Fin. bref ! J’ai aussi commencé à mettre mes mitaines en public. Ce soir, nous sommes hébergés dans un gîte d’étape assez atypique : des box à chevaux réaménagés en chambres. Désolé, ce soir, je n’ai pas trop d’inspiration. Demain : Vauvert ---> Saint Christol (25 km environ)


Laurienne : Une soirée, une nuit, une étape et un chemin dit jacquaire et pâle remake du film Saint Jacques La Mecque. En marchant hors saison et l’été sur le côtier de Bretagne, j’avais oublié comment on peut se marrer, s’agacer, s’espanter (expression qui veut dire étonner) des fameux pèlerins que l’on peut croiser à tout moment. Je crois qu’en 24h, j’ai côtoyé un éventail assez complet de ces personnages que l’on pourrait penser de fiction. Je vous assure, ils sont réels ! La bienheureuse qui, sourire aux lèvres, est persuadée que tout le monde est dans un état d’extase total et le déverse encore et encore à qui veut l’entendre ou pas ! Celui qui erre sans fin sur les nombreux chemins et qui te demande où il peut dormir sur le chemin catalan, alors que l’on est sur la voie d’Arles, direction Toulouse, et qu’il a une tente dans le sac… ou est l’erreur ? Le novice qui pour x ou y raison lâche tout pour réfléchir, mais qui finalement marche sans réfléchir ou trop peut-être et se met à te suivre pour plus se perdre ou il a déjà parcouru 30 km au lieu de 10, à mon avis celui-là il n’est pas rendu comme on dit. Mais dans tout cela, il y a toujours des marcheurs formidables, qui eux, partagent avec toi juste l’instant présent sans rien demander en retour…. Finalement c’est ça les chemins de Compostelle, cette énergie un peu folle qui s’appelle l’Humanité


Jeudi 5 mai : Saint Christol


B : Aujourd’hui, longue étape de 25 km environ en compagnie de Sylviane. Le matin, avant de partir, Didier, notre hébergeuse, nous a offert le croissant. C’était très gentil. Nous sommes ensuite partis et nous avons marché plusieurs kilomètres avant d’arriver devant une grande bâtisse. Didier nous avait prévenus que le GR avait été détourné et donc “rallongé” et qu’il avait créé un raccourci. Nous avons donc suivi les flèches qui indiquent ce fameux raccourci et nous sommes arrivés en pleine propriété privée. Mon angoisse a commencé à monter, sachant que nous n'avions aucun droit d’être ici. J’ai tout de même suivi Laurienne qui s’était aventurée plus loin au cœur de la parcelle. Mon angoisse s’est intensifiée lorsqu’une jeune femme s’est montrée pour nous expliquer que nous étions sur son terrain. On a donc poursuivi les recherches en vitesse et nous sommes tombés sur le chemin dont Didier avait fait mention. Plus tard, nous nous sommes rendus compte que ce raccourci n’en était pas un. Bref, nous avons aussi retrouvé Coco lors de la pause déjeuner puis nous sommes repartis sur le chemin. Quasiment arrivés à destination, nous avons dû traverser un rond-point où j'ai failli finir en crêpe bretonne.

Ce soir, nous sommes hébergés au gîte communal de Saint Christol. Nous avons rencontré Rose, une autre marcheuse, et nous nous sommes fait plaisir sur le repas : asperges, gardiane de taureau mijotée, une spécialité camarguaise, des pâtes au piment d’espelette et du comté. Demain : Saint Christol ---> Montpellier (30 km)


Laurienne : Le soleil étant moins intense ces derniers jours, nous marchons enfin dans des conditions agréables, nous retrouvons aussi un peu de relief, ce qui n’est pas pour me déplaire. J’aime le vin, mais traverser des vignes et des vignes ponctuées par des cultures intensives d’abricots déjà gros comme des melons, c’est un peu morne. Mais positivons, nous passons également dans des rues de petits villages à la pierre blanche calcaire bien typique du coin où les habitants, ici et là, entretiennent de vieux rosiers aux odeurs enchanteresses. Nous y voyons des oliviers, des amandiers, malheureusement pas encore à maturité, dommage ! Et je n’oublie pas les figuiers de barbarie qui poussent ici comme la mauvaise herbe. Il y en a partout

Vendredi 6 mai : Montpellier


B : Aujourd’hui, étape sous ma colère. J’ai été fumer quasiment tout le trajet. J’ai été même durant une bonheur, déterminé plus que jamais à prendre un train pour rentrer. Ce fut, lorsque mon mal de dos qui avait émergé depuis déjà plusieurs heures, me fit m’arrêter et que Laurienne ai appliqué de la pommade sur l’endroit où j’avais mal, que l’idée du train s’est estompée. Laurienne parlait tellement gentiment et calmement malgré ma colère que j’ai déversé sur elle, que j’en restais sans voix. Je lui avais mal parlé, ignoré, limite crier dessus, et elle était toujours là à m’appliquer de la pommade ! Il faudra encore du temps pour que je vois les effets bénéfiques de cette marche, mais je vais finir par y arriver. Ce soir nous dormons accompagné de Sylviane, dans un hôtel. Nous avons dîné ensemble. À un moment donné, un groupe de golfeur est arrivé à la réception et ont crié sur la pauvre réceptionniste, une femme très gentille. L’envie irrépressible de sauter au secours de cette dame et de renvoyer ces énergumènes de là où ils étaient venus me traversa vivement l’esprit. Demain : Montpellier - Montarnaud, 19 km.


Laurienne : Je crois que pour cette étape, nous avons été les deux seuls marcheurs du jour à traverser, à rentrer dans la ville de Montpellier à pied. En effet, beaucoup préfèrent prendre les transports en commun. Mais nous, comme des vrais de vrai, nous ne cédons pas à la facilité et petits secrets de marcheuse, les entrées dans les grandes villes ont un petit quelque chose de grisant.a Le chemin nous fait passer par des petites ruelles, des escaliers escarpés, on découvre systématiquement des quartiers, des petits passages, Desjardins cacher etc.… Nombre d'endroits que nos yeux ne pourraient voir sans ce petit effort qui est de suivre et subir la circulation, le brouhaha des véhicules. N’oublions pas cette fameuse fierté d’accomplissement total, ne suis-je pas là pour que B. découvre ces émotions, ces sensations toujours un peu euphorisantes. Ah, nous voyons la place de la comédie, sa fontaine, son opéra, encore quelques mètres et nous pouvons profiter pleinement de son effervescence.


Samedi 7 mai : Montarnaud


B : Aujourd’hui, je n’ai pas grand chose à dire; nous sommes toujours accompagnés de Sylviane. Nous avons, malgré la chaleur, passé une étape. Et mon énervement monte de plus en plus car Laurienne n’arrête pas de répéter les mêmes choses à longueur de temps… Le jour où ça va sortir, il ne vas pas falloir être dans les parages car je pourrais m’en prendre à tout le monde sans exception, bref ! Ce soir nous sommes en dortoir pour la 2ème fois. Demain, Montarnaud-Saint Guilhem le Désert 23km.


Laurienne : Enfin des chevaux, eh oui, depuis que nous sommes en Camargue je n’en avais pas trop vu. Je sais que je fais un stéréotype mais pour moi Camargue = chevaux. C’est donc chose faite, aujourd’hui, nous avons traversé de nombreuses propriétés dissimulées dans la Garrigues. On y a vu de jolies équidés au pelage magnifique parfois d’un blanc immaculé, certains avec des tâches noires ou marrons que l’on pouvait confondre avec un tissus posé sur leurs corps. Avec des queues bicolores et des crinières que des coiffeuses rêveraient de voir, une hauteur au garrot m’arrivant à la poitrine, faut dire que moi je suis pas très haute ! Des bêtes somptueuses aux déplacements gracieux, peut être faisaient elles un spectacle en remarquant que nous les admirions ? J’aime à le croire …


Dimanche 8 mai : Saint Guilhem le Désert


B : Aujourd’hui, étape sous le signe de la bonne humeur. Très motivé, j’ai été assez attentif, mise à part quelques moments d’absence. La veille, j’avais dit à Laurienne qu’elle m’énervait et elle s’est donc adaptée. Ce matin, silence complet, aucune parole.


Laurienne : Direction Saint Guillems le désert, notre halte du jour, nous traversons le pont du diable qui surplombe les splendides gorges de l’Hérault je ne peux pas écrire mon blog sans partager la légende de ce point « lorsque les travaux démarrent , toutes les nuits, le travail accompli durant la journée est détruit. Guilhem D’orange (fondateur du village cousin de Charlemagne) découvre que c’est le diable en personne, qui vient, chaque nuitée, détruire l’avancement du pont. Il lui propose alors un pacte. Si le diable construit un pont très résistant et en trois jours seulement, Guilhem s’engage à lui offrir en échange l’âme de la première créature qui franchira le pont. Le diable construira donc le pont, comme convenu, mais Guilhem s’arrangera pour que la première âme qui franchisse le pont soit un chien. Éperdu de colère, le diable tente de détruire ce pont qu’il a lui-même construit mais n’y parvient pas et par dépit se jette par-dessus ! »

Cette légende vous parle ? Moi oui, un pont du diable et sa légende, quasi identique existe à côté de chez moi ! Sacré diable, il aura tenté plusieurs fois et dans différents lieux de chaparder des âmes mais sans grand succès !


Lundi 9 mai : Saint-Jean de la Blaquière


B : le retour des reliefs ! Quelle joie ! Bon après, les mollets chauffent dans les montées, mais quelle sensation de fierté lorsque j’arrivé en haut, le paysage est magnifique, relief avec un voile de brume, ou encore les villages en contrebas de la montagne. Ce matin, nous sommes partis tôt, pour avoir la fraîcheur de la matinée et marcher plus. Car vers midi, la chaleur était présente : on le sentait même à l’ombre. Donc, étant donné que nous avons une grosse étape demain, nous partirons à 7h. Ce soir, nous dormons au gîte communal avec les mêmes marcheurs de la veille. Nous avons mangé de bonnes lasagnes maison. Demain Saint-Jean de la Blaquière - Laval de Nize , 28 km.


Laurienne : Tel deux fusées lancées à toute vitesse, nous avons littéralement survolé cette étape que tous les autres marcheurs annonçaient comme ultra physique. Bon nous, nous avons le Stevenson dans les pattes et ça c’est à prendre en compte. L’école ça nous connaît je crois bien que B. devient comme moi, plus il y a de montées, plus il prend du plaisir. Il faut dire que l’effort est toujours récompensé et aujourd’hui nous avons été servi. Le départ de Saint Guilhem le Désert est rude et à la fois extraordinaire. Un chemin escarpé qui grimpe au milieu d’un cirque rocheux mais en même temps à la végétation verdoyante et luxuriante, un plaisir des yeux.


Mardi 10 mai : Laval de Nize


B : il faut que je vous avoue un secret, quelque chose qui me taraude depuis plusieurs heures… J’ai fait ma première chute. Hier. Et je ne suis pas retombé de la façon la plus glamour qu’il soit : en araignée, bras et jambes écartées, ventre vers le ciel, ça nous fait donc 3-1 au compteur des chutes. À part ça, il faut dire que je me suis fait réprimander par Laurienne. La raison : je n’avais plus d’eau car je n’avais pas rempli à fond ma poche. Nous avons donc fait les derniers kilomètres en rationnant l’eau, car Laurienne m’avait donné un peu de la sienne. À un moment, sans me rendre compte, j’ai accéléré. Laurienne l'a remarqué et m'a une fois de plus réprimandé. Malgré cela, pour une fois je me suis pas vexé, car j’avais compris ma faute. Finalement, nous sommes arrivés au gîte. Nous avons patienté près d’une heure et demie, le temps que le propriétaire arrive. Nous étions en demi-pension ce soir, le repas était copieux et délicieux avec plein de produits locaux. Demain : Laval de Nize - le Bousquet d’Orb 10 km.


Laurienne : Il y a des jours, je jetterai notre guide, ils annoncent 26 km et nous en faisons 35… Va savoir comment il calcule les mètres, peut-être à l’anglaise ! Heureusement, étape riche en paysages divers et variés. Nos semelles ont foulé du basalte d’un bleu fascinant, une terre argileuse de rouge intense, se sont frottés aux couches schisteuses et calcaire qui jonchent notre route. C’est dingue comme en une journée la végétation change, passe de forêts de pins, aux forêts de chênes verts, sans bien sûr oublier la traversée de champs de vignes pour terminer notre chemin du jour au milieu d’une vallée reculée remplie de châtaigniers, qui proche de l’Aveyron est une terre d’élevage de brebis et de production de lait destiné à la fabrication du fameux Roquefort.

Finalement, j’ai déjà oublié les kilomètres en plus !


Mercredi 11 mai : Le Bousquet d’Orb


B : Aujourd’hui était une journée tranquille, avec seulement 10 km à parcourir. Nous sommes arrivés au Bousquet d’Orb vers midi, cherchant un coin à l’ombre.

Nous nous sommes posés dans l’allée avec un muret en pierre qui offrait des coins d’ombres, à côté d’un cimetière ( Sylviane où es-tu ?) Pour l’anecdote, Sylviane, avec qui nous avons voyagé quelques jours plus tôt, aime bien se promener dans les cimetières. Nous avons mangé et nous sommes partis vers le gîte où nous logeons. Il était aux alentours de 14 heures lorsque nous sommes arrivés et j’en ai profité pour me poser. Lors de notre séance d’étirements, une guêpe fait son apparition, forçant Laurienne à se réfugier dans la maison (car nous étions dehors) en faisant des sauts de cabri. J’étais littéralement mort de rire… Plus tard, nous avons préparé le repas ensemble et dégusté avec plaisir : il était composé de protéines (œufs), de légumes et de féculents (pâtes). Un repas des plus équilibré. Demain le Bousquet d’Orb–Saint-Gervais sur Mare, 24 km.


Laurienne : Je suis déçue aujourd’hui, je ne suis pas inspirée, pas de blagues Carambar, pas d’anecdotes, pas de coup de cœur… j’ai le fameux syndrome de la page blanche de l’écrivain. Pourtant l’ennui est que j’ai mon super stylo, mon cahier mais à part vous dire que l’on est comme des sardines, pas au fond d’une boîte mais sur le grill, tellement le soleil tape fort ces jours-ci. Ah si, hier soir accueillis par Veronique dans sa jolie maison, nous avons passé une soirée loin de tout, complètement déconnectée du monde moderne dans un hameau appelé le Val de Nize où vit exactement quatre personnes, dont trois de la même famille. Je parie qu’il y a plus de chats que d’être humains ! Produits du terroir et de saison sur la table, nous nous sommes régalés d’un repas simple mais délicieux. Une halte reposante comme on les aime tant.


Jeudi 12 mai : Saint-Gervais sur Mare


B : Nous avons clôturé la voie d’Arles aujourd’hui. Nous sommes en repos à Saint-Gervais et nous bifurquerons sur le GR787, vers Capestang, après-demain. La fatigue se fait sentir aujourd’hui dès le réveil et s’est accentué au fil de la marche. Arrivé à Saint-Gervais, j’ai dormi une bonne heure et demie pour pouvoir être d’attaque le soir, car nous sommes allés dîner au restaurant avec Pierre et Sylviane pour nous dire au revoir car eux continuent sur le Camino à Aragonés. Nous avons rigolé, tellement rigolé que j’ai failli recracher le bout de cuisses de canard que j’avais dans la bouche. Nous avons aussi dit au revoir à Saël et Katty, deux autres marcheurs que nous avons suivis. Demain repos à Saint-Gervais.


Laurienne : Aujourd’hui nous avons terminé notre passage sur le chemin d’Arles (GR653), fort de rencontres, de rires, de surprises, nous en garderons des souvenirs plein la tête. Avec en Guest-star, Sylviane, sacré personnage, elle nous aura bien diverti avec ses anecdotes et son goût pour les cimetières. Puis il y a eu Pierre, qui en 13 jours de marche ce sera perdu 13 fois, en tous mes chemins, je n’avais jamais croisé quelqu’un qui se perd autant, je l’ai surnommé « le gars qui marche en spirale ! » Plein de dérision cela l’a bien fait rire. Du coup pour se dire au revoir, nous avons mangé au resto tous les quatre et nous nous sommes payé une bonne tranche de rigolade ! Allez les amis… Buen Camino à vous !


Vendredi 13 mai : Saint-Gervais sur Mare (Repos)


B: la journée d’aujourd’hui n’a pas été très mouvementée : j’ai dormi jusqu’à 10 heures. Lorsque je me suis réveillé, Laurienne partait chercher des provisions pour le midi. Je suis donc resté 1h30 à faire des sudoku, lire Da Vinci code, réorganiser mes affaires et faire la vaisselle : comme si j’étais chez moi, Laurienne est revenue, nous avons ensuite préparé le repas et déjeuné. L’après-midi a été un moment de détente. Je me suis écouté le reste de mon temps de musique et j’ai erré dans mes pensées le reste de la journée. J’ai à un moment penser à rentrer chez moi, ou plutôt lorsque je rentrerai… ça me fait peur. Le quotidien va de nouveau changer, je ne sais pas où je vais être… ce qu’on peut dire c’est que ça va être remue-ménage. Pour ce soir, je me penche sur Da Vinci code… Et au moment où j’écris ces mots, ma frontale clignote pour me dire que sa batterie est faible. Super ! Demain, Saint-Gervais sur Mare - Le Poujol sur Orb 20 km.


Laurienne : J’avais envie de vous parler du chemin d’Arles, ça vous intéresse ? Ce chemin de Compostelle, au départ de Arles en Provence est considéré comme le chemin par lequel transitaient les italiens pour se rendre à Saint-Jacques-de-Compostelle. Cette route qui date du Moyen Âge servait également aux nombreux pèlerins d’Espagne et du Portugal se rendant sur la tombe de Saint-Pierre à Rome. Ce chemin ancestral traversant les trois régions du sud de la France nous offre une belle mosaïque de paysage. Il commence d’abord par nous faire découvrir la Provence et la Camargue avec bien sûr Arles l’antique. Il nous conduit après Montpellier à travers l’Occitanie sur le versant Mary Jono du massif central. Là, nous traversons les monts de Lacaune, dans le parc naturel du Haut Languedoc. On emprunte plus loin le célèbre canal du midi, pour rejoindre Toulouse, la ville rose. Le chemin d’Arles traverse ensuite le Gers puis nous fait découvrir la région Nouvelle Aquitaine. Et enfin les Pyrénées se dressent devant nous, il faut maintenant remonter la vallée d’Aspe pour grimper les portes du col du Somport. La partie française se termine ici mais ce n’est pas fini, c’est maintenant le Camino Aragonés en Espagne qu’il faut emprunter pour rejoindre la route qui mène à Santiago de Compostela… Voilà un trajet qui donne envie, n’invite-t-il pas au voyage ? Qu’en pensez-vous ?


Samedi 14 mai : Le Poujol sur Orb


B : Malgré une étape de 20 km, j’ai eu l’impression que nous en avions fait 10 : nous sommes arrivés vers 11h30 à la fin de l’étape. J’étais agréablement surpris en apprenant cette nouvelle. Il n’empêche que cette étape a été mouvementée : de la pente à foison, des murs de feuilles mortes, ou lorsque l’on marche dedans, on ne sait pas où on va, j’ai failli me casser la figure à plusieurs reprises et Laurienne qui nous a fait une « Pierre Light » (aller voir le blog de Laurienne du 12.05) et a dû courir pour me rattraper. Arrivé à Le Poujol sur Orb, nous avons été boire un coup, mangé notre pique-nique et attendre 13h pour nous diriger vers la maison d’hôtes. Nous avons eu un très bon accueil. Je me suis installé, je suis allé prendre ma douche… J’ai senti le besoin irrépressible de faire la sieste à cause de ma dernière nuit où je me suis endormi à minuit à cause de la chaleur de la pièce où je dormais. D’ailleurs ce matin, je n’étais pas de très bonne humeur à cause de cela et cette mauvaise humeur s’est amplifiée lorsque j’ai réalisé que j’avais perdu le chargeur de ma frontale. Bref, revenons à nos moutons ! J’ai donc fait ma sieste. S’en est suivi le quotidien habituel (courses, étirements…) Et lors de la préparation du repas, la propriétaire de la maison est venue faire un brin de causette. Nous avons mangé et j’ai commencé mon blog dans le jardin sur la terrasse. L’air frais de la soirée m’a fait beaucoup de bien avec la chaleur écrasante de la journée. (28°C). Le soir est pour moi l’instant de plusieurs sentiments et ressenti: la nostalgie où je me remémore la journée que je viens de passer. La paix intérieure, grâce à la légère brise et aux sons environnant que rien ne vient troubler. Et enfin la peur, mais pas n'importe quelle peur. Celle que tous hommes et toutes femmes possèdent au fond de soi : la peur de la mort. Plus jeune, avant de m’endormir, cette idée venait me hanter, tellement que parfois j’en pleurais. Aujourd’hui, cette peur est moins prononcée, mais cette idée traverse toujours mon esprit chaque soir en me posant toujours les mêmes questions : quand vais-je mourir ? Comment ? Qu’y a-t-il après la mort ? Je sais que ces questions resteront sans réponse donc j’essaie d’y penser le moins possible. Demain Le Poujol sur Orb –Cessenon sur Orb 25 km.


Laurienne : Nous sommes en train de boire un coup dans le troquet du coin, je suis assise tranquillement à me délecter de la scène qui se joue devant moi. Le barman et deux clients sont en pleine discussion, ils refont le monde et surtout celui de leurs voisins ! Quand soudain, le patron parle de bouchon, pas de champagne évidemment ! Mais du Cèpe , le bouchon est celui qui fait la réputation de ce champignon si connu de tous. Petits et charnues, il a un goût et une texture inimitable ! Nos deux noms des champignons, je tends L'oreille attiré telle une abeille par un pot de miel et j’entends « apparemment il s’en est trouvé » et parole du patron, c’est Jean-Louis qui lui a dit et Jean-Louis il ment pas ! Vous commencez à me connaître… Devinez l’objectif de demain ?


Dimanche 15 mai : Cessenon sur Orb


B : Je préfère les montagnes russes des attractions que celle des montagnes durant la marche. Monter, descendre, pour remonter et ensuite redescendre… C’était une des étapes les plus fatigantes aujourd’hui. Je vais aussi vous donner un chiffre : huit. C’est le nombre de fois où j’ai failli me ramasser par terre. D’ailleurs, nous en sommes à trois sur deux au compte des chutes, car j’ai chuté aujourd’hui et aussi fair-play que je suis, je ne pouvais pas ne pas le noter. Ce midi, nous avons déjeuné au bord de l’Orb, les pieds dans l’eau et avec un paysage magnifique. En arrivant au camping où nous dormons ce soir, j’ai aperçu une « plage » de galets qui donnait sur les rives de l’Orb. Je suis donc allé tranquillement écrire là-bas. Laurienne est venue me rejoindre et nous avons discuté joyeusement de sujets divers et variés. Je ne sais pas quoi vous dire de plus, à part que les paysages sont toujours aussi magnifiques. Demain Cessenon sur Orb–Capestang, 20 km


Laurienne : Misère dans les sous-bois, bredouille je suis arrivé à la fin de notre étape. Les pâtes sauce Cèpes ce ne sera pas pour aujourd’hui, tant pis ! Par contre, énorme était la douleur que j’ai croisée en cherchant désespérément mon petit boletus. J’en frissonne encore, je ne suis pas une fan des reptiles et de tout ce qui rentre d’ailleurs. Et bien sûr à quelle scène j’assiste ce soir au camping où nous logeons ? Je vous le donne en 1000, le gérant en train de s’occuper du cas d’un serpent un peu trop énervé à mon goût ! Saperlipopette, j’ai dit que je n’aimais pas ça !


Lundi 16 mai : Capestang

B : La chaleur, je la supporte très difficilement, car, comme je vous l’ai dit plus tôt, je préfère le froid. Mais malheureusement, aujourd’hui a été une journée particulièrement chaude, et ça ne va pas s’arranger dans les prochains jours. Demain, nous partirons vers 7h, comme à notre habitude car sinon, nous allons souffrir et il n’est même pas sûr que vous me retrouviez indemne à la fin de l’étape. Sinon, à part cela, les paysages étaient magnifiques : des crêtes rocheuses d’une hauteur vertigineuse, des ruisseaux entre les arbres, des falaises où s’écoulaient des cascades… Bref, comme dirait l’une des dames les plus connues de Paris : “c’est ma-gni-fique ma chérie”.

A noter aussi que nous nous engageons, dès demain, sur la voie des Piémont.

Demain : Capestang - Pouzols-Minervois (26 km)


Laurienne : Comme des pionniers dans l’histoire de Seuil, nous avions une mission: passer de la Voie d’Arles au Chemin des Piémont. Il nous fallait donc chercher, dénicher le passage idéal pour rejoindre Carcassonne la Médiévale. Chose faite, à Saint Gervais sur Mare, nous avons bifurqué pour emprunter l’itinéraire de l’Abbaye de Font Caude, le “Camin Nostre” comme il est appelé dans le pays.

Sentier muletier, chemin de colportage, itinéraire tracé à travers la garrigue et les vignes pour relier la montagne à la plaine, des châtaigneraies aux rives de la Méditerranée, il est jalonné de petits villages languedociens. Tracé au cœur du Haut Languedoc avec un paysage et un patrimoine exceptionnels, il témoigne de la circulation des hommes depuis la préhistoire. Il offre à travers des villages, d'anciens châteaux, des églises, des traces de cultes antiques, il est une véritable synthèse de cette province du Languedoc. Pays de langue d’Oc où ses habitants sont fiers de leur passé marqué par les troubadours et le goût de la liberté. Pays qui a vu naître les premières résistances face aux religions et à la politique. Sentier historique qui nous a mené sur le bord du Canal du Midi, qui lui aussi, recèle de trésors et témoigne de la richesse de notre belle France.

Son histoire, ses secrets, ce sera pour une autre fois, comptez sur moi !

Nous voici donc à Capestang le départ pour nous d’une nouvelle aventure.


Mardi 17 mai : Pouzols-Minervois (26 km)

B : La voie des Piémont, le chemin le plus long en termes de jours de notre périple. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai trouvé cette journée particulièrement longue et le soleil de plomb sous lequel nous étions, n’a rien arrangé. Les paysages ont quelque peu changé : de la plaine parsemée de champs entiers de coquelicots et de routes bétonnées. Le seul point commun avec les reliefs sur lesquels nous étions quelques jours plus tôt, ce sont les vignes. Ce soir : camping avec le repas et le petit déjeuner. Le repas était très copieux : salade de tomates, fromage, olives, poulet basquaise avec de la menthe et un cookie fait maison. Un régal ! Nous avons aussi rencontré une anglaise sur le chemin.

Allez je vous laisse, je dois reposer mes paupières, même si je suis à deux doigts de dormir dehors à cause de la chaleur du chalet dans lequel je me trouve.

Demain : Pouzols-Minervois - Rieux-Minervois (26 km)


Laurienne : Débuter en ce jour notre route direction Saint Jean Pied de Port, passant par Carcassonne la magnifique, nous empruntons la Via Domitia, voie antique créée par les romains en des temps reculés. Voie mythique, voie de commerce, puis de pèlerinage.

J’imagine ces femmes et ces hommes parcourir ce chemin qui devait, j’en suis persuadée; être périlleux et dangereux. J’imagine leur corps souffrir quand le mien souffre de cette chaleur intense.

J’imagine la rudesse des sentiers quand moi j’en foule la terre.

J'imagine les risques encourus dans ces époques si instables quand moi je m’extasie de mes rencontres.

J’imagine la nature sauvage quand moi je traverse une ville.

J’imagine comment en d’autres temps, j’aurais pu entreprendre un tel périple. Cela aurait-il été possible ?


Mercredi 18 mai : Rieux en Minervois

B : C’est la tête levée que j'ai parcouru les derniers kilomètres de cette journée. Pour une fois ! Bon en même temps, j’étais devant, donc je n’avais pas trop le choix. A part ça, j'ai failli me perdre à cause d’un manque d’attention de ma part : j'avais oublié de tourner. Heureusement que le chemin que j’avais emprunté menait au même endroit que Compostelle. Nous sommes aussi passés par un lac : le Lac de Jouarres. Nous avons fait une pause d’environ 30 mn, les pieds dans l’eau, avec vue sur les reliefs. Arrivés vers la fin de l’étape, nous avons arpenté ce que j’appelle les “routes à tracteurs”, routes en terre battue de part et d’autre de la route avec la végétation qui repousse au milieu, ce qui témoigne du passage de nombreux engins agricoles. Nous étions aussi bien entourés : à gauche, le Canigou qui marque le début des Pyrénées, et à droite, la Montagne Noire, notant la fin du Massif Central.

Demain : Rieux en Minervois - Malves en Minervois (16 km)


Laurienne : Infernal….C’est rare mais aujourd’hui, j’ai vraiment, vraiment souffert : 32° au thermomètre, ressenti on ne sait pas trop. Durant 6 km, ma notion du temps s'est arrêtée, une impression d’éternité s’est abattue sur moi. Dans ces moments là, mon corps se met en pilote automatique et mon esprit s’échappe, vagabonde dans un autre monde pour éviter de tourner en boucle sur cette sensation : “plus t’avances et plus tes jambes s’alourdissent comme si elles s’enfonçaient dans le sol”.

Comme dit l'expression ariégeoise “c’était long et chaud comme un âne”. Dur, oui un âne c’est super long. D’ailleurs, il peut être lourd, long, dur, haut, chaud etc…

Bref, c’étaient les 6 km de l’horreur. Satané soleil.


Jeudi 19 mai : Malves en Minervois

B : Katy Perry : Imagine Dragons ou encore Indila : voilà quelques chanteurs que j’aime bien. Mais mon artiste préféré reste Zwei. Aujourd’hui, je vais un peu vous parler de moi. Comme je vous l’ai dit dans mon tout premier blog, j’ai 16 ans et je viens de Rennes (inutile de vous rappeler mon prénom je pense). J’adore les animaux. Je vais même en faire mon métier : auxiliaire vétérinaire. J'ai aussi la grande ambition de me lancer en politique… Ce n'est pas demain la veille ! J’aime aussi beaucoup écrire. J’ai d’ailleurs évoqué plusieurs fois le sujet en vous faisant suivre l’avancée de mon roman intitulé : “L’assassin au cœur brisé”. Pour vous en faire un bref résumé, je joue le personnage principal : un tueur en série dominé par la vengeance qu’il veut exercer de manière mortelle sur ceux qui m’ont abandonné alors que j’avais une confiance aveugle et une amitié tellement forte qu’ils ont réussi à manipuler pour ensuite me délaisser au moment où j’avais le plus besoin d’eux, comme si j’étais un vieux chewing-gum accroché à leurs semelles. Bref ! J’ai aussi décidé de changer de look : passer d’une veste “d’aviateur” en cuir noir, un jean bleu foncé et des baskets blanches à des mitaines à clous, une longue veste style gothique et des bottes à talons qui m'arrivent aux genoux. Changement radical me direz-vous ? Il faut d’ailleurs que j’envoie une photo au directeur, car il veut voir ce que donnera mon nouveau “déguisement” (lol) Si j'aime particulièrement écrire, la lecture vient juste après : en ce moment, je suis sur du Guillaume Musso “L’instant présent”, pour ceux qui connaissent…

Voilà, je crois que j’ai à peu près fait le tour.

Sur ce, je vous laisse avec une citation que j’ai créée moi-même

“Restez sur le droit chemin et faites ce qui vous semble bien,

ne laissez pas les ténèbres vous engloutir car elles vont fatalement vous desservir.

Quand vos démons à la porte de votre conscience viendront frapper.

Par tous les moyens les combattre, vous devez.

Et surtout, n’oubliez pas ceci : notre liberté s’arrête là où commence celle d’autrui”.

Bonne nuit tout le monde.

Demain : Malves en Minervois - Carcassonne (14 km)


Laurienne : L’unique, la mystérieuse Cité de Carcassonne est là, devant nous. Plus qu’une journée de marche, 16 km à parcourir et nous pourrons la toucher, la visiter, en découvrir ses légendes, son histoire, ses tragédies. Véritable vestige d’une époque sombre que fut l’inquisition, elle fut aussi le bastion du catharisme et des troubadours. De quoi nous divertir, nous fasciner et nous transporter dans le monde des chevaliers et des princesses rebelles.

Et pour nous mettre dans l’ambiance, ce soir nous dormons dans un château. C’est pas la classe ça !


Vendredi 20 mai : Carcassonne

B : J’en parlais depuis un mois et demi : Carcassonne par-ci, Carcassonne par-là. Et bien, nous y voilà enfin. L’étape d’aujourd’hui a été assez courte. Pour la première fois, j’ai observé le système d’écluses en fonctionnement. C’était très impressionnant, surtout la vitesse à laquelle l’eau monte entre les deux portes. De plus, l’écluse que j'admirais ne comptait pas un, mais trois niveaux ! Je n'avais jamais vu ça. Il faut dire que sur La Vilaine, on ne trouve pas souvent d’écluses et quand on en trouve, elles n’ont qu’un niveau.

La soirée a été rythmée par la visite de la Cité Médiévale et un dîner au restaurant où j’ai pu manger un bon cassoulet.

Désolé, je n’ai pas trop d’inspiration ce soir.

Demain : repos à Carcassonne


Laurienne : Je ne peux pas longer le Canal du Midi et ne pas partager l’histoire de cet ouvrage gigantesque pour l’époque. Construit sous le règne de Louis XIV, c’est grâce à l’audace et au génie de Pierre Paul Riquet qu’il a vu le jour au XVII°s. Long de 242 km, reliant Toulouse à la Méditerranée, il prend sa source dans la Montagne Noire. Alimenté par le lac de Saint Ferréol, pièce maîtresse pour que le Canal du Midi ait un niveau d’eau suffisant pour la navigation, il aura fallu 14 années, des milliers d’ouvriers et autant de coups de pelle, de pioches pour le creuser.

Voie d’eau qui a longtemps servi à transporter passagers et marchandises, aujourd’hui, seule la navigation de plaisance y est autorisée. Le développement du train et des routes ont terni cette belle histoire.

Pourtant, si on prend le temps d’observer les systèmes d'écluses fonctionnant depuis des siècles et si l’on pense écologie, ne serait-il pas une bonne idée de le remettre au goût du jour ?


Samedi 21 mai : Carcassonne – Repos

B : Laurienne a été morte de rire pendant trois heures suite à la réponse du directeur en voyant ma photo et en parlant de tongs cloutées…Ne cherchez pas à comprendre.

Aujourd’hui, je me suis acheté un tee-shirt marqué d’une magnifique croix d’Occitanie, ainsi qu’un mignon petit portefeuille en cuir naturel. Nous avons passé la quasi-totalité de la journée à faire les boutiques, à la recherche de la fameuse veste que je cherche depuis un mois. Sans succès ! D’après quelques vendeurs, mon style n’est, soit plus à la mode, soit n’est exposé qu’en automne-hiver. Il va falloir que j’attende. La patience est, de toute évidence, la clé de plusieurs choses, car, comme le dit le proverbe : “Patience et longueur de temps font plus que force, ni que rage”.

Demain, nous repartons sur le chemin avec de nouvelles aventures qui nous attendent : Montréal à 24 km de Carcassonne.


Laurienne : La première chose que l’on voit en entrant dans la Cité Médiévale, c’est une statue représentant Dame Carcas, je vais donc vous conter sa légende :

“Au VIII°s, Dame Carcas, princesse sarrasine, défendait Carcassonne contre un siège de Charlemagne qui durait depuis cinq années. Les vivres vinrent à manquer et elle décida de récupérer toute la nourriture qui restait chez les habitants. Les soldats ne rapportèrent au château qu’un sac de blé et… un porc qu’une vieille femme avait dissimulé au fond de sa cave. Elle fit gaver le porc avec le sac de blé et le jeta par-dessus les créneaux : l’animal vient s’écraser aux pieds de Charlemagne libérant de ses entrailles tout le blé dont il avait été gavé. Stupeur de Charlemagne : “Si Dame Carcas se permet de jeter les vivres par les fenêtres, c’est que la ville est abondamment approvisionnée, inutile de poursuivre le siège qui a déjà trop duré”. Mais Dame Carcas voyant s’éloigner Charlemagne, prise d’une grande tristesse à l’idée de ne plus le revoir, le rappela, le sonna….et lui livra sa ville, toutes les cloches sonnant à la volée. Depuis ce temps-là, Carcas…Sonne.

Est-ce là l’origine du nom de la ville ? Mythe ou réalité, à vous d’en juger.


Dimanche 22 mai : Montréal

B : Ces derniers jours, c’est moi qui dirige la marche. Je ressens donc de la frustration lorsque je me perds…. et que Laurienne ne m’aide pas : exactement ce que j’ai fait ces premières six semaines. Ça me demande un effort d’attention assez important qui est difficile à maintenir. J’ai aussi le “re-make” de la chanson “Nettoyer - Balayer - astiquer - déraper” - tournoyer - patiner dans l’argile mouillée, oui c’est ce qui me plaît”

Je me suis cru le plus malin en voulant passer dans la boue… et j’ai fini avec les lombaires bloquées (façon de parler). Je me suis aussi coupé le doigt avec un couteau…

Arrivé près de Montréal, j’ai eu droit à l’un des spectacles les plus époustouflants : en arrière-plan des bas-reliefs et des plaines se trouvent les pics enneigés de l’Ariège. De plus, le dénivelé commence à être plus important.

Demain Montréal ----> Fanjeaux (14 km)


Laurienne : Ah le catharisme, sa culture, ses vestiges. ! Religion qui fera un passage rapide dans l’histoire, mais qui a marqué à jamais le Midi de la France. Le catharisme s’est développé au XII°s, basé sur le christianisme, respectant l’idéal de vie et de pauvreté du Christ. Cette religion critique la richesse ostentatoire et l’abus de pouvoir de l’église romaine. Rapidement considérée comme une hérésie par celle-ci, l’estimant plus dangereuse que les “infidèles”, juifs et musulmans, elle va d’abord tenter de convertir, mais le catharisme est difficile à convaincre et le catharisme profondément ancré dans le territoire. La Croisade contre les albigeois (cathares appelés ainsi à l’époque) sera lancée et durera 20 ans (1209-1929) mêlant conflits religieux et politiques, elle permettra au royaume de France de s’étendre et de prendre possession des terres très riches et très fertiles du Midi de la France. Le catharisme sera à l’origine de l’Inquisition, tribunaux créés pour juger l’hérésie. Les cathares seront pourchassés et massacrés, cette religion s’éteindra, mais laissera une empreinte culturelle et architecturale dans la région, appelée maintenant Pays Cathare.


Lundi 23 mai : Fanjeaux

B : Le temps pour marcher aujourd’hui est idéal, pour moi en tous cas : du vent frais et une température avoisinant les 20°. Ça fait du bien après les grosses chaleurs de ces derniers jours. Nous avons eu aussi des panoramas à couper le souffle, parfois même à 360°. Pour couronner le tout, nous avons revu les deux marcheurs de la veille, Bertrand et Jean-Michel. Je sais que l’un d’eux a fait une sieste, vu le bruit qu’il faisait : ses ronflements ressemblaient au bruit d’un courant d’air d’une moto qui passe ou encore d’un meuble que l’on déplaçe. Bonne nuit. Pour de vrai, ils sont très gentils. J'ai aussi terminé le chapître 6 de “L’assassin au coeur brisé”.

Demain : Fanjeaux ---> Mirepoix (27 km)


Laurienne : Aujourd’hui, nous faisons halte à Fanjeaux. Ce village si on ne s’y arrête pas, si on ne s’y intéresse pas, n’attire pas, paraît terne, sans vie, sans âme, mais… village d’origine romaine, il a une sacrée histoire à raconter. Situé au carrefour des voies de communication entre Pyrénées et Montagne Noire, Océan et Méditerranée, il tire son nom de Forum Jouis, temple de Jupiter (bien sûr aucun lien avec notre humble Président !) Bâti sur un promontoire rocheux, il domine la plaine du Lauragais.

Au XIII°s, Fanjeaux a été au centre de l’Inquisition contre l’hérésie cathare. Depuis ce village le futur Saint Dominique tenta de ramener les populations de la contrée dans le droit chemin de l’église romaine et y créa le siège de sa première communauté où il fonda en 1215. l’Ordre des Dominicains. Il sera l’un des penseurs de l’Inquisition qui jugera et massacrera les cathares.

Fanjeaux sera ensuite victime en 1355 des troupes du Prince Noir (prince anglais) qui brûleront le village et beaucoup d’autres dans le Sud de la France. Puis tel un phénix, ce village se reconstruira et prospérera même, grâce à la culture du pastel. Aujourd’hui, fort de son passé historique et de sa situation entre mer et montagne, cette bourgade d’environ 900 habitants tend à développer le tourisme au sein du pays cathare.


Mardi 24 mai : Mirepoix

B : L’une des choses qui m’énerve sur la marche, ce sont les détours dans les villages et tout ça pourquoi ? Pour aller voir l’église; Bon après, vous me direz, on est sur le Chemin de Saint Jacques, mais tout de même ! Prendre à droite pour faire le tour de l’église pour prendre ensuite à gauche pour reprendre à droite, faire un quasi demi-tour par la gauche pour pour pouvoir revenir quasiment au point de départ. Je vous jure, c’est à vous tirer une balle. Donc, permettez-mois d’adresser un message à l’église : dis-donc mes cocos, ce n’est pas en faisant faire des détours pour “admirer” (avec des grands guillemets car les églises, c’est pas mon truc) vos édifices que vous allez réussir à me convertir, c’est moi qui vous le dis : Rappelez-vous, chers lecteurs, de mon proverbe “patience et longueur de temps font plus que force ni que rage”. Et bien laissez-moi vous dire une chose : ma patience a ses limites. Bon tout ça pour vous dire que le GR nous fait faire des détours énormes pour aller voir les églises de chaque village par où l’on passe. Dernière chose : même si c’est écrit avec humour,c’est aussi ce que je ressens.

Demain : Mirepoix - Vals -14 km)


Laurienne : Sachant que le GR78 passait par l’Ariège, j’avoue que mes jambes frétillaient . Chose faite, j’ai envie de partager avec vous ce chant traditionnel qui explique le ressenti d’un ariégeois pour sa terre natale :


Ariège, Ariège, Ô mon pays,

O terre tant aimée,

Mère tant adorée,

De près, de loin, toujours

Ton nom me réjouit

Ariège, Ô mon pays.


J’aime d’amour tes montagnes superbes,

L’hivert leur met un blanc vêtement

Mais dans l’été parmi les hautes herbes,

les agnelets gambadent follement.


O terre tant aimée,

Mère tant adorée,

De près, de loin, toujours

Ton nom me réjouit

Ariège, Ô mon pays.


J’aime tes plaines si jolies

Riches tapis de vignes et de blé,

Tes ruisseaux d’argent et tes prés fleuris

Et tes plateaux que couronnent les bois


Ariège, Ariège, Ô mon pays

O terre tant aimée,

Mère tant adorée,

De près, de loin, toujours

Ton nom me réjouit

Ariège, Ô mon pays.


Pour l’oisillon, qu’il fasse soleil ou pluie

Le plus beau nid sera toujours le sien

Je suis Ariégeoise, laissez-moi mon Ariège,

Aucun pays n’est aussi beau que le mien


Ariège, Ariège, Ô mon pays

O terre tant aimée,

Mère tant adorée,

De près, de loin, toujours

Ton nom me réjouit

Ariège, Ô mon pays.


O mon pay si doux à ma mémoire

Ton nom aimé est gravé dans mon soeur

Ou je suis né, Dieu veuille que je meure

Sous mon ciel bleu, sous mon beau soleil


Ariège, Ariège, Ô mon pays

O terre tant aimée,

Mère tant adorée,

De près, de loin, toujours

Ton nom me réjouit

Ariège, Ô mon pays.

(Paroles de l’Abbé Maury Sabors - Curé de Varilhes de 1906 à 1923)


Mercredi 25 mai : Vals :

B : Un peu d’histoire aujourd’hui. Je suis allé voir la Nécropole de Tabariane, construite entre le IV et le VI siècle après Jésus-Christ. Cette nécropole a servi à inhumer les mérovingiens. Ils avaient un culte funéraire assez atypique : ils enterraient les défunts avec la quasi totalité de leurs affaires personnelles. Ils étaient aussi enterrés en famille (mari et femme, mère et fils….). Lors de la fouille, différents types de tombes ont été découverts : de très fleuries jusqu’à totalement nues, en passant par une simple maison de pierre. L'architecture des tombes est aussi particulière : ils calaient des planches (non fixées entre elles) avec de gros rocs. Pour en revenir à la décoration des tombes, les directeurs des fouilles ont pensé à une différenciation des classes sociales : les plus ornées pour les riches et les moins ornées pour les pauvres, esclaves ou vagabonds. Voilà pour ce petit point d’histoire.

Par ailleurs, j'ai passé une très bonne soirée en compagnie de trois gentilles jeunes filles, ainsi qu’avec Karine et son mari, Julio.

Demain : Vals - Montégut Plantaurel (40 km) étape défi


Laurienne : En deux jours, j’ai eu la chance de croiser deux amies chères, Anne et Léona, qui ont eu la merveilleuse idée de venir à notre rencontre durant notre halte à Mirepoix. Puis nous avons été accueillis par la pétillante Karine avec qui je travaille de temps en temps, quand je ne marche pas évidemment et sa petite famille. Merci pour votre soutien à mon égard, mais aussi pour votre intérêt porté envers B et son incroyable aventure qu’il est en train de vivre. Ces moments pleins de générosité, de gentillesse et de partage nous ont re-remplis d’énergie pour continuer d’avancer un peu plus tous les jours.


Jeudi 26 mai : Montégut-Plantaurel

B : Les 40 km ont été faits. Bon, de toute façon, j’avais pas trop le choix. Ce matin, le réveil a piqué…. Beaucoup piqué (5h30 du matin). On a commencé la marche autour du GR15. Le réveil a été total, arrivés à Pamiers…. après 20 km et des poussières. On a traversé des fermes avec des chiens de berger qui te poursuivent jusqu’à ce que tu sois à au minimum 10 m de son territoire. Il a failli me faire faire pipi dessus ce chien. Je sentais son souffle chaud sur ma cuisse, j’ai l’impression qu’il allait me la bouffer…. Et en plus, un peu plus loin, on a croisé le chien de berger par excellence : le patou, magnifique mais protecteur : Et la cerise sur le gâteau : la dernière partie de l’étape était une piste forestière in-ter-mi-na-ble. Bon, au moins, nous sommes arrivés ….. sauf que j’ai appris que la dernière étape du séjour serait de 46 km. Aidez-moi par pitié ! Demain Montégut-Plantaurel - Mas d’Azil (14 km)


Laurienne : Ca y est, nous entrons dans l’Ariège profonde, celle qui est reculée, loin des grands axes où la 3G n’existe pas, où les mouches omniprésentes font partie de l’environnement car qui dit vaches, dit mouches, où le silence est maître et la nature derrière chaque porte, chaque fenêtre. Vous l'avez compris c’est “mon chez moi” et je suis fière, heureuse de pouvoir fouler, avec un jeune de Seuil, ces sentiers. De découvrir et redécouvrir mon territoire et ses habitants au caractère bien marqué.

Ce soir, Clémence de l’équipe Seuil, nous a rejoints pour quelques jours à Montégut-Plantaurel, petit village connu pour son vin…. Non je blague, il y a bien des vignes, mais comment dire…. Ce n'est pas un grand cru !

Accueillis par Patrick et Evelyne au tempérament de feu, nous avons passé une soirée pleine de rires et d’anecdotes du pays. Un régal


Vendredi 27 mai : Mas d’Azil


B : Clémence, de l’équipe Seuil en charge du suivi de ma marche et des autres également, nous a rejoints depuis hier soir. Elle a marché avec nous aujourd’hui et re-marchera avec nous demain. Bref, en gros, elle nous suit pendant deux jours.

Petite étape aujourd’hui de 14 km jusqu'au Mas d’Azil. On a dû monter des côtes raides où un monsieur s’est arrêté à notre hauteur sur le chemin pour nous dire que la prochaine côte était raide (avec l’accent ariégeois, ça fait tout !).

Nous avons traversé une magnifique forêt remplie de ronces ! En sortant de là-dedans, je ressemblais à un hérisson…

Nous nous sommes arrêtés là où Clémence a piqué une tête dans une eau à 12°. Moi aussi, je ne sais pas comment elle fait.

Arrivés au Mas d’Azil, j’ai piqué un petit somme et nous sommes ensuite allés manger une glace à la guinguette des grottes du Mas. C’était une bonne journée.

Demain : Le Mas d’Azil ---> Saint Lizier (30 km)


Laurienne : Aujourd’hui en cherchant l’inspiration, j’ai lu cette jolie légende, le Pont du Diable. Son titre fait peur, mais il s’agit d’une belle et réelle histoire d’amour. Mon côté romantique et un peu fleur bleue avait envie de la partager avec vous.

Nul ne sait comment ces deux-là se sont rencontrés, mais peu importe, ils s’aimaient d’un amour profond et sans pareil. Elle avait les cheveux d'ébène et des yeux noirs pareils à une nuit sans lune, comme toutes les filles du midi. Son père la destinait à un seigneur du côté du Fossat, riche et puissant, mais vieux et podagre. Nos amoureux qui se voyaient très rarement imaginèrent un stratagème pour se retrouver plus souvent.

Un matin, elle alla trouver son père et lui dit toute tremblante “père, j’ai eu cette nuit une vision qui me disait de me rendre la nuit tombée, dans la grotte, sous l’arche de pierre, près de la rivière et ceci pour me faire une importante révélation à votre sujet”.

La rusée donzelle, qui savait son père très superstitieux, faisait semblant de refuser : “père, disait-elle, je n’oserai jamais…”. Mais Le sire donne l’ordre à ses gens en armes d’escorter sa fille et ceci jusqu’à l’entrée de la grotte. Ainsi, chaque soir, elle allait retrouver son cher et tendre sous l’arche de pierre et convenait ensemble de ce qu’il fallait rapporter au seigneur.

Un soir, quand elle ressortit de la caverne, toute émerveillée, les yeux cernés et la robe froissée, les gens ne doutaient pas un seul instant qu’elle avait vraiment vu le diable.

Quand, neuf mois après, naquît au château son petit ange blond et non un diablotin, le sire entra dans une colère terrible, si bien que le château tout entier en trembla.

Sa gente dame, qui en avait vu d’autres, laissa passer l’orage et lui présenta le nouveau né. Miracle, devant tant de blondeur et d’innocence, le seigneur comprit que l’amour était plus fort que l’argent. Il donna son consentement au mariage qui eut lieu au printemps, dans l’église de Sainte Colombe.

Comme le veut toute histoire qui finit bien, ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants.


Samedi 28 mai : Saint Lizier


B : J’ai trouvé l'étape aujourd’hui beaucoup, beaucoup, trop longue, même plus longue que celle de 40 km. Bon après, ça a été compensé par le paysage : des pics enneigés, des massifs remplis de forêts.

Ha oui ! Grâce, ou plutôt à cause de, à Laurienne et Clémence, j’ai failli me prendre une décharge de 10 volts dans le ventre (oui c’est précis, mais étant donné que ça m’est déjà arrivé, je le sais). Je vous explique: j’étais dans mes pensées (tête baissée évidemment) et j’avançais. Je vois un fil en torsade et m’arrête à 1 cm de ce dernier. Je relève la tête et je vois Laurienne et Clémence, pliées en deux en train de se foutre de moi. J’ai ensuite passé la barrière avec beaucoup de précautions (trop en fait) et j’ai rejoint les filles, toujours mortes de rire. Une salle blague quoi ! Mais n’empêche, c’était drôle en y repensant.

Demain : Saint Lizier ---> une ville entre Audressein et Argein (manque d’infos) 18 km environ


Laurienne : Les surprises de la vie, les hasards du destin nous emmènent parfois là où on ne s’y attendait pas. Ce soir, il est trop tard pour faire les courses ou plutôt après 30 km sous le soleil, le courage manque pour descendre au supermarché.

Vous connaissez Saint Lizier ? Non ? Eh bien en fait, c’est sur une butte. L'Ariège est belle, mais elle monte et descend en permanence, mais pleine de surprises. Ce samedi 28 mai, un apéro-concert avec pizzas cuites au feu de bois était organisé dans la petite guinguette de cette cité ancestrale. Ambiance légère, familiale et estivale nous attendait donc pour vivre une soirée relaxante, chaleureuse après une étape aussi chaude que longue.

Qu’est-ce que j’adore ces moments- là, que l’on n’espère pas ou plus et qui redonnent l’énergie de repartir le lendemain le cœur plus léger et la tête pleine de souvenirs vers d’autres aventures.


Dimanche 29 mai : cabane dans la forêt entre Audressein et Argein


B : Parlons un peu de l’hébergement de ce soir : une cabane en bois au milieu de la nature. Jusque là, on peut se dire “chouette”.... Sauf que pas moi. Je vais me doucher. Je prends donc mes affaires et descends à la salle de bain (bâtiment détaché de la cabane) j’entre et j’aperçois la baignoire sale. Ça ne me surprend pas vu le cadre. Je me prépare à entrer dans la baignoire lorsqu’une apparition tout droit venue du troisième cercle des enfers, se joue devant moi : une araignée (assez grosse…. beaucoup trop même) tombe du plafond pour venir se poser dans la baignoire devant moi. Sur le coup de la surprise, je m’empare de la pomme de la douche et noie la bête en criant (“vade retro satanas". Elle a fini dans le siphon de la douche et je ne vous parle même pas de la guêpe se trouvant sur la fenêtre, ainsi que de nombreux moustiques et mouches. Ce genre de vie peut plaire à beaucoup de personnes, mais pas à moi. Il me faut un minimum de confort et surtout une salle de bains propre où les araignées ne se prennent pas comme Peter Parker.

Demain : La cabane paumée au milieu des bois ----> Augirein (15 km)


Laurienne : Je suis là, assise, ma tasse de café fumante à la main. Je regarde devant moi à travers la petite fenêtre de notre refuge d’une nuit. Il est là en face de moi, se dressant avec encore un peu de blanc qui le tapisse ici et là, montrant les stigmates de l’hiver maintenant derrière nous. Je m’autorise à rêver, à penser à mes pas le foulant doucement pour en faire l’ascension une journée de printemps, d’automne ou peut-être d’hiver : Le Mont Valier, splendide, domine du haut de ses 2900 m, les vallées d’Angouls,, d’Estours, de Bethmale, du Riberot et d’Orle, avec sa vue panoramique allant du Pic du Midi, de Bigorre au Pic du Canigou, me laisse songeuse, stimule ma curiosité, égaie ma matinée. Ma décision est prise, doucement je ferai sa longue montée pour gravir son sommet, puis admirer sa vue imprenable et légendaire.


Lundi 30 mai :Augirein


B : Deux jours, deux gîtes atypiques. Après la cabane perdue au milieu des bois (qui n’est pas si mal que ça finalement), je me retrouve à dormir dans un musée. Vous avez bien entendu, un musée ! Alors oui bon, ce n’est pas évidemment la salle des Etats du Musée du Louvre, mais ça a son charme. Ce musée rassemble les objets que les habitants du village d’Augirein ont utilisés au cours du siècle dernier. La bâtisse en est remplie. Mais quand je dis rempli, c’est rempli ! Même dans les toilettes. On y trouve des tas d’objets du quotidien : des ustensiles de cuisine, des habits, en passant par le matériel médical, les jeux de société, les outils, les produits d’hygiène et plein d’autres ! On y trouve aussi des jouets pour enfants avec, ce qui est pour moi, l’incarnation même des films d’horreur, je vous demande de l’applaudir “la poupée en porcelaine !” Et le 3ème étage du garage en est bondé de part et d'autre. Bonne nuit.

Demain : Augirein ---> Juzet d'Izaut (21 km)


Laurienne : Je ne m’en lasse pas, monter, descendre, suivre un cours d’eau, une petite route, gravir un raidillon, transpirer, se dépasser, passer de vallée en vallée, découvrir des petits villages, croiser un berger, échapper à un patou, se figer au passage d’un serpent, déguster du fromage, se délecter avec des fraises sauvages, “guetter” le champignon, admirer les points de vue, tremper les pieds dans un ruisseau, faire une sieste au soleil, voilà ce que je vis tous les jours. Rien de plus, rien de moins que ces instants qui me régalent, me satisfont.



Mardi 31 mai : Juzet d’Izaut


B : Si je devais définir en un mot le Col de Portet d'Aspet, ce serait “magnifique”. Bon, certes la montée a été longue et la descente laborieuse, mais les panoramas et les différentes prises de vue étaient tous aussi beaux les uns que les autres. On approche aussi de la fin… Peur, excitation de rentrer ? Tout se mélange. Après-demain, je vais devoir organiser toute la journée tout seul…. Je sens que ça va être une catastrophe.

Désolé, ce soir, l’inspiration c’est pas trop ça..! Demain, le repos à Juzet d’Izaut


Laurienne : “Que la montagne est belle” ce sont des paroles de Jean Ferrat, il en a fait une chanson et il a eu raison. Mais je ne vais pas refaire un “poème” sur les Pyrénées, la montagne etc… Vous allez finir par me détester.

Aujourd’hui, je suis un peu triste, nous avons quitté ma chère Ariège pour entrer en Haute Garonne et passer le fameux, le mythique Col du Portet d’Aspet. Je dis mythique, car c’est un Col à la réputation coriace pour les cyclistes et fans du Tour de France. Paraît-il qu’il en aurait maté plus d’un, de ces cyclistes qui voulaient le passer, le dompter. Certains ont eu un destin tragique et d’autres, malgré leurs coups de pédales, ont fini dans la voiture-balai. Mais mythique aussi car témoin d’une époque plus sombre où des milliers de gens fuyaient la guerre, les conflits, passage incontournable de la liberté, il a vu ce dont était capable l’humain. Le Col de Portet d’Aspet est bien fameux à gravir et mythique à découvrir, à peine haut de 1100 m, il offre pourtant un sentiment de haute montagne



Mercredi 1er juin : Juzet d’Izaut


B : Et demain, on est reparti ! Petite étape de 13 km jusqu’à Saint Pé d’Ardet. Et c’est moi qui vais organiser la journée : faire les courses, le repas, prévoir à quelle heure on se lève le lendemain… Je vous dirais si cela a été une réussite ou une catastrophe.

La journée d’aujourd’hui est passée “comme une flèche”. Il me tarde aussi d'aller me coucher pour être en forme demain. J’ai aussi rencontré une bibliothécaire, historienne et écrivaine. Elle a gardé le manuscrit de “L'assassin au cœur brisé”. J’attends son retour avec impatience. J'ai aussi eu un appel de mon éducatrice du CDAS avec de bonnes nouvelles. Je vais pouvoir reprendre ma scolarité, ce que je voulais à tout prix.

Ha oui ! J’ai oublié de vous dire des choses à propos du Col du Portet… ou plutôt après ce dernier : une énorme descente, parsemée de feuilles, couvrant le sol et cachant les pierres glissantes. J’ai failli tomber deux fois dans un trou qui descendait en bas de la montagne. Je pense que ça aurait fait un peu de mal (aux alentours des 1000 m d’altitude quand même !). Mais bon, après j’allais assez vite, donc comme dit le dicton “qui fait le malin, tombe dans le ravin”

Demain : Juzet d’Izaut ---> Saint Pé d’Ardet (13 km)


Laurienne : Calme et tranquillité, les deux mots pour ce repos. Au cœur des Pyrénées, dans un tout petit village, nous voilà donc accueillis à l’Auberge du Cagire par une mère et sa fille,un accueil des plus chaleureux, sourire aux lèvres. Un lieu douillet où l’on vous concocte des plats savoureux faits avec les produits de la ferme familiale. Tout est “maison”, mais vraiment tout, de l’entrée au dessert en passant par le pain.

Calme et tranquillité au milieu de rien, pas un bruit la nuit, pas d'agitation la journée. Juste deux ânes “silencieux “ en face de la fenêtre et bien sûr les satanées mouches en guise de colocataires. En tout cas moi, je me suis ressourcée dans ce trou “paumé” où tout de même on capte la 4G comme quoi !



Jeudi 2 juin : Saint Pé d’Ardet


B : La journée d’aujourd’hui n’a été pas trop mal réussie (car, souvenez-vous, c’est moi qui devais la gérer). Je me suis levé de bonne heure ce matin : 6h, les yeux ouverts et 7h sur mes jambes. J’ai bu mon café tranquille dehors, à moitié aveuglé par les rayons du soleil. J’ai préparé ensuite mon sac et suis allé faire mes petits achats pour mon pique-nique. C’est moi qui ai dirigé la marche et arrivé à Saint Pé d’Ardet, surprise ! Pas d’épicerie. On a donc dîné grâce à un restaurateur qui nous a gentiment préparé un repas. Le gîte où nous logeons a un certain charme : il est composé de bois, majoritairement. Et depuis le balcon de ce gîte, on aperçoit un massif enneigé, splendide.

Demain : Saint Pé d’Ardet ---> Saint Bertrand de Comminges (17 km)


Laurienne :La marche c’est des efforts, parfois de la souffrance et même quelques larmes, mais peu importe tout cela quand on est récompensés. Aujourd’hui, nos chaussures nous ont menés jusqu’au gîte de l’Affenage et quel gîte, avec Fred qui nous accueille, perceuse à la main, en train de refaire la terrasse. Et quelle terrasse ! vue sur le toit des Pyrénées, c'est-à-dire le massif de la Maladeta, dont tous les pics, avec l’unique Aneto culminent à plus de 3000 m d’altitude, vue magique et exceptionnelle rien que pour nous. Et puis ce gîte, une vieille bâtisse au cœur du village complètement rénovée par Fred, son imagination, son dévouement et l’aide de quelques amis, l’investissement de sa vie. La maison dégage une odeur unique, un peu particulière, que j'ai définie comme cela : “elle sent le respect des lieux, des pierres”….



Vendredi 3 juin : Saint Bertrand de Comminges


B : Vous savez, je vous ai parlé de Bronwen, l’australienne. Hé bien, aujourd’hui, on l’a retrouvée dans une côte. C’était une agréable surprise. En parlant de surprise, ce soir, j’ai rencontré quelqu’un d’à peu près de mon âge (2 ans de plus). On a bien bavardé. C’était sympa. Et au menu, c’était : cuisine asiatique : un régal !

Je me suis acheté un pendentif en pierre naturelle qui aidera à faire diminuer le stress ou les angoisses irrationnelles et m’aidera aussi à mieux faire sortir les choses.

Sinon que vous dire d’autre : les paysages sont magnifiques, comme d’habitude;

Demain : Saint Bertrand de Comminges ---> Lortet (24 km)


Laurienne : Saint Bertrand de Comminges, c’est une ville dont j’entends parler depuis mon enfance. Pourquoi, par qui, où, je ne peux pas le dire, je ne peux pas l’expliquer. J’étais donc curieuse de la découvrir et qui plus est par la grande porte, c'est-à-dire en arrivant à pied par les escaliers. Et d’après mon compagnon de route, il y a 165 marches, ça fait les cuisses !

Bon… Pour être honnête, la ville qui nous paraît si dynamique et touristique est une ville un peu fantomatique. Il n’y a pas ou presque pas de commerces, une sensation étrange s’empare de vous quand vous franchissez les remparts. Pourtant la ville médiévale est superbe avec des ruines romaines situées en ville basse, le tout dominé par la cathédrale Sainte Marie, symbole majestueux de 2000 ans d’histoire, ce n’est pas rien. Mais il faut croire qu’un passé glorieux ne suffit pas, à moins que le prochain reportage de France 2 ne fasse bouger les choses, dixit notre hôte de la soirée ! A suivre


Samedi 4 juin : Lortet


B : Ça y est ! Plus qu’un mois pile. D’ailleurs, je ne vais plus dire “il me reste un mois de marche”, mais je vais dire “il me reste 4 semaines” pour l’impression de rapidité. Sinon, aujourd’hui dans l’ensemble, ça a été pas trop mal : on a marché un peu avec Bronwen et un peu avec Bertrand le matin. Bertrand, c’est le gars d’à peu près mon âge que j’ai évoqué dans le blog précédent. C’est qu’il m’a fait de l’effet le bougre !

J’ai aussi décidé de prendre le GR au lieu de prendre le raccourci qui était initialement prévu. Ça nous a fait donc 28 km au lieu de 24 parcourus aujourd’hui.

Le seul “hic” c’est ce soir, j’ai été assez désagréable (pas de parole pendant minimum 2h30) car, je ne sais pas bien pourquoi : est-ce que c’est à cause de la fatigue, du stress du retour ou d’autres choses ? Je ne saurais pas le dire. En tout cas, ma frustration ou plutôt comment l’exprimer, est un des points à travailler.

Demain, je ne sais pas trop où l’on va. On avait prévu d’aller à Bonnemazon, mais, faute d’hébergement, on s’arrête avant, ce qui nous fera aux alentours de 15 - 20 km


Laurienne : Bercée par l’orage et le bruit des gouttes de pluie qui tombent sur le velux de la chambre, je me suis endormie paisiblement comme un bébé. Quand l’orage gronde, que les éclairs brillent dans le ciel, que la foudre tombe et fait trembler le sol, des souvenirs d'enfance remontent. C’est un peu étrange, mais pour moi, il sonne comme un écho apaisant, bienveillant, je me remémore alors ces jours là où fascinée par le spectacle le front contre la vitre de la fenêtre de ma chambre d’enfant, j’observais ce spectacle grandiose Mieux qu’un feu d’artifice, j’avais l’impression que la nature s’offrait à moi, me montrait sa force et sa puissance. Le lieu de mon enfance étant incroyable, imaginez un petit village à 1000 m d’altitude dominé par un château cathare surplombant la vallée à 360°, au sol magnétique. Petite je me pensais alors au théâtre, ma chambre en guise de salle, le château en guise de scène et bien sûr l’orage en acteur principal. Quel souvenir, quel spectacle incroyable en y repensant


Dimanche 5 juin : Le Moulin des Baronnies

B : On a rencontré des obstacles sur ce chemin, mais celui d'aujourd'hui a été l’un des plus impressionnants : nous arrivions dans le petit village de Lomné avec Laurienne. Nous remarquons, en haut d’une pente, un groupe de cinq chiens. Ces derniers tournèrent la tête pour nous regarder. Laurienne me dit de ranger mon bâton. Je m’exécute et place mon bâton à la verticale. Par précaution (et aussi par peur, je l’avoue) je ralentis le pas. Laurienne se retrouvant donc nettement devant et, quelques centimètres après avoir commencé l’ascension de cette petite pente, le groupe des 5 chiens qui nous fixaient s’est transformé en une meute de sauvages agressifs, bavants et grognants, se jetant sur Laurienne. Inutile de vous dire qu’on a fait un détour car, même si j’adore les animaux, il ne faut pas non plus déconner.

Demain, en route pour Bagnères de Bigorre (22 km)


Laurienne : Vous devinerez jamais sur quoi mon regard s’est posé au détour d’une ruelle d’un petit village… Allez, je vous le dis, une vieille affiche où était écrit “Foire aux célibataires”.

Bien évidemment intriguée, j’ai fait quelques recherches et même notre guide la mentionne, il y a donc à Esparros, un village des Baronnies dans les Hautes Pyrénées une “Foire aux célibataires”. Pour la petite histoire, cette foire s’y déroule depuis 1966 créée pour répondre à l’exode des femmes, il paraît que le succès a été immédiat attirant même des participants de l’étranger. Apparemment modifiée depuis, elle existe encore. J'ai donc trouvé mieux que Tinder… Faites le Chemin du Piémont au mois de mai et vous trouverez peut-être l’âme soeur ! Avis aux amateurs


Lundi 6 juin : Bagnères de Bigorre

B : Ma deuxième tarte aux pommes a été un grand succès auprès de moi comme des autres pèlerins et pèlerines. Comme vous l’avez compris, c'est moi qui ai cuisiné ce soir : steak haché accompagné d’une poêlée de légumes avec une tarte aux pommes au dessert. Le début a été assez bien géré (faut dire que j’ai suivi la recette) mais lorsque je suis passé à la poêlée de légumes et au steak haché, là ça a été un carnage. En plus, je commence à avoir un coup de barre et des crampes d’estomac depuis quelques minutes. Et pour ajouter la cerise sur le gâteau : des pèlerins sont arrivés ! Alors je ne vous explique pas le changement soudain de mon attention qui passe de la cuisson des légumes à la conversation entre les marcheurs.

Il faut absolument que je persévère dans mes efforts, sinon je n’arriverai à rien.

Demain, on va prier à Lourdes (22 km) (non, je déconne, je ne suis pas croyant)


Laurienne : Quelle drôle d’étape, nous avons commencé par travailler notre équilibre en se prenant pour des danseurs étoiles ou peut-être bien pour des figurants du spectacle sur glace Holiday on Ice. Ensuite pour s’hydrater un peu la peau, nous avons opté pour la thalassothérapie des pieds, B lui a préféré s’y mettre tout entier. En même temps rien de mieux que la boue pour avoir une peau magnifique. Mais bon, je ne suis pas sûre qu’il soit totalement d’accord avec moi. Puis, nous avons terminé notre journée en jouant aux aventuriers dans les fougères et les ronces au milieu de la montagne. En bref, une étape comme je les aime, pleine d’embûches, de rebondissements et de sueur.


Mardi 7 juin : Lourdes

B : La ville de Lourdes, j’y suis déjà venu par le passé, avec ma famille. Mais je ne m’en suis pas aperçu tout de suite. Ce n’est que lorsque j’ai re-exploré la basilique et revu la grotte des apparitions que mes souvenirs sont revenus. En parlant de la basilique, elle est immense et magnifique. J’y ai d’ailleurs vu ce soir une procession de quelques milliers de personnes, c'était assez impressionnant.

J’ai aussi reçu quelques lettres : je remercie donc Maïwenn, Aude-Marie, Claude, Daniel, Marie et Françoise.

Jean-Louis, notre hôte de ce jour, est très gentil et serviable. Je l’ai aidé à préparer le dîner : une tortilla avec salade en entrée et tarte aux pommes en dessert. C’était délicieux.

Demain, petite étape tranquillou de 10 km jusqu’à Saint Pé de Bigorre.


Laurienne : Notre halte d’aujourd’hui est la ville de Lourdes avec ses sanctuaires, il faut dire qu’il y en a beaucoup entre la grotte des apparitions de Bernadette, les trois basiliques, les deux chemins de croix, la crypte etc… Tu sais pas trop par quoi commencer si tu veux visiter.

Enfin bref, Lourdes n’est pas que cela et heureusement. De mon point de vue, il est bien de la voir autrement. Blottie dans un bassin de verdure et appuyée sur les premiers contreforts pyrénéens on peut y voir au Sud, les crêtes blanches des célèbres pics pyrénéens comme le Montaigu, le Pic du Midi en Bigorre, Le Vignemale et tout contre la cité Le Béaut et le Grand Jer avec son funiculaire qui permet d’y monter au sommet sans effort. La ville est également dominée par un château fort qui fut fortifié tour à tour par les gaulois, les romains, les barbares et les maures. Une légende entoure d’ailleurs cette antique forteresse.

En l’an 778, Charlemagne à la tête de son armée, fit le siège du château fort occupé par le sarrazin Mirat et ses maures.

Malgré les assauts des Francs et la famine, le château de Lourdes restait imprenable. Et voilà que de l’azur surgit un aigle. Il survola le Fort et laissa tomber aux pieds de Mirat, l’énorme truite qu’il tenait dans son bec. Rusé, le maure saisit le poisson et le fit porter à Charlemagne afin de lui faire croire qu’il possédait encore des réserves alimentaires. Charlemagne s'apprêtait à lever le siège lorsque Turpin, évêque du Puy en Velay, eut l’inspiration d’aller parlementer avec l’assiégé. Il proposa à Mirat de se rendre, non pas au souverain, mais à la reine des cieux. La proposition plut au chef maure qui déposa les armes aux pieds de la vierge noire du Puy et se fit baptiser le jour de son baptême, Mirat, prit le nom de Lorus le transmettant à la ville qui devint plus tard Lourdes. Sacré Charlemagne, avec tous ces sièges, il a rebaptisé les villes du Sud.


Mercredi 8 juin : Bétharram

B : Petit changement de programme aujourd’hui : nous avons décidé de rallonger l’étape jusqu’à Bétharram, au lieu de nous arrêter à Saint Pé de Bigorre, car l’étape aurait été trop courte (seulement 8 km). Cela n’est pas plus mal non plus car demain, nous ferons une plus petite étape que celle initialement prévue.

Ce matin, j’ai voulu aller faire tamponner mon crédential au sanctuaire de Lourdes et reprendre ensuite le chemin en partant de l’immense basilique. Sauf que surprise ! Les portes sont gardées par des agents qui voulaient nous retirer nos opinels. J’ai donc tout de même fait tamponner les crédentials, mais nous ne sommes pas repartis par le sanctuaire. Dommage !

Demain, étape de 15 km jusqu’à Bruges


Laurienne : 8 juin, c’est la journée mondiale de l’Océan, lancée en 1992, elle consiste à faire chaque année de ce jour une occasion de sensibiliser le grand public à une meilleure question des océans et de leurs ressources.

C’est aussi la Saint Médard et quand il pleut à la Saint Médard, il pleut quarante jours plus tard. A moins que Barnabé ne lui coupe l’heure sous le pied.

Vous vous demandez pourquoi j’écris sur le 8 juin, tout simplement parce que c'est le jour où il reste pile un mois avant la fin de cette aventure. 30 jours pour finir en beauté l’accompagnement de B, qui se montre toujours à la hauteur de ce pari fou qui est de marcher 90 jours à travers la France et de la découvrir comme jamais il n’aurait imaginé le faire auparavant.

Allez, c’est la dernière ligne droite pour enfin aller au bout !


Jeudi 9 juin : Bruges

B : Non, nous ne sommes pas dans la ville du chocolat. Je vous mentirai si je vous disais que je n’y avais pas pensé la première fois que j’ai vu le nom de la ville sur le guide. Bref, aujourd’hui, petite étape, avec une arrivée aux alentours de midi.

J’ai aussi passé quelques coups de fil importants par rapport à mon orientation : je passe en voie technologique (filière ST25). Vous l’aurez compris, pour ce qui est de la politique, ça sent le roussi. Ce n’est pas plus évident avec les ombres qui planent au-dessus de ma tête. Mais je garde espoir ! "l'espoir fait vivre” comme le dirait une vieille expression (même s’il en prend un coup avec les horreurs que j’ai vues ce soir au journal).

Demain, 22 km pour rejoindre Buzy


Laurienne : Je l’ai écrit précédemment, j’aime les rencontres, elles sont toujours riches, diverses et variées. J’adore aussi les Ariégeois, mes compatriotes, mes semblables. Dans le mélange des deux, c’est la cerise sur le gâteau, mais pour le coup, là, je suis tombée sur “La Perle”. Comment le décrire….. adorable, serviable mais, par contre, pas vif pour deux sous malgré son âge, son expérience, il est parfois, voire tout le temps, moins autonome et plus maladroit qu’un enfant, une perle, je vous dis ! et en plus, je crois bien qu’il va nous suivre jusqu’à la fin du Piémont… Bref une perle ariégeoise adorable.


Vendredi 10 juin : Buzy

B : Aujourd’hui, j’ai reçu un coup au moral. J’ai trouvé l’étape longue et je pensais “à quand je serai chez moi”. De plus, la chaleur de plomb de ce soir ne prévoit rien de bon pour mon sommeil. En espérant que ça se rafraichisse. Sinon, journée classique : dénivelé, vue sur les montagnes, avec tout de même une vue sur le col d’Arrens et le pic de Montaigu et passage dans les villes. Comme vous l’auriez constaté, pas trop d’inspiration aujourd’hui

Demain, en route pour Oloron Sainte Marie (21 km)


Laurienne : Le Béarn et sa vallée d’Ossau dominés par le Pic du Midi d’Ossau (2884 m) qui s’étirent du nord au sud sur une cinquantaine de kilomètres depuis la Bastide de Rébénacq jusqu’au Col du Pourtalet à la frontière espagnole. C’est une invitation à la randonnée tellement c’est beau.

Situés dans le Parc national des Pyrénées, je ne peux pas vous décrire en permanence le paysage, le cadre que nous traversons sans vous toucher deux mots de la faune sauvage et protégée qui peuple son territoire. Evidemment, je ne parle pas du Béarnais au caractère bien trempé.

Certains, vous les connaissez déjà, le renard, l’écureuil, la marmotte. D’autres plus discrets, comme l’hermine et la martre ou encore le desman qui, lui, ressemble à un petit rat avec une trompette en guise de museau se font rares préférant les sorties nocturnes. Puis il y a les plus gros, mais tout aussi farouches préférant se tenir à l’écart de l’homme, comme l’emblématique isard et le majestueux bouquetin ibérique avec ses cornes pouvant atteindre 65 cm.

Et bien sûr, je ne peux pas oublier l’incontournable, le mythique ours brun devenu malgré lui une star avec son lot de fans et de détracteurs.

Je vous l'avais dit… une vraie invitation à la randonnée !


Samedi 11 juin : Oloron Sainte Marie

B Troisième repas que j’ai réalisé seul ce soir : colin, fondue de poireaux. Il y avait aussi du riz, mais ce n’est pas moi qui l’ai cuisiné. Demain, on rencontrera sur le chemin une autre équipe de Seuil. Ça promet d’être intéressant. Je me suis aussi remis à lire le journal. J’essaie de trouver celui qui me correspond. J’essaie actuellement “Le Canard Enchaîné”.

Voilà, petit blog pour pas trop d’inspiration. Il faut que je vous laisse, je dois réécrire les recettes car les feuilles sur lesquelles elles sont écrites sont humides.

Aïe ! Demain on va se faire soigner à l'Hôpital Saint Blaise (25 km)


Laurienne : Hier, je vous parlais de la faune sauvage vivant dans les montagnes, aujourd’hui j’ai envie de vous parler de la faune et de la flore qui peuplent les zones humides, mal connues et mal aimées ces espèces vivent pourtant près de chez nous. Les mares, les prairies et landes humides, roselières, les fossés inondés ou encore les tourbières constituent des refuges, des garde-manger et des lieux de reproduction pour tout ce petit monde presque invisible. Si on prend le temps d’observer, on y trouve les mythologiques tritons marbrés et palmés, l'inquiétant, mais inoffensif coléoptère dytique, la belle libellule calopteryx vierge, le magnifique papillon miroir, la fascinante salamandre tachetée et la sonore grenouille verte. Et n’oublions pas la flore avec le lys du marais, la bruyère à quatre angles et bien sûr nos deux plantes carnivores, la drosera à feuilles,ainsi que la grassette du Portugal, toute une biodiversité malheureusement en voie de disparition? car de moins en moins de zones humides sont présentes en France.

Notre planète est riche d’êtres vivants divers et variés, en sommes-nous suffisamment conscients ?


Dimanche 12 juin : L’hôpital Saint Blaise

B : Ce soir, je ne me sens pas bien, pas du tout. J’ai beau ne pas le montrer devant les autres, je souffre intérieurement. C’est un mélange de peur, d’appréhension et parfois de tristesse et c’est toujours le soir que ça survient. Et quand je dis toujours, c’est toujours. Et quand ce mal est là, il ne disparaît pas avant le lendemain. Et parfois, c’est la peur qui prend le dessus. et là…. c’est la fin, car ça m’amène à des angoisses sur lesquelles je tourne en rond des heures durant. J’en pleure même parfois. D’où ça vient ? je ne sais pas, je n’ai jamais su et je ne saurais peut-être jamais. Si, j’ai peut-êre une hypothèse, c’est l’arrivée de la nuit, du noir, des ténèbres. Mais alors pourquoi j’adore me lever en pleine nuit, tôt le matin si j’en avais véritablement peur ?

Bon, quoi qu’il en soit, ce soir, ça ne va pas, mais ça ira sûrement mieux demain.

Et par ailleurs, je donne ma force à Clément et Etienne que nous avons croisés aujourd’hui et je leur souhaite bonne chance.

Demain, go to Mauléon-Licharre (18 km)


Laurienne : Ce soir, un peu de divertissement, le petit village de l’hôpital Saint Blaise avec ses 70 âmes propose un spectacle son et lumière dans l’église. Une église classée au patrimoine mondial de l’Unesco dans le cadre des Chemins de Compostelle.

Un spectacle entièrement à l'initiative des 70 âmes du village qui ont pour le coup fait un travail formidable. Très réussis, les textes, la mise en scène mettent joliment en valeur ce lieu, son architecture et son histoire. Elle possède, tout de même, encore sa charpente en bois d’origine, 900 ans… Ce n’est pas du Ikea.

Le final fut sublime, la voûte avec un jeu de lumières extraordinaire et une musique à la fois orientale et baroque rappelant les influences de construction. Un enchantement !


Lundi 13 juin : Mauléon

B : J’ai entendu dire que Mauléon était la capitale de l’espadrille. J’ai été voir une boutique qui en vendait des centaines, ainsi que des bérets basques et des magnifiques T-shirts. Pour tout vous dire, au début, je voulais consacrer ce blog au prologue de l’un de mes manuscrits “The Cordyceps”.

Dans deux jours, c’est Jean Pied de Port. J’ai hâte, car pour moi, ça signifie une frontière passée au niveau du plan de marche. Premièrement? car c’est par là que passent la plupart des pèlerins pour se rendre à Santiago et de deux, ça marque le dernier tronçon, la dernière ligne droite de mon voyage. C’est aussi là que l’on a un jour de repos…

Bref, vous l’aurez compris, je suis plus impatient que jamais. Demain : avant dernière étape du Piémont : Saint Just Ibarre


Laurienne : Comme un avant-goût de défi. 18 km dans la montagne ce n’était pas suffisant, mal habituée ou peut-être trop habituée à la difficulté, une idée nous est venue. Pourquoi pas faire 18 km d’une seule traite, c'est-à-dire sans pause. On a donc pris un rythme de croisière, faut pas non plus faire n’importe quoi !

Rythme de croisière : rythme constant sans trop forcer. “Qui ménage sa monture va loin !” J’adore ce dicton !

Donc, avec notre rythme de croisière, nous sommes arrivés à bon port sans difficultés majeures et qui plus est à l’heure pour récupérer les clefs du gîte avant la sacro sainte pause de midi du secrétaire de mairie, gardien des clefs pendant les heures de bureau…. Faut pas déconner.

Vous vous demandez si nous sommes un peu fous… mais non, je vous rassure, nous nous préparons tout simplement à une étape défi qui sera, j’en suis sûre, relevé avec succès. A suivre.


Mardi 14 juin : Saint Just Ibarre

B : On n’a pas ce qu’on mérite. Aujourd’hui, je me suis tordu la cheville. Elle est gonflée. Elle fait mal par moments. Demain donc, pas de marche. On va chez le médecin à Saint Jean Pied de Port. Tout ça est arrivé à cause de l’un de mes excès de colère, car je pensais avoir perdu mes lunettes de vue, j’ai donc abandonné Laurienne en passant devant et en courant. Et c’est là que je retombe en arrière et que mon pied part en avant.

Des excès de colère plus fréquents et que j’ai de plus en plus de mal à contenir. Même en écrivant ce blog, j’ai envie de balancer le carnet dans la rivière qui se trouve en face de moi. Bref, de toute façon, je sais que ça va empirer. Je me connais. Mais ce n'est pas grave. Que voulez-vous, je n'y peux rien.


Laurienne : Cette dernière étape de montagne est pour moi l’occasion idéale pour vous raconter un peu ce chemin, ce GR 78.

Pour aller à Compostelle, il y a les grandes voies : Tours, Vézelay, le Puy en Velay, Arles. Et puis ce chemin de l'Italie vers l’Espagne qui passe par le Piémont pyrénéen…. Voie méconnue qui vous fait plonger au cœur de l’histoire, de l'art, de la culture tout en vous faisant toucher l’esprit du chemin car, oui, vous l’avez compris, il y a une énergie propre aux chemins de Compostelle.

Revenons à nos moutons…. du pays cathare, on passe chez Saint Dominique, puis on dort chez les protestants en Ariège avant de poursuivre vers la cité épiscopale de Saint Lizier, les églises du Couserans, son fromage et plus loin, c’est Saint Bertrand et Lourdes. Quel merveilleux chemin chargé d’histoire, de miracles, de paysages grandioses, peu fréquenté avec 500 marcheurs par an, le dernier à garder son authenticité, le seul où l’on peut encore ressentir la plénitude de la solitude.

Alors comment résister à l’appel du voyage ?


Mercredi 15 juin : Saint Jean Pied de Port.

B : “Quoi de neuf docteur ! “ Une entorse. Bon et bien j’ai tout gagné : attelle, immobilisation durant trois jours minimum, pommade, glace et futures journées à la rivière. Sinon, bah pas grand chose. On n’a pas marché, c’est Marco, le propriétaire du gîte de Saint Just Ibarre qui nous a déposés devant la poste. De toute façon, il va falloir attendre et quand l’on reprendra, il ne faudra pas dépasser les 20 km par étape et ne pas avoir trop de dénivelés. Bonne nuit à vous.


Laurienne : Saint Jean Pied de Port, ville liée depuis des siècles au pèlerinage en direction de Santiago. Ultime étape des pèlerins qui convergent vers le pays basque par les voies de Tours, Vézelay, du Puy en Velay et du Piémont. Ces fameux “marcheurs de dieu” qui vénéraient le tombeau de l’apôtre Saint Jacques au confins de la Galice, affluent de toute l’Europe. Une fois la porte Saint Jacques passée, qui marque l'entrée dans la ville, les marcheurs cherchent un lieu d’accueil suivant la rue pavée de la Citadelle, atteignent l’église Notre Dame du Bout du Pont et savourent enfin un repos bien mérité. Encore aujourd'hui, “les pèlerins modernes” font le même trajet, passent aux mêmes endroits et font halte ici avant l’épreuve tant redoutée du franchissement des Pyrénées pour rejoindre Roncevaux.


Jeudi 16 juin : Saint Jean Pied de Port

B : Aujourd’hui journée plutôt tranquille, lecture, pieds dans la rivière, sieste…

Je ne vais pas vous mentir : ça fait du bien. Mais j’aimerais que l’on reparte vite. Sinon, Anne, une marcheuse, qui a lu mon manuscrit de “The Cordyceps” le trouve cohérent avec du suspense et deux intrigues à la fois. Un bon point.


Laurienne : Au pied du Col de Roncevaux ou Ibaneta en basque, je ne pouvais pas ne pas parler du légendaire Roland.

C’est là que Roland conduisant l’arrière garde de Charlemagne fut surpris le 15 août 778 par les Vascons et non les sarrasins, comme prétend la fameuse chanson !

Les Vascons (ancêtres des Basques et des Gascons) ont tendu un guet-apens à Roland qui venait de piller et incendier leur capitale, Pampelune. Il sonna de son cor, trop tard pour que le roi puisse lui prêter assistance. Au col, vous trouverez un rocher de granit orné de bas reliefs en bronze, chantant la mémoire de ce chevalier mort en ce lieu.

Mais surtout ne pas confondre avec la brèche de Roland qui se trouve dans les Hautes Pyrénées au-dessus du cirque de Gavarnie, ni avec le Pas de Roland qui se trouve le long de la Nive dans la commune d’Itxassou.


Vendredi 17 juin : Saint Jean Pied de Port – Repos

B : Les espagnols nous ont envahi ! Une troupe de 50 élèves d’une école de chant est arrivée cet après-midi. Autant dire que l’endroit ressemblait plus à un campus universitaire qu’à un gîte de pèlerins.

A part ça, ma cheville est toujours gonflée et dimanche nous nous rendons à Aire sur l’Adour, quoi qu’il arrive. J’ai pas grand chose à dire en ce moment, désolé.


Laurienne : En attente du rétablissement de B, curieuse que je suis, j’ai assisté à une partie de pelote basque, de grand chistera pour être précise. La précision est importante car il existe une vingtaine de jeux de pelote basque. Pour info, la chistera est le long gant d’osier courbé que porte le joueur au bout du bras.

Bref, revenons à la partie, l’arbitre présente les joueurs de deux équipes, six champions au palmarès international bien rempli.

Quelques chants basques pour l’ambiance, nous sommes au cœur de cette culture, il ne faut pas l’oublier !

Trois contre trois, la confrontation peut débuter. La pelote cogne contre le fronton à une vitesse qui peut atteindre 300 km/h Je comprends mieux le bruit si particulier de l’impact pelote/fronton. Jeu technique et physique à la gestuelle unique, on dirait presque une chorégraphie. Un engagement extrême est nécessaire pour rattraper et renvoyer cette pelote. Avec rebond et sans rebond, avec revers, coup droit ou en faisant la fameuse attaque appelée cortada, la partie est intense, aucune équipe ne veut perdre. D’ailleurs la première équipe arrivée à 40 points obtient la victoire, ce soir ce sera 39-40, une partie serrée jusqu’à la fin.

Le spectacle est entier dans une atmosphère familiale et décontractée, une énergie positive s’en dégage, les spectateurs encouragent tour à tour chacun des joueurs, moi je découvre et j’adore !


Dimanche 19 juin : Aire sur l’Adour

B :”Le train TER Nouvelle Aquitaine à destination d’Oloron Sainte Marie va partir. Prenez garde à la fermeture automatique des portes. Attention au départ”. Voilà ce que j’entendais lors de l’attente du bus vers Aire sur l’Adour à la gare de Pau. La journée a été rythmée par les trains et le bus. La dernière ligne droite est amorcée : plus que 15 jours. J’ai de plus en plus envie de rentrer, mais cette envie va devoir s’abstenir pour les 15 derniers jours. Demain, on repart pour une étape de 13 km.


Laurienne : voyage entre St Jean Pied de Port et Aire sur Adour

Lundi 20 juin : Aire-sur-l’Adour

B : Bon, c'est fini. On devait repartir ce matin sur le GR 65, et bien on repartira par la voie des trains et des bus, direction Rennes. C’est pas grave. Je me dis que j'ai déjà parcouru un long chemin, donc, c’est pas grave. Mais je ne vous quitte pas pour autant, car ma prise en charge est finie le 8 juillet. Bon, je vous laisse, j’ai une journée chargée demain (je pourrais presque qualifier “chargée d'euphémisme")


Laurienne : Le diagnostic est clair, dix jours d’arrêt de toutes activités sportives, attelle à la cheville, radio de contrôle et séances de kiné…. Il sonne comme le glas de notre aventure, mêlant tristesse, frustration et fierté. Nous avons tout de même fait le Chemin de Stevenson et du Piémont en totalité. Deux Chemins que nous avons ouverts pour l’association, deux Chemins aussi sportifs, aussi différents, aussi beaux, aussi riches en rencontres et en anecdotes l’un que l’autre. B n’a pas démérité, 1200 km parcourus dans des territoires parfois reculés et sauvages où la nature est reine et l’empreinte de l’homme presque imperceptible. Il en a fait du chemin mon compagnon de route, il en a découvert des gens, des lieux, mais il s’est surtout découvert une capacité, celle de la détermination à se dépasser un peu plus tous les jours, à s’ouvrir au monde, à la diversité qui nous entoure pour imaginer un après marche différent. Merci B pour ton engagement, va et invente ta vie.


Du 21 à 23 juin : B. et Laurienne n’ont rien écrit

Vendredi 24 juin : Rennes

B : La gare de Rennes : l’endroit où plusieurs personnes s'y rendent pour aller au travail, rentrer chez soi ou encore aller à un rendez-vous. Les trains de cette gare sont des trains express régionaux (ou TER) qui desservent, par exemple, Retiers, Vitré ou Saint-Malo. On y trouve aussi des trains “grande vitesse” (TGV) dont les principales destinations sont Brest, Quimper et Paris-Montparnasse. Cette gare abrite aussi de nombreuses boutiques comme un Relay, le magasin du Stade rennais ou encore un Brioche Dorée. Elle héberge aussi la ligne du métro qui va de La Poterie à J.F. Kennedy en passant par 13 autres stations comme Pontchaillou, Henri Fréville ou encore République. Cette dernière station est située au point d’affluence des bus de la STAR, la société en charge des transports en commun de la ville. République (ou Répu pour les habitués) regroupe toutes les lignes de bus de la compagnie qui convergent vers l’aéroport, la route de Lorient et la Zone Industrielle Ouest. Comme vous avez pu le voir,, je suis un fin connaisseur des transports de cette ville. Par contre, je ne connais pas beaucoup la ville en elle-même.

Maintenant, parlons un peu de la marche ou plutôt de ce que j’ai lu pendant la marche : 10 livres au total qui comptent 2 romans de Dan Brown “Da Vinci Code” et “Anges et Démons”, 3 romans ”La guerre des Clans” de Eric Hunter “Nuit étoilée “Crépuscule” et “Coucher de Soleil” , 3 romans de Stephen King “Dôme”, “L’Institut” et “Cimetière” et enfin 2 romans de Musso : “L’instant présent" et “La fille de Brooklyn". Joli palmarès, je dirais.

Bon voilà, tout ça pour vous dire que je suis de retour à Rennes et que l’aventure avec Seuil se finira très prochainement (si l’ASE le permet !).

Je voulais remercier Monsieur Dall’Acqua, le directeur de l’association, Anthony et Clémence, les responsables de marches et surtout Laurienne, la personne qui m’a accompagné tout au long de ce voyage. Merci beaucoup.


Laurienne : Bon, je ne pouvais pas conclure ce blog comme ça. En bon “guide du routard”, comme me surnomment certains à Seuil, je ne citerais aucun nom, je me dois de vous parler de Rennes, capitale de la Bretagne, située au confluent de la Vilaine et de l’Ille, ce qui lui vaut le nom celtique Condate “confluent” dans l’antiquité, est la capitale du peuple gaulois des Redones dont dérive son nom actuel, Roazhon en breton. Cela fait dix ans pile que je suis venue pour la première fois dans cette ville. Je me souviens encore de mon arrivée à la gare totalement transformée, métamorphosée depuis.

Ville d'art et d’Histoire, elle possède un patrimoine architectural riche et diversifié. Ancienne cité médiévale, en son cœur cohabitent maisons à pans de bois, ruelles pavées et cours intérieures secrètes. En flânant ailleurs dans le centre, d’élégants hôtels particuliers jouxtent et contrastent avec des bâtiments futuristes comme les champs libres qui regroupent en son sein le Musée de Bretagne, l’Espace des sciences et la Bibliothèque métropolitaine. Et bien sûr, je n’oublie pas le monument le plus emblématique de la ville, le Parlement de Bretagne, figure de proue du patrimoine breton.

A la fois moderne et dynamique, Rennes se visite pour elle-même au gré de nos envies. En perpétuelle évolution, elle vous transporte dans son passé, sa culture.

Assise place des Lices, j’ai pris le temps d’observer fourmiller la jeunesse de cette ville universitaire pour en apprécier son énergie… Et comme disent les bretons “Degemer Mat” "Bienvenue”.


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